L'épicurime de Lucrère: physique, métaphysique et morale
Publié le 01/08/2011
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Lucrèce ne décrit que pour prouver... S'il avait été amené à penser et à écrire par ce découragement que laisse dans l'âme de l'honnête homme le spectacle des désastres publics, il eût considéré la science comme un pis-aUer, la philosophie comme un simple moyen de consolation... Au contraire, il n'en veut à l'ambition et à l'intrigue que parce qu'elles détournent les âmes de la vraie philosophie. La science n'est pas un simple refuge, une consolation dans les temps de misères : c'est l'objet même de la vie humaine. (...) L'atomisme, un des plus profonds systèmes de philosophie que l'Antiquité ait produits a eu pour fondateurs Leucippe et Démocrite... Avec Lucrèce, la Nature revêt une majesté nouvelle; surtout, il n'y a plus de phénomène qui ne mérite d'être décrit, pas défait dont on puisse contester l'importance, puisque tous les changements, grands et petits, ont les mêmes causes, puisque la même raison fait que le fer s'use et que l'univers s'écoule, puisque toutes les descriptions doivent mettre en lumière la même éternelle vérité... C'est ainsi que la science moderne, en tirant les conséquences de la théorie atomique, en les vérifiant par l'expérience, est venue donner aux hypothèses de Démocrite, d'Épicure et de Lucrèce une éclatante confirmation.

«
L'opposition simplificatrice entre une philosophie dite
« idéaliste » et une philosophie dite « matérialiste », l'une
ayant dominé l'histoire de notre pensée, l'autre ayant été
opprimée -Lucrèce refoulé par Platon, les Stoïciens et
saint Augustin -Gassendi et La Mettrie refoulés par
Descartes et par Kant - n'est guère pertinente.
Outre son
caractère réducteur, de nombreuses raisons font qu'elle ne
nous permet pas de comprendre vraiment ces stratégies
d'oubli tissées le long de la trajectoire du Poème de Lucrèce.
Que
la lecture des six Chants du De Natura Rerum nous
permette d'éclairer cet oubli, en sollicitant le droit d'entrer
au Jardin des Amis, avec Memmius, ami de l'auteur et
dédicataire du Poème : autour de Lucrèce, Démocrite et
Épicure, Philodème, Montaigne, Giordano Bruno, Léonard
de Vinci, Gassendi, Diderot, Buffon, Marx, Bergson,
d'autres
encore, dont certains de nos contemporains généticiens,
mathématiciens et philosophes, qui revendiquent aujour
d'hui leur appartenance au Ja,rdin.
Car,
dans ce petit espace et dans le petit instant de la
lecture, à l'écart de la douleur et de l'Histoire, ce que les
principes de la philosophie de Lucrèce nous donnent à lire,
ce
n'est rien moins que les i:r,nages des mondes infinis qui
infiniment se forment, et l'éternité de la sensation de plaisir.
L'énigme du Poème En des temps de détresse politique, les
Stoïciens
et Épicure avaient bâti des
forteresses, hauts lieux de la résistance scientifique et
éthique, tant contre l'ignorance et la superstition que
contre la violence et la déraison.
Malgré les persécutions
contre Épicure et sa postérité, deux siècles d'épicurisme
vivant séparent le maître de son disciple latin.
À nouveau la
détresse politique, les guerres civiles.
Nous sommes à la
veille de la chute de la République romaine, lorsque naît
Titus Lucretius Carus, vers 98.
Jusqu'à sa mort, vers 55, il
est le témoin de ces luttes et de la rivalité pour le partage du
pouvoir entre Crassus, Pompée et Jules César.
Il dénonce
souvent avec mépris la scélératesse des politiques que l'on
voit « suer le sang et s'épuiser dans leurs , vaines luttes sur
l'étroit chemin de l'ambition» (V, v.
1132-1133; cf.
biblio
graphie, n° 1).
Alors, se dira-t-on simplement, lui aussi bâtit sa forteresse,
confiant dans l'ataraxie d'Épicure, cette absence de trouble
de l'âme, qu'il renouvelle en latin, et livre ains~ à notre
admiration l'une des dernières figures de la solitude du
Sage antique .
Non : il faut rejeter cette image, naïve mais
non innocente, qui ne saurait rendre compte des difficultés
qui entourent son œuvre : pourquoi la publication du De
Natura donne-t-elle lieu immédiatement et jusqu'à nous à.
»
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