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Le valet, maître du jeu ?

Publié le 15/03/2015

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de la situation pour rendre sensible la cruauté des rapports entre inférieurs et supé­rieurs. Comme le dit Cléanthis, dans L'île des Esclaves, « nous autres esclaves, nous sommes doués contre nos maîtres d'une pénétration... Oh ! ce sont de pauvres gens pour nous. « (scène 3). Investis de la puissance, les domestiques ne se priveront pas d'exhiber sur quels ridicules et sur quels vices elle repose. Arlequin se divertira à courtiser et à humilier Euphrosine (L'île des Esclaves, scène 8), imi­tant les seigneurs qui exploitent sexuellement leurs servantes (tel le Comte du Ma­riage de Figaro avec Suzanne). Et tous infligeront à leurs maîtres réduits au si­lence les « brutalités « (selon le mot de Silvia, dans Le Jeu, II, 7) verbales, et parfois physiques, dont ils eurent à souffrir — ces « bontés familières «, dont Figaro remercie le Comte de l'avoir « toujours honoré « (Barbier, I, 2) : sobriquets (L'île des Esclaves, scènes 2 et 3), injures et menaces...

« E X P 0 S É S F C H E S de la situation pour rendre sensible la cruauté des rapports entre inférieurs et supé­ rieurs.

Comme le dit Cléanthis, dans L 'Île des Esclaves, « nous autres esclaves, nous sommes doués contre nos maîtres d'une pénétration ...

Oh! ce sont de pauvres gens pour nous.» (scène 3).

Investis de la puissance, les domestiques ne se priveront pas d'exhiber sur quels ridicules et sur quels vices elle repose.

Arlequin se divertira à courtiser et à humilier Euphrosine (L'Îie des Esclaves, scène 8), imi­ tant les seigneurs qui exploitent sexuellement leurs servantes (tel le Comte du Ma­ riage de Figaro avec Suzanne).

Et tous infligeront à leurs maîtres réduits au si­ lence les « brutalités » (selon le mot de Silvia, dans Le Jeu, Il, 7) verbales, et parfois physiques, dont ils eurent à souffrir -ces «bontés familières », dont Figaro remercie le Comte de l'avoir« toujours honoré» (Barbier, I, 2): sobriquets (L'Îie des Esclaves, scènes 2 et 3), injures et menaces ...

«Vous êtes des barbares», s'écrie Euphrosine, tandis qu'Iphicrate s'indigne: « Voulez-vous que je m'avoue un ridicule? », demande-t-il à Arlequin qui lui ré­ pond sans sourciller : « Qu'importe, quand on l'a été.

» (L'Îie des Esclaves, scène 5).

Dans ces valets qui soudain les narguent et les rudoient, les maîtres découvrent avec horreur l'image impitoyable de leur propre vérité.

~ Ill -LE POUVOIR EN COULISSES Complicité ...

Mascarade et utopie ne sont pas les seuls moyens pour le valet de devenir le maître du maître.

La complicité en est un autre, moins spectaculaire, mais plus am­ bigu.

Si le domestique a besoin de son patron pour vivre, ce dernier a parfois be­ soin de son valet pour réaliser ses désirs.

Apprenant que Figaro a accès chez Rosine, le Comte« l'embrasse», comme l'indique la didascalie, et lui dit: «Ah! Figaro, mon ami, tu seras mon ange, mon libérateur, mon Dieu tutélaire.

» (Bar­ bier, I, 4).

La passion brouille les cartes de la hiérarchie sociale, ce que Figaro commente ironiquement : « Peste 1 comme l'utilité vous a bientôt rapproché les distances.

Parlez-moi des gens passionnés.

» En servant la passion qui aveugle le maître, le valet assure son pouvoir sur lui.

Si Figaro n'est pas insensible aux avan­ tages financiers que lui vaudra cette soudaine intimité avec Almaviva, Dubois, l'ex-valet du Dorante des Fausses Confidences de Marivaux, s'en soucie peu (I, 2) .

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et aliénation Intrigant de génie, cet« homme de sang-froid», ainsi qu'il se définit lui-même (III, 1), préfère rester dans l'ombre et se contenter de savourer l'intime conviction de sa supériorité sur des êtres en apparence destinés à le dominer.

Maître du secret des cœurs, il en joue sans scrupules et manipule leurs sentiments.

Par ses « fausses confidences », tramées comme autant de pièges, il pousse Araminte dans ses der­ niers retranchements et la contraint à s'avouer à elle-même son amour« scanda­ leux » pour son employé.

À Dorante, il dicte la stratégie à tenir, et le jeune homme est si bien sa créature qu'il n'hésite pas à s'identifier à lui: «Il faut qu'elle nous épouse.

» (III, 1 ).

Avec Dubois, le rapport maître/serviteur devient un rapport d'aliénation: les maîtres cessent de s'appartenir et de maîtriser leur destin.

Jouets de leur valet, ils attendent de lui, dans une totale dépendance, la réalisation de leurs désirs.

MAÎTRES ET VALBTS =:TI]. »

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