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Le temps libre est-il le temps de notre liberté ?

Publié le 26/02/2004

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L'oisiveté, qui se réduit à « ne rien faire «, a été généralement condamnée (l'oisiveté, dit-on, est « mère de tous les vices «, tandis que le travail serait source de moralité) depuis le Moyen Âge jusqu'au XIXe siècle (songeons à la critique portée contre elle par saint Thomas d'Aquin, par Th. More dans son Utopie, ou par Voltaire qui écrit : « Il vaut mieux mourir que de traîner dans l'oisiveté une vieillesse insipide. Travailler, c'est vivre. «). Il faut ainsi attendre P. Lafargue qui réhabilitera le loisir oisiveté dans son Droit à la paresse (1882). On assiste aujourd'hui à une défense et à un développement du loisir ou plutôt des loisirs, lesquels englobent toutes les activités ou la non-activité du « temps libre «, c'est-à-dire du temps dégagé des activités professionnelles. Nous pouvons toutefois nous demander si ce « temps libre « est bien le temps de notre liberté.
Quand je travaille, je suis accablé de contraintes. Je ne jouis de ma liberté que pendant mon temps libre. Le temps libre est le temps durant lequel nous faisons ce que nous voulons. TOUTEFOIS, le temps libre, comme le travail comporte des moments de liberté et de créativité et des moments de contrainte et de servitude. Le travail, en nous libérant des contraintes matérielles, est aussi une activité libératrice.
INTRODUCTION
  • 1) Le temps libre comme une compensation du travail aliénant.
  • 2) Le temps libre des loisirs comme une autre aliénation
Conclusion

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« Le travail nous libère"Si l'on y regarde bien, c'est pour parvenir au repos que chacun travaille",fait observer Rousseau dans l'Essai sur l'origine des langues.

Sans travail, iln'y aurait pas de liberté: les chômeurs en font la cruelle expérience.

Letravail est donc en soi une manière de nous affranchir de la nécessité et descontraintes matérielles. Il n'y a pas de temps «libre»Certains auteurs radicaux, comme Herbert Marcuse, ont affirmé que le loisirconstituait une sorte de soupape de sécurité dans une société globalementaliénée par l'économie.

Je ne serais donc libre ni pendant le travail, nipendant mon temps libre, puisque dans les deux cas, je suis soumis auximpératifs et aux rythmes de l'économie. La société des loisirs Le XXe siècle a vu se développer les loisirs dont les enjeux portent à controverse. • Joffre Dumazedier, considère le loisir comme un temps de récupération dontle but est de reprendre assez de force, d'énergie pour retravailler.

Mais il voitégalement dans le loisir la base d'une société nouvelle, plus exigeante et non "moutonnante", et ce grâce à son caractère:– libératoire : le loisir résulte d'un libre choix ;– désintéressé : le loisir n'a de finalité ni lucrative, ni utilitaire, ni engagée ;– hédonistique : le loisir est la recherche d'un état de satisfaction ;– personnel: le loisir répond aux besoins de chaque individu. • H.

Marcuse, lui, dénonce l'imposture du loisir dans la société de consommation qui endort les tendancesrévolutionnaires des hommes et fait de chacun un être « unidimensionnel ».

Celui-ci n'a pas de faculté critique, ades besoins stéréotypés, est complice de l'ordre existant contre les seuls individus "critiques" de cette société : lesmarginaux (chômeurs, immigrés, etc.). • En s'inspirant à la fois de Marx et de Freud, Herbert Marcuse évoque, à propos de la société moderne, un «enrégimentement du temps libre » : le loisir ne doit plus être l'occasion d'un plaisir authentique satisfaisant lespulsions.

Dominée par ce qu'il nomme un « principe de rendement » qui cherche à étouffer le « principe de plaisir »dans l'individu, l'organisation de la société étend les exigences du temps de travail jusque sur le tempsthéoriquement libre.C'est d'abord, ce qui demeure assez classique, grâce à la lourdeur du travail aliéné que le loisir est ramené à n'êtrequ'un temps de récupération, aussi bien physique que mental, qui doit préparer la reprise du travail.

Ce qui confirmequ'à un travail abrutissant ne peut correspondre qu'un loisir lui-même de piètre qualité, et montre amplement queles deux moments ne sont pas aussi « opposés » qu'on veut encore parfois le croire. C'est ensuite en développant une véritable industrie des loisirs, grâce à laquelle l'individu ne doit pas être laissé àlui-même.

Cette « industrie » a pu faire ses preuves dans les régimes totalitaires, puisque les moments de repos yétaient aussi soigneusement organisés et encadrés que les moments de travail.

Mais, sans aller jusqu'à de tellesorganisations par l'État lui-même, ce serait, selon Marcuse, toute société régie par le principe de rendement qui enviendrait à rentabiliser les loisirs, non seulement en termes économiques, mais d'abord pour y confirmer la définitionde tout individu comme consommateur permanent parfaitement intégré dans le système global de la production, etdès lors capable d'oublier que ses véritables satisfactions seraient très différentes de celles qu'on lui « propose »ou qu'on lui impose.L'homme contemporain se voit ainsi offerte la possibilité, par exemple, « de récapituler toutes les figures de l'homme» (J.-M.

Domenach) – du sauvage préhistorique se nourrissant de son gibier grillé sur une pierre au sportif quis'imagine sur un stade de la Grèce antique, en passant par le solide cow-boy de l'Ouest américain ou par lechevalier médiéval en armure.

Tout serait à revivre potentiellement pendant les loisirs, de la découverte de terresétrangères grâce à un club de vacances installé en brousse à l'exploit physique grâce à un autre club d'alpinisme oude vol à voile.

Que revivre signifie en l'occurrence rejouer n'est pas alarmant en soi : le ludique et la fictionconfirment plutôt qu'on est bien dans le loisir. Plus gênant semble le fait que toutes ces activités impliquent, non seulement d'être organisées, mais surtout uncoût financier pour celui qui prétend en profiter.

Le temps de loisir est ainsi devenu, incontestablement, un tempsde consommation supplémentaire, laquelle peut être très supérieure à la consommation ordinaire (celle du temps detravail).

Ainsi les travailleurs (toutes catégories désormais confondues, ou presque) prennent l'habitude de faire deséconomies en prévision de leurs loisirs et de leurs vacances.

Mais l'on peut également emprunter pour ces dépensesde loisirs, même s'il faut ensuite travailler un peu plus que d'habitude pour rembourser.De l'idée classique selon laquelle le principal du temps humain était consacré à un travail que scandaient desmoments de loisir plus ou moins fructueux, on est ainsi passé à l'idée que les loisirs ont davantage de sens ou devaleur que le travail, mais en occultant le fait qu'ils ne sont accessibles qu'à la condition de travailler intensément,et que, dans l'organisation économique, ils sont un prétexte à une consommation frénétique.. »

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