Devoir de Philosophie

Le propre d'une oeuvre d'art est-il d'émettre un message ?

Publié le 27/02/2008

Extrait du document

La notion d'oeuvre d'art fait référence à des réalités très diverses : une peinture, une sculpture, une mélodie, une pièce de théâtre, un poème, un roman, une danse, une maison d'architecte etc. Le point commun de toutes ces oeuvres semble être d'être belles : l'oeuvre d'art est en effet souvent associé au concept du beau. Pourtant, face à une oeuvre d'art, nous ne nous contentons pas de la trouver belle : elle provoque en nous un grand nombre d'émotions et semble en quelque sorte nous parler. Cela est encore plus vrai avec les oeuvres figuratives ou narratives : un tableau ne se contente pas d'être un ensemble de belles forme et de belles couleurs, un poème n'est pas uniquement une suite de sonorités : tous deux semblent nous raconter une histoire, être porteurs d'un message. Et même devant un tableau abstrait ou une pièce de théâtre contemporaine, le spectateur est souvent interloqué car il ne comprend pas « ce que ça signifie » ou « ce que voulait dire l'artiste ». Autrement dit, il semble que bien souvent nous attendons d'une oeuvre d'art qu'elle émette un message. Pourtant, on voit mal quel serait la spécificité de l'art dans ce cas : si le seul but d'un poème d'amour est de faire une déclaration d'amour, pourquoi ne pas tout simplement faire une déclaration d'amour ? Pourquoi faire un poème alors même que cela représente plus de travail non seulement pour l'artiste, mais aussi pour le destinataire ? L'oeuvre d'art semble à la fois émettre un message, et en même, elle ne semble pas être le moyen le plus simple d'exprimer clairement ce message, puisqu'elle le rend bien souvent mystérieux : les multiples interprétations d'une même oeuvre manifestent bien cette difficulté. Le propre d'une oeuvre d'art est-il d'émettre un message, alors même qu'elle semble plutôt le brouiller que le clarifier ?

« C.

Tout le problème est de savoir s'il est possible de soutenir que l'œuvre d'art a une utilité, ce qui serait le cas si elle devait servir à émettre un message.

Or, Kant, dans la Critique de la faculté de juger définit l'œuvre d'art comme une finalité sans fin : le beau n'est pas l'utile, il n'a donc pas de fin extérieure.

Il anéanmoins une fin interne, qui est l'harmonie.

De plus, il n'existe justement pas de règle (ce qui seraitpourtant nécessaire si l'on voulait faire de l'art un langage).

Comme il n'existe aucun concept décrivant unobjet beau, il n'est pas possible d'élaborer de science du beau.

Dès lors, ce qui entre en jeu dans laproduction artistique est un don de la nature que Kant appelle le génie .

L'art consiste à produire par le génie un objet dont la forme produise chez le sujet un sentiment de plaisir: face à un objet d'art, nous devonsprendre conscience qu'il s'agit d'un tel objet, et non d'un objet de la nature.

Mais cette œuvre d'art, il estimpossible de la soumettre à une quelconque fin : si l'artiste voulait simplement dire qu'il aime sa bien-aimé, ille lui dirait, il n'aurait pas besoin d'écrire un poème, même l'artiste engagé demeure un artiste avant tout : s'ilvoulait seulement critiquer la guerre, c'est un essai qu'il écrirait, il n'aurait pas besoin de peindre.

Il sembledonc que la création artistique ne peut être réduite à un simple « vouloir dire » de la part de l'artiste. III. Le problème du fond et de la forme A.

Tout le problème consiste à savoir si l'artiste considère le sujet qu'il peint ou le thème du poème comme simple prétexte à création, auquel cas la forme prendrait le dessus sur le fond, ou si au contrairece que l'artiste cherche à exprimer tient une place essentielle, auquel cas c'est le fond qui prendrait lepas sur la forme.

En effet, bien que nous ayons dit que l'œuvre d'art n'était inféodée à aucune finalité, lefait même que certains artistes aient des thèmes de prédilection montre que ce qui est dit, ce qui estpeint, ce qui est chanté est tout de même important : si Rembrandt privilégie tant les clairs-obscurs, siAragon écrit tant de poème sur Elsa, n'est-ce pas que l'un a quelque chose à dire sur la lumière, l'autresur Elsa ? Le fait même qu'un thème inspire plus que d'autres ne manifeste-t-il pas l'importance du fond ? B.

Valery, dans Propos sur la poésie expose sa théorie de la poésie, que l'on peut résumer par l'expression « pendule poétique ».

Effet, la poésie, parce qu'elle utilise le langage est certainement le type d'art oùl'on peut être le plus tenté de voir l'émission d'un message.

Valéry part du constat qu'il n'y a pas derapport entre le sens (qui serait assimilable au fond) et le son (la forme) d'un mot : « la même choses'appelle HORSE en anglais, IPPOS en grec, EQUUS en latin, et cheval en français; mais aucune opérationsur aucun de ces termes ne me donnera l'idée de l'animal en question ».

mais le travail du poète consistejustement établir ce rapport : « Et cependant c'est l'affaire du poète de nous donner la sensation del'union intime entre la parole et l'esprit », écrit-il.

Le pendule poétique est le balancement entre deuxpôles, celui du son et celui du sens (de la forme et du fond) : le langage poétique est donc double :comme le langage ordinaire, il utilise des mots qui véhiculent un message, un sens, mais contrairement aulangage ordinaire, il choisit les mots non seulement pour leur sens, mais aussi pour l'impression qu'ilsproduisent par leur seules sonorités.

Autrement dit, un autre effet est produit par la simple musicalité desvocables.

Si la poésie ne tenait compte que du son des mots, elle ne serait plus poésie, elle serait simplelangage, mais si la poésie ne tenait pas compte du sens, elle ne serait plus qu'une musique et pourraitêtre appréciée sans même que l'on ait besoin de comprendre la langue dans laquelle elle est écrite.

Lepropre d'une œuvre d'art est donc d'exprimer quelque chose en accordant autant d'importance à ce quiest exprimé qu'à la façon de l'exprimer, et le va-et-vient entre les deux est ce qui définit l'art. ConclusionLe propre d'une œuvre d'art est-il d'émettre un message ? Si tel était le cas, elle serait un moyen de communicationcomme un autre et n'aurait justement plus rien de spécifique.

Pourtant, on ne peut nier que le spectateur, à traversles sensations qu'il éprouve, à bel et bien l'impression que quelque chose lui est communiqué, qu'il est devantquelque chose qui fait sens.

Mais ce sens n'est pas assimilable à une simple information, puisque le travail del'artiste n'est pas seulement un simple travail de retranscription exacte d'une signification donnée : il y a donccréation, et non simple émission.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles