Le travail est-il nécessaire pour devenir libre ?
Publié le 03/03/2004
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Le travail est une activité humaine de production, ou, plus généralement, d’application à certains objets dans le but d’obtenir certains résultats. Cette application peut être contrainte – on peut travailler davantage pour des raisons sociales (pour gagner de quoi vivre, par exemple) que par désir de produire ce que l’on travaille à produire – mais elle peut aussi, peut-être, être libre : on travaille parce que l’on en tire un bénéfice pour la constitution de notre être, pour notre liberté par exemple, en gagnant en indépendance de pensée, en efficacité de méthode, etc.
C’est justement ce rapport entre travail et liberté qui est mis en question par le sujet, sous l’angle particulier de la nécessité. Est nécessaire ce dont on ne peut pas se passer (la définition philosophique classique du nécessaire est « ce qui ne peut pas ne pas être, ni être autrement). Le sujet demande donc aussi, implicitement, si l’on peut devenir libre par d’autres moyens que par le travail.
Il faut interroger enfin l’expression « devenir libre «. L’emploi du mot « devenir « renvoie à un processus d’acquisition de la liberté et non à un état figé de liberté. Le mot « libre «, quant à lui, désigne, très généralement, un état d’absence de contrainte, dans lequel il est possible de faire tout ce que nous souhaitons : cela pose problème quant à la question du travail, qui suppose certainement des contraintes, une discipline.
Il va falloir interroger le paradoxe selon lequel le travail serait nécessaire pour être libre, en définissant les moyens d’acquisition de la liberté, ainsi que la relation que chaque homme entretient avec le travail : cette relation est-elle d’asservissement ou au contraire de profit dans un but d’accomplissement de soi ?

«
(ce texte est une explication de la dialectique hégélienne du maître et de l'esclave)
« Le Maître force l'Esclave à travailler.
Et en travaillant, l'Esclave devient maître de la Nature.
Or, il n'est devenul'Esclave du Maître que parce que au prime abord il était esclave de la Nature, en se solidarisant avec elle et en sesubordonnant à ses lois par l'acceptation de l'instinct de conservation.
En devenant par le travail maître de laNature, l'Esclave se libère donc de sa propre nature, de son propre instinct qui le liait à la Nature et qui faisait de luil'Esclave du Maître.
En libérant l'Esclave de la Nature, le travail le libère donc aussi de lui-même, de sa natured'Esclave : il le libère du Maître.
Dans le Monde naturel, donné, brut, l'Esclave est esclave du Maître.
Dans le Mondetechnique, transformé par son travail, il règne ou, du moins, règnera un jour en Maître absolu.
Et cette Maîtrise quinaît du travail, de la transformation progressive du Monde donné et de l'homme donné dans ce Monde, sera toutautre chose que la Maîtrise « immédiate » du Maître.
L'avenir et l'Histoire appartiennent donc non pas au Maîtreguerrier, qui ou bien meurt ou bien se maintient indéfiniment dans l'identité avec soi-même, mais à l'Esclavetravailleur.
Celui ci, en transformant le Monde donné par son travail, transcende le donné et ce qui est déterminé enlui-même par ce donné ; il se dépasse donc, en dépassant aussi le Maître qui est lié au donné qu'il laisse netravaillant pas intact.
Si l'angoisse de la mort incarnée pour l'Esclave dans la personne du Maître guerrier est lacondition sine qua non du progrès historique, c'est uniquement le travail de l'Esclave qui le réalise et le parfait.
»
Cependant, on pourrait séparer le travail de son but le considérer comme une activité dotée de certains bienfaitspour l'homme, dont une libération.
Prétendre ainsi que le travail libère, c'est se placer dans une perspective proprement humaine, qui consiste à mettrel'accent sur ce que le travailleur retire de son travail plutôt que sur le produit lui-même de son travail.
Toute laquestion alors est bien de savoir jusqu'à quel point on peut appeler « travail » une activité qui n'a pas de résultatvisible, comme par exemple l'entraînement d'un athlète ou d'un gymnaste : pour pouvoir dire que le gymnastetravaille, il faut que la notion ne soit pas réductible au résultat, même si la perspective du résultat n'est jamaisradicalement absente.
Donc, tant que l'on prend le mot travail au sens de l'activité distincte du résultat, il estpossible de maintenir la position selon laquelle le travail est humain et libérateur.
Cette perspective est-elle pourtantlongtemps tenable ?
* La liberté, antérieure au travail ?
Locke, Du gouvernement civil
« Si la terre et toutes les créatures inférieures appartiennent à tous, du moins chaque homme détient-il un droit depropriété sur sa propre personne ; et sur elle aucun autre que lui n'a de droit.
Par suite, son travail personnel etl'oeuvre de ses mains lui appartiennent en propre.
Or chaque fois qu'il retire une chose quelconque de l'état où l'amise et laissée la nature, il mêle à cette chose son travail, il y joint donc un élément personnel : par là il s'enacquiert la propriété.
De plus, lorsque des biens ont ainsi été retirés par lui de l'état commun où les avait mis lanature, le travail qui leur a été incorporé supprime désormais le droit commun, qu'avaient sur eux les autres hommes.Car ce travail est la propriété indiscutable du travailleur, et personne d'autre que lui n'a le droit d'en récolter lesfruits ; du moins tant que les autres disposent en quantités suffisantes, de biens communs de même qualité.
»
Le lien entre travail et liberté étant maintenant affirmé comme possible, il reste à interroger l'idée d'une nécessité dutravail pour l'acquisition de la liberté : il est possible de répondre à cette question en se demandant ce qui, dutravail ou de la liberté, est antérieur par rapport à l'autre : la liberté est-elle l'impulsion première qui pousse l'hommeà choisir de travailler, ou le travail est-il l'activité première qui permet à l'homme de devenir libre ? La réponse finaleau sujet dépendra de la branche que l'on choisira dans son alternative.
Conclusion
Travail et liberté semblent s'opposer, car on a tendance à concevoir le travail comme une contrainte.
Cependant onpeut envisager une valeur du travail en lui-même, qui réside en une capacité de formation de l'homme, qui ainsidéveloppe certaines qualités, ou une certaine autonomie, et il est alors possible de soutenir que le travail sertd'adjuvant dans l'acquisition de la liberté.
Il faut alors déterminer le degré de nécessité de cette intervention dutravail dans le processus d'acquisition de la liberté, afin de pouvoir trancher sur le sujet, dans la conclusion ou en finde troisième partie, en lui apportant une réponse clairement positive ou négative, les deux réponses semblantégalement valables.
Problématique:
Le travail nous impose de multiples contraintes.
Il limite notre "temps libre" et exige souvent de nous des efforts quenous ne consentirions pas à faire de notre plein gré.
Comment donc pourrait-il constituer un facteur de liberté ?.
»
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