Le souvenir est-il un simple retour du passé dans la conscience
Publié le 16/09/2014
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Dans la plupart des cas, se rappeler le passé consiste à le reconstruire : ce n'est pas le passé qui revient vers nous, c'est nous qui, avec notre savoir, le reconstituons comme un archéologue reconstitue une villa romaine à partir de quelques pans de mur ou comme le juge d'instruction, d'après les rapports de police et les dépositions des témoins, reconstitue les péripéties d'un crime. Me rappellerais-je le geste de l'envoi si je ne connaissais pas ce rite'?
Souvent aussi, il est vrai, le souvenir se présente comme de lui-même, sans aucun effort pour le restaurer. Mais dans la plupart de ces cas nous trouverons aisément le fait de conscience présent qui l'a évoqué parce qu'il y entrait comme partie constituante : le souci de mon avenir qui ne me quitte guère au cours de cette période d'examens suffirait à expliquer nombre de souvenirs se rapportant à des faits d'où dépend ma carrière, depuis ce match auquel j'ai sacrifié une soirée de travail jusqu'à cette réunion politique organisée par un parti dont la victoire constituerait pour moi le meilleur des atouts ou un dangereux handicap. Le passé, alors, ne revient pas; il se trouve intimement mêlé an présent.
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110 PSYCHOLOGIE
On ne peut donc pas hésiter sur ce point le souvenir n'est pas le
simple retour du passé dans la conscience .
..
* *
Est-ce même un véritable retour 1 J,'observation attentive du phénom~ne du rappel nous amènera à en douter et notre doute sera confirmé par les
présupposés métaphysiques d:une telle conception.
L'analyse de ces retours apparents du passé au milieu de notre présent nous découvrira qu'ils se réduisent à presque rien, si toutefois il en
reste quelqu'un.
Dans
la plupart des cas, se rappeler le passé consiste à le reconstruire :
ce n'est pas le passé qui revient vers nous, c'est nous qui, avec notre
savoir, le reconstituons comme un archéologue reconstitue une villa ro
maine à partir de quelques pans de mur ou comme le juge d'instruction,
d'après les rapports de police et les dépositions des témoins, reconstitue
les péripéties d'un crime.
Me rappellerais-je le geste de l'envoi si je ne
connaissais pas ce rite· P Souvent aussi, il est vrai, le souvenir se présente comme de lui-même,
sans aucun effort pour le restaurer.
Mais dans la plupart de ces cas nous
trouverons aisément le fait de conscience pré5ent qui l'a évoqué parce qu'il y entrait comme partie constituante : le souci de mon avenir qui ne me
quitte guère au cours de cette période d'examens.
suffirait à expliquer
nombre de souvenirs se rapportant à des faits d'où dépend ma carrière,
depuis ce match auquel j'ai sacrifié une soirée de travail jusqn'à cette
réunion politique organisée par un parti dont la victoire constituerait pour
moi le meilleur des atouts ou un dangereux handicap.
Le passé, alors, ne revient pas; il se trouve intimement mêlé au présent.
Il arrive aussi, il faut le reconnaître, qu'un élément du passé se pré
sente de lui-même, sans aucune attache consciente avec le présent : ainsi,
je revois ou du
mofos je me rappelle un habitant de Delhi rencontré il y a plus d'un an quai des Orfèvres qui me demanda la direction de ~otre-Dame et auquel, à ma connaissance, je n'avais jamais pensé depuis, · Des cas de ce genre, comme chacun peut en observer dans sa vie, ne
constituent-ils pas un retour du passé ? Nous devons encore répondre
par la négative.
Ces évocations peuvent s'expliquer par des associations
inconscientes.
Ser.aient-elles automatiques, elles ne constitueraient pas un retour du passé : regardons bien et nous observerons que c'est nous qui
nous transportons vers le passé, ce n'est pas le pa·ssé qui vient vers nous.
Souvent, sans doute, je pense au passé sans sortir du présent; mais dans ce cas, il y a prise de conscience d'un savoir se rapportant au passé,
et non souvenir véritable; le souvenir authentique nous transporte dans
le passé; il n'est donc pas un retour du passé, même dans les cas où il nous donne l'illusion de s'v réduire.
[a 1·éflexion philosophique ·confirmera cette conclusion.
D'où, en effet, pourrait revenir ce pnssé ? Du passé lui-même ou de la conscience qui
en conserverait un mystérieux substitut.
La première hypothèse sera fa'cile à écarter : étant donné que le passé n'est plus, ce n'est pas lui qui peut revenir vers nous.
La seconde
paraît plus plausible : elle est communément admise non
seulement par le ·sens commun, mais encore par la psychologie clas~ique.
ta question controversée est seulement de savoir sous quelle forme est.
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