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Le temps n'est-il, pour l'homme, que le signe de sa dégradation ?

Publié le 24/03/2004

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temps

éléments de réflexion

* Il peut être intéressant d'étudier les différents sens de dégradation : - C'est d'abord la destitution infamante d'un grade, d'une dignité. - En physique, c'est la transformation de l'énergie en forme de moins en moins utilisable (cf. le deuxième principe de la thermodynamique). - C'est plus généralement une détérioration, un délabrement.

* Sur le temps comme signe de dégradation, comme signe de moindre dignité, consulter Platon, Le Timée; en particulier : 28a-39e.

* Réfléchir sur les phénomènes de vieillissement.

* Sur le mythe de l'âge d'or et de sa dégradation, consulter Hésiode, Les travaux et les jours. * Le temps est ici le lieu du devenir. lectures

* Jankélévitch, La mort (Flammarion).

* Hegel, La raison dans l'histoire (10-18), et surtout le 2e tome de La phénoménologie de l'esprit.

 

Le temps paraît à la fois comme une évidence première (comment ne pas percevoir ses effets, le vieillissement, la succession, l'irréversibilité?) et comme une énigme (comment en parler sans le dénaturer?). Cette ambivalence est féconde pour la philosophie, mais aussi pour la littérature ou encore la religion, qui trouve là matière à faire du temps une clé pour comprendre, décrire, interpréter la situation de l'homme, la condition de l'homme dans le monde, dans l'existence. Or, dans ces trois domaines de l'esprit il est frappant de constater que mettre l'accent sur le temps implique souvent de montrer l'homme dans sa finitude, misère de l'homme qui donne lieu au sentiment nostalgique envers un autre que le temps, âge d'or, vie adamique ou état de nature. C'est que le temps est interprété et valorisé négativement, il est le signe de la dégradation.

                On entend par là plusieurs choses, et en premier lieu l'idée générale d'un avilissement, d'une déchéance, que cette dégradation soit donnée une fois pour toutes, qu'elle soit au contraire un phénomène progressif, ou plus souvent les deux à la fois. Il faut souligner d'emblée l'extrême plasticité du terme, qui peut recouvrir beaucoup de nuances présentes dans plusieurs autres termes comme l'usure, la décadence, la perversion, la corruption. Il y a aussi bien une dimension purement matérielle, par exemple au sens de désagrégation moléculaire, que des connotations morales avec l'avilissement ou la perte d'un grade, ou encore la référence à la vie avec l'idée d'affaiblissement progressif. Cette plasticité fait que l'on peut appliquer ce terme de dégradation aux différentes manières de concevoir le temps.

1)       Comme changement continuel par lequel le présent devient le passé, le temps sera signe de la dégradation de l'homme en tant que celui-ci est lui-même soumis à un changement sur lequel il n'a pas prise.

2)       Comme milieu indéfini analogue à l'espace dans lequel se dérouleraient les événements, le temps sera le signe pour l'homme d'une place qu'il n'a pas choisie, où il n'a pas de repères qui lui préexistent.

Toute la difficulté est alors de penser en quoi cette dégradation serait propre à la condition humaine, pour autant qu'il s'agit de sa dégradation et non de la dégradation de toute chose soumise à génération et corruption, comme dans le cadre des physiques grecques. C'est que le temps doit valoir comme signe, et non plus simplement comme donné, mais ce signe ne présume pas de l'usage qu'on doit en faire. Ainsi, le temps pensé comme dégradation pourra être utilisé comme un sens à interpréter ou comme un indice, voire une indication, selon qu'on y cherche plutôt une signification ou une orientation.

 

temps

« 2.

Conséquence pour l'opposition du temps et de l'éternité Ce texte permet de comprendre que la différence n'est pas tant dans le temps comme facteur devieillissement, de finitude, ou de souffrance, mais entre deux états de l'homme, où 1) l'homme est d'abord soutenu par la grâce de Dieu est ne souffre donc pas du temps, bien que sa nature ne soit pas pour autant pure 2) l'homme est ensuite dans une situation où il ressent le temps dans l'exacte mesure où il ressent l'absence de soutien divin dans son existence. Du coup l'opposition entre temps et éternité prend un sens radical, ce n'est pas vraiment le fini comme tel face àl'infini, mais c'est le fini en tant qu'il s'annule face au souvenir d'un infini qu'il ne peut atteindre, mais qui représentetout. 3.

Une dégradation sans mesure ? Ce qui devient problématique c'est de concevoir une dégradation sans que l'homme ait lui-même lamesure du grade perdu.

C'est que le temps lui-même n'a plus de mesure propre, il n'est pas « l'image mobile del'éternité » comme le définissait Platon dans le Timée , il est au contraire la disproportion même de l'homme entre les deux infinis que décrit Pascal dans la Pensée Lafuma 199 : « Nous voguons sur un milieu vaste, toujours incertains et flottants, poussés d'un bout vers l'autre ; quelque terme où nous pensions nous attacher et nous affermir, ilbranle et nous quitte, et si nous le suivons il échappe à nos prises, nous glisse et fuit d'une fuite éternelle ; rien nes'arrête pour nous ».

Le temps est ce qui fait que l'homme n'a pas de proportion propre, c'est un milieu qui n'a rien àvoir avec le milieu aristotélicien, la juste mesure qui correspond à la nature de l'homme. C'est ce qui fait que la seule mesure qui reste à l'homme n'est pas anthropologique, s'il y a dégradation,c'est bien qu'en un sens il y a toujours une mesure, mais celle-ci ne peut être que théologique, et cela a poursignification philosophique que le temps définit une condition incompatible avec une position stable dans le mondepermettant de connaître les premiers principes.

Ce qui nous rend conscients de la dégradation c'est la venue duChrist (la Pensée 417 va jusqu'à affirmer que « nous ne nous connaissons nous-mêmes que par J.-C.

»). Transition : Pascal ne peut maintenir l'idée de temps comme dégradation que par la dissociation d'une mesureanthropologique et d'une mesure théologique.

Pourtant, cette dissociation, loin d'être évidente, peut tout à faitlaisser la place à une vision peut-être moins pessimiste du temps, pas tellement pessimiste du point de vue del'homme (qui peut et doit maintenir l'espérance d'une grâce) que du point de vue de la philosophie (qui elle ne peutespérer parvenir à concevoir la condition véritable de l'homme sans s'en remettre à la religion). Le temps assigne une place II. 1.

La dichotomie entre permanence et succession On peut alors se servir des philosophies aristotéliciennes du Moyen-Age pour montrer que cettedissociation peut être évitée tout en maintenant l'idée d'une dégradation.

Celle-ci prend alors une valeurconceptuelle différente, elle est moins une signification globale, révélée par la foi et la face-à-face destructeurentre le fini et l'infini, que l'assignation d'une place dans l'ordre des choses créées.

En effet le temps est pensé danssa relation au mode d'être des choses, ce qui permet de dissocier le temps de la durée.

La durée est alors ce quipour une chose caractérise sa subsistance ou sa persévérance dans l'existence indépendamment de ce qui peut lacauser, la faire venir à l'être.

Le temps est quant à lui ce qui pour une chose caractérise la succession d'étatsdifférents.

De ce point de vue le temps est signe de la dégradation au sens où il est l'indice que la réalité qu'ilcaractérise est une réalité successive, par opposition aux réalités permanentes.

Du coup, s'il est signe dedégradation pour l'homme c'est à condition que l'homme soit cet être qui ne retrouve plus du tout en lui la moindretrace de nature, mais seulement des coutumes, c'est-à-dire non des réalités permanentes, substantielles, mais depurs artifices (sans pour autant leur donner une valeur négative). 2.

Temps et hiérarchie des êtres Par contre, la valeur de l'être humain est en jeu à partir du moment où l'on conçoit une hiérarchie desêtres qui s'exprime dans l'opposition entre temps et durée.

Il y a en fait trois durées hiérarchisées : 1) la durée du créateur lui-même qui est éternité 2) la durée non successive des créature, la permanence dépendante, causée et défectible 3) la durée des êtres matériels, et encore, de ce qui en constitue la surface (les accidents) et non la substance, cette dernière durée est le temps Du coup le temps indique une place dans la création.

Si le temps apparaît comme signe d'une dégradation c'estparce qu'il est le signe d'une non-substantialité du devenir humain, d'un processus qui n'est que successif, et qui entant que tel n'est pas orienté vers la perfection, bien que celle-ci même pour les substances ne soit jamaiscomplètement réalisée.. »

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