Le pouvoir politique est-il le dépassement de la violence ou son instrument ?
Publié le 02/07/2009
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La violence est un usage de la force, d’une puissance contre un objet ou un individu. Elle est essentiellement destructrice mais peut servir au maintien de l’ordre et de la sécurité : son statut est ambiguë. La politique est l’art de gouverner les hommes au sein des cités, elle cherche à produire un ensemble cohérent et obéissant aux mêmes règles et aux mêmes lois. En ce sens, il semble que la violence et le pouvoir politique soient incompatibles. Bien plus, le pouvoir politique, notamment à la travers l’institution que représente l’Etat, peut se comprendre comme un dépassement de la violence. Pourtant, la violence existe toujours dans l’Etat et par l’Etat. L’Etat peut être violent, comme par exemple une tyrannie. Dans ce cas, le pouvoir politique ne serait plus le dépassement de la violence mais son instrument, transformé dans l’état civil. Dès lors faut-il comprendre la genèse du pouvoir politique et saisir le lien qu’il entretient avec la violence. Telle est la tâche que nous nous proposons.
Si le pouvoir politique peut être le dépassement de la violence (1ère partie), il n’en reste pas moins qu’il peut faire usage de la violence (2nd partie), développant une dialectique de la violence et du politique tout en reconsidérant positivement la violence (3ème).
«
aussi violent, et être un instrument de celle-ci.
II – L'instrumentalisation du pouvoir politique comme lutte a) Marx dans le Capital critique l'Etat.
L'état est un machine étatique essentiellement un appareil répressive, une force d'exécution et d'intervention produite par la société à un moment historique bien précis : quand lescontradictions de classes semblent insurmontables, alors s'impose un instrument qui gère le social et, en mêmetemps, estompe, apparemment, les contradictions.
Le pouvoir étatique n'a donc pas de réalité autonome etspécifique : c'est une « superstructure » qui exprime et dissimule en même temps les intérêts de classes dirigeantes.L'Etat est né avec la division de la société en groupes antagonistes.
Il continue à manifester cette oppositionéconomique et sociale.
Il est au cœur de la lutte des classes et opprime la classe qui n'est pas au pouvoir.
Il est unmasque de la violence.b) Or c'est bien cette idée de masque que l'on retrouve chez Pascal dans les Pensées selon, qui la violence ou la force est à l'origine de l'ensemble du politique si par politique nous entendons l'art de gouverner les hommes au seind'une cité.
Même la justice n'a pour origine que la force dans la mesure où seul ce qui a de pas puissance et de laforce donc peut contraindre et user de la violence peut arriver à conduire les hommes.
La soumission à l'ordre est àl'origine de l'ordre politique.
Les pactes ne sont que des fictions théoriques masquant une réalité moins agréable etenviable.
Nous ne respectons les décisions du politique que dans la mesure où il sait se faire respecter.
Une loi àlaquelle nous ne sommes pas ou plus obligés de respecter n'est plus une loi et n'a aucune valeur.
Toutes lesinstitutions juridiques et politiques relèvent donc des « grandeurs d'établissement » qui ne sauraient être justifiéespar quelque acte juridique que ce soit.
Le pouvoir politique n'a, de ce point de vue, aucun fondement supérieur à lafacticité de son établissement : la relativité historique et géographique des systèmes judiciaires suffit à annulertoute entreprise de rationalisation du droit.
Mais le fait constitue par lui-même un droit, à condition qu'on en oubliel'origine : « La chose était indifférente avant l'établissement ; après l'établissement, elle devient juste, parce qu'ilest injuste de la troubler ».
Ainsi Pascal note : « Ne pouvant faire qu'il soit force d'obéir à la justice, on a fait qu'ilsoit juste d'obéir à la force ; ne pouvant fortifier la justice, on a justifié la force, afin que la justice et force fussentensemble, et que la paix fût, qui est le souverain bien ».
La force s'est donc muée en droit par l'effet de la coutumeet notamment de l'imagination.c) Ainsi, selon Machiavel dans le Prince : « Les prophètes armés triomphent, et les désarmés s'effondrent.
» L'usage de la force et de la violence est donc nécessaire.
L'essentiel de la politique est pour le Prince de semaintenir au pouvoir quoiqu'il se passe.
Deux solutions pour gouverner et conserver : il faut prendre physiquementpossession du pays, c'est à dire l'habiter, soit lui-même, ce qui engendre amour et crainte de la part de lapopulation locale, soit par l'intermédiaire des colonies.
Il est intéressant de voir que Machiavel joint toujoursensemble amour et crainte, c'est qu'il semble que pour lui, l'un ou l'autre importe peu, car ce ne sont que deuxmoyens efficaces de contrôler l'Etat.
Le Prince ne cherche à être aimé que pour contrôler, non pour lui-même.Machiavel met en valeur l'avantage des colonies, cet avantage est avant tout pécuniaire : « On lèse seulementceux à qui on enlève leurs terres et leurs maisons pour les donner aux nouveaux habitants, c'est à dire une partieminime de la province.
Et ceux qu'on lèse demeurant si dispersés et pauvres, ils ne peuvent jamais nuire ».
De mêmeque le prince doit engendrer amour ou crainte, il doit ou cajoler ou détruire pour garder le pouvoir, mais ne doitjamais offenser, celui qu'il offense ne doit pas être en état de lui nuire, d'où : le détruire.
Bien plus, il précise dans lePrince que ces hommes parviennent cependant à conserver leur Etat s'ils savent faire bon usage de la cruauté : « cela vient du bon ou mauvais usage des cruautés », la bonne cruauté étant celle qui n'a lieu que trèsponctuellement pour la nécessité de la sûreté et qui s'apaise ensuite.
Tout Prince en accédant au pouvoir doitnécessairement faire des vexations.
Il lui faut alors les faire toutes d'un coup car il ne faut pas renouveler laviolence.
« Les violences se doivent faire toutes ensemble afin que, le goût en persistant moins longtemps, ellesoffensent moins ; les bienfaits se doivent faire peu à peu, afin qu'on les savoure mieux.
» Tout prince désire être àla fois aimer et craint, mais il est difficile d'être les deux et « il est beaucoup plus sûr d'être craint que d'être aimé.[…] car l'amour est maintenu par un lien d'obligation qui, parce que les hommes sont méchants, est rompu par touteoccasion de profit particulier ; mais la crainte est maintenue par une peur du châtiment qui ne t'abandonne jamais.
»Cependant le prince doit éviter absolument la haine, et l'on peut tout à fait être craint mais non haï.
Pour cela il fauttoujours éviter d'usurper le bien de ses sujets.
Il faut surtout être cruel avec les soldats en temps de guerre.
Unprince sage doit « s'ingénier à éviter la haine ».d) Si le pouvoir politique peut être un instrument de la violence c'est bien parce que certaines lois apparaissent injustes ou non justifiée ; ou encore posent un problème moral et dans ce cas, il paraît possible voire légitime de nepas les suivre de ne pas leur obéir ; et ainsi de faire un acte civique.
Si une telle possibilité de désobéir n'existaitpas alors le législateur aurait tout pouvoir pour établir des lois et l'avis de la communauté n'aurait plus alors grandeimportance dans la mesure où il elle n'aurait aucun moyen de faire remarquer son désaccord.
Cela a notamment étéle cas de Thoreau n'ayant pas voulu payé l'impôt qui devait servir à la guerre au Mexique pour le maintien del'esclavage.
Si l'on prend cet exemple, c'est que Thoreau est l'un des principaux théoriciens de la désobéissance civile.
En effet, comme il le théorise dans la Désobéissance civile , il est parfois de son devoir ne pas obéir à une loi, au risque sinon « de devenir un agent de l'injustice exercée à l'égard d'autrui.
» Il s'agit explicitement d'un problèmede conscience morale et c'est en ce sens qu'« il faut violer la loi » ; violer la loi pour être libre et ne pas être un serfde l'Etat ; esclave de l'Etat d'autant plus servile qu'il le serait volontairement par son choix de ne pas protester.
Transition : Ainsi le pouvoir politique est lui-même violent, il peut être un instrument de la violence dans la main de certains.Cependant, comment comprendre alors le double statut que le pouvoir politique entretient avec la violence, à la fois.
»
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