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L'écrivain est-il un enchanteur ?

Publié le 07/06/2009

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Introduction Un enchanteur est comme un magicien : il est à la fois celui qui donne du plaisir, et celui qui trompe par l'illusion ; il est celui qui charme, dans tous les sens du mot, c'est-à-dire qui séduit, et qui jette un sort. Mais est-ce bien là ce que nous cherchons dans la littérature ? Le plaisir et l'enchantement priment-ils sur la réflexion, et l'intelligence des choses ? Nous verrons d'abord comment l'écrivain peut enchanter le lecteur, puis quelle est sa fonction critique, avant de nous intéresser à la transformation du réel opérée par la littérature. I. Enchanter le lecteur A. La notion de plaisir 1. Le plaisir esthétique, le beau Si la littérature nous enchante, nous fait plaisir, c'est avant tout pour des raisons esthétiques. Nous trouverons « beaux » un roman ou un poème, et c'est de cette contemplation de la beauté, quand elle serait uniquement formelle, que nous tirons du plaisir. Exemples : la poésie hermétique de Mallarmé, qui cisèle les mots ; la pureté du style de Racine ; la virtuosité syntaxique de Proust. 2. Le plaisir intellectuel, le brio Ce plaisir esthétique est encore renforcé par le brio intellectuel de l'écrivain : un beau raisonnement, un paradoxe finement présenté, enchanteront notre esprit. Là encore, c'est la virtuosité qui nous donnera du plaisir. Exemples : les Maximes de La Rochefoucauld, les longues introspections dans les romans de Stendhal, les déductions subtiles de Zadig. 3. Le plaisir intellectuel, la compréhension Dès lors, le plaisir sera aussi celui de mieux comprendre le monde, en comprenant les réflexions de l'écrivain. Cela concerne d'ailleurs aussi bien la littérature que la philosophie. Exemples : les Pensées de Pascal, les Essais de Montaigne, mais aussi des ouvrages de fiction, comme Les Lettres persanes de Montesquieu, ou les Contes, de Voltaire.

« Dans le roman réaliste, au xix e comme au xx e siècle, l'illusion est portée à son paroxysme : les personnages sont décrits comme s'ils étaient réels, et sont le plus souvent vraisemblables : les lieux exis tent réellement, même si les noms sont parfois changés.

C'est ce qu'on nomme « l'effet de réel ».

Mais le mot même d'« effet montre bien qu'ils'agit là d'une illusion.Exemples : le Paris de Balzac ; la petite ville de Verrières, dans Le Rouge et le Noir, de Stendhal (il s'agit deGrenoble) ; la mine dans Germinal, de Zola. 3.

Écriture et magieEn procédant alors à une confusion volontaire entre le réel et le fictif, en tentant de faire croire au lecteur à lavéracité du récit, la littérature fonctionne bien comme un tour de magie : l'écrivain est un illusionniste puissant, quinon seulement crée un monde fictif de toutes pièces, mais encore parvient à nous y transporter, sans que nousbougions pourtant de notre fauteuil ! Transition Rêver, partir, s'évader...

telle n'est pourtant pas l'unique fonction de la littérature, qui sait aussi nous irriter ou nousfaire réagir, en dénonçant les maux de son temps. II.

Engagement et dénonciation A.

La littérature dans le monde 1.

Engagement dans la guerreAinsi l'engagement de l'écrivain est-il très fréquent en temps de guerre : engagement physique pour certains, maissurtout engagement intellectuel, quand leurs oeuvres ont pour fonction de dénoncer les atrocités de la guerre.Exemples : Le rendez-vous allemand, d'Éluard ; L'Espoir, de Malraux ; Le Dormeur du val, de Rimbaud ; Le Silence dela mer, de Vercors.2.

Engagement dans la sociétéCet engagement ne se limite pas aux excès de la guerre.

L'écrivain a aussi pour fonction de veiller à la marche de lasociété, et d'en dénoncer les abus, les injustices, les erreurs.

Cette fonction de dénonciation portera alors autantsur des événements particuliers, sur des comportements aberrants, que sur des structures sociales entières.Exemples : la critique des dévots chez Molière ; la critique de l'Inquisition dans Candide de Voltaire ; J'accuse deZola, à propos de l'affaire Dreyfus.3.

Fonction intellectuelle et morale de l'écrivainL'écrivain n'est plus alors seulement un enchanteur, censé nous faire rêver, en nous faisant oublier le réel, mais aaussi une véritable fonction intellectuelle et morale.

Il a pour devoir, du fait de sa position d'intellectuel, dedénoncer les injustices et de s'impliquer dans la société.

Ce sera souvent par voie de presse, mais parfois aussidirectement dans ses oeuvres. B.

Irritation 1.

« Gratter les plaies » Dès lors, si l'écrivain dénonce ce qui lui paraît injuste, et s'engage dans la société, c'est-à-dire prend uneposition politique, il est évident qu'il peut déranger.

En « grattant les plaies » d'une société qui se croit bienportante, l'écrivain met à jour ce que d'aucuns préféreraient cacher.

Il devient alors irritant, soit parce qu'ildérange les puissants, soit parce qu'il empêche le lecteur de rester dans un confort ignorant et aveugle. Exemples : chez Molière, la critique des dévots, la critique des méde cins, la critique des précieux...

; chez Beaumarchais, dans Le Mariage de Figaro, la revendication du mérite contre la noblesse. 2.

L'écrivain est dangereux Dans cette mesure, l'écrivain peut même apparaître dangereux, suivant l'audience qu'il aura.

Soit parce qu'ilencourage un mouvement de contestation, soit parce qu'il s'élève contre des décisions du pou voir, il prend des risques, qu'il paye parfois cher. Exemples : l'emprisonnement de Théophile de Viau ; celui de Sade ; la déportation d'écrivains russes ; l'exil d'Ovide ; l'exil de Neruda. 3.

Polémique et provocation Bien entendu, cette fonction critique de l'écrivain peut aussi être excessive, quand celui-ci confondcontestation et provocation, discussion et polémique.

Au nom de la liberté d'expression, l'écrivain peut perdrele sens de la mesure, et ne plus alors remplir la fonction critique qui lui est impartie, en devenant un simple agitateur. Exemples : les écrits antisémites de Céline, par rapport à son immense Voyage au bout de la nuit ; L'Ode à Franco de Claudel ; les justifications du stalinisme par Aragon.. »

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