LE TRAVAIL ET LA MORALE
Publié le 21/01/2020
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tous les éléments que l’on considère ordinairement comme caractéristiques de l’humanité.
Dans sa « dialectique du maître et de l’esclave », Hegel montre ensuite que les transformations introduites par l’activité laborieuse dans l’être humain sont bien fondamentales, puisqu’elles concernent les formes possibles de sa conscience et de sa liberté. Du point de vue hégélien, en effet, le travail est objectivation du subjectif et subjectivation de l’objectif : le projet de l’homme s’inscrit dans la nature et la transforme, il y trouve sa réalité achevée. Ce qui permet au travailleur de se reconnaître dans la matière transformée et de se redéfinir, même s’il est d’abord esclave, comme doté de la conscience qui a modifié la matière — et en ce sens capable d’accéder au plus haut degré de la liberté, celle qui, au lieu de demeurer théorique ou abstraite
«
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LA PRATIQUE ET LES FINS
[I.
De quelle valeur morale est-il question ?]
Nietzsche a pu ironiser sur ceux qu'il nomme les «apologistes du tra
vail », dénonçant dans leurs éloges la volonté de maintenir les travailleurs
·dans un état de soumission achevée.
On a pu en effet, notamment au
xrxe siècle, accorder au travail une valeur morale dans le sens assez parti
culier où il empêcherait l'apparition des vices.
Un certain paternalisme
faisait alors valoir, puisque« l'oisiveté est la mère de tous les vices», que
le meilleur moyen d'échapper à ces derniers consiste à passer un maxi-
mum de temps au travail.
Ainsi moralisation et exploitation de la classe
ouvrière pouvaient-elles se prêter main forte ...
Dans cette optique, la régu-
larité imposée par le travail aussi bien que la hiérarchie régnant dans les
usines dressaient des barrières efficaces contre la fainéantise, la rêverie
stérile, l'absence de respect dû aux «supérieurs», etc., et ne pouvaient
que favoriser la stabilité, le sens des responsabilités, l'honnêteté, le goût
de l'ordre ...
Si la valeur morale du travail ne peut susciter d'autres considérations
que cette fade moralisation de la classe ouvrière, on doit reconnaître que
....
·~ .
·~.; "
l'activité laborieuse n'a rien de très enthousiasmant et ne mérite pas de •:
longues analyses philosophiques.
Il est cependant notable que le travail, indépendamment de ses aspects
matériels et techniques, apporte à l'être humain tout autre chose que le
simple goût de l'ordre et de la discipline.
Il participe en fait à la définition
même de l'humanité, et c'est à ce niveau que l'on peut, plus sérieusement,
évoquer sa valeur morale.
Elle désignera cette fois la spécificité de
l'homme lui-même, telle que le travail la fait apparaître.
[Il.
L'humanisation par le travail]
Lorsque Rousseau, dans son Discours sur l'origine et les fondements
de l'inégalité parmi les hommes, envisage le passage de l'homme de la
nature - qui n'est qu'une sorte d'animal simplement doté de perfectibi
lité - à l'homme naturel qui vivra dans des sociétés correctement organi
sées, il fait intervenir, parmi d'autres facteurs, l'activité laborieuse (sous
les formes initiales de l'agriculture et de l'élevage).
S'il a fallu, dans l'his
toire telle qu'il la reconstitue, que les hommes se r~ssemblent en raison
des modifications subies par leur milieu, ces rassemblements déterminent
en effet un déséquilibre entre leurs besoins et les ressources naturelles.
Le
travail a donc pour fonction initiale d'obtenir de la nature autre chose que
sa production spontanée, pour satisfaire les besoins de l'homme.
Mais
Rousseau souligne que la modification va au-delà de la seule nature : elle
concerne l'homme lui-même, puisque son accès au travail est contempo
rain de l'apparition du langage, des vrais sentiments, de la propriété, et de.
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