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Le lien économique est-il le fondement du lien social ?

Publié le 26/05/2009

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             Le lien social est ce qui semble pouvoir définir une communauté politique. C’est le tissu ou le réseau qui explique que les hommes s’entre-aident entre eux et communiquent au-delà de leurs besoins. Le lien social est encore ce qui permet à l’homme de pouvoir se situer et s’individualiser au sein de la société. En ce sens, il semble que les liens sociaux dépassent largement les liens économiques comme on pourrait le voir dans le cas de l’amitié. Dès lors parler de lien social comme un lien économique se serait réduire de lien social à une question de profits ou d’avantages. L’expression d’insociable sociabilité prendrait alors tout son sens. Les hommes ne se regrouperaient que pour satisfaire des besoins. On verrait poindre alors des comportements égoïstes, l’essentiel étant de tirer bénéfices d’un rapport entre deux personnes. Cependant, si ce lien économique peut expliquer un ensemble d’échange peut-on dire qu’il est le fondement en tant qu’essence du lien social ? Ne serait-ce pas réduire le social à l’économique, c’est-à-dire exclure l’humain de l’expression « capital humain «. Il s’agit donc d’une approche définitionnelle du « lien social «.

            Si le lien économique peut être une cause de l’union des hommes (1ère partie), il semble pourtant impossible de réduire le lien social à l’économie (2nd partie) au risque sinon de mécomprendre l’humain (3ème). 

« social nous rend compte de l'impossibilité d'une réduction de l'intérêt économique au social.

Le seul lien économiquesemble impossible de rendre compte de l'interaction entre les personnes comme il le note au livre I, chapitre 7 : « si l'intérêt rapproche les hommes, ce n'est jamais que pour quelques instants ; il ne peut créer entre eux qu'un lienextérieur.

Dans le fait de l'échange, les divers agents restent en dehors les uns des autres, et l'opération terminée,chacun se retrouve et se reprend tout entier.

Les consciences ne sont que superficiellement en contact ; ni elles nese pénètrent, ni elles n'adhèrent fortement les unes aux autres.

Si même on regarde au fond des choses, on verraque toute harmonie d'intérêts recèle un conflit latent ou simplement ajourné.

Car, là où l'intérêt règne seul, commerien ne vient refréner les égoïsmes en présence, chaque moi se trouve vis-à-vis de l'autre sur le pied de guerre ettoute trêve à cet éternel antagonisme ne saurait être de longue durée.

L'intérêt est, en effet, ce qu'il y a de moinsconstant au monde.

Aujourd'hui, il m'est utile de m'unir à vous ; demain, la même raison fera de moi votre ennemi.Une telle cause ne peut donc donner naissance qu'à des rapprochements passagers et à des associations d'unjour ».b) Bien plus, comme Spinoza le mettait déjà en lumière dans le Traité théologico-politique , ch.

V : « La société n'est pas seulement utile aux hommes pour la sécurité de la vie ; elle a pour eux beaucoup d'autres avantages, elleleur est nécessaire à beaucoup d'autres titres.

Car si les hommes ne se prêtaient mutuellement secours, l'art et letemps leur manqueraient à la fois pour sustenter et conserver leur existence.

Tous, en effet, ne sont pas égalementpropres à toutes choses, et aucun homme n'est capable de suffire à tous les besoins auxquels un seul homme estasservi.

La force et le temps manqueraient donc, je le répète, à chaque individu, s'il était seul pour labourer la terre,pour semer le blé, le moissonner, le moudre, le cuire, pour tisser son vêtement, fabriquer sa chaussure, sans parlerd'une foule d'arts et de sciences essentiellement nécessaires à la perfection et au bonheur de la nature humaine ».La division du travail est essentiel afin de maximiser sa propre production.

Mais s'il ne s'agissant que de cela alors lelien économique serait alors encore premier.

L'assistance des hommes entre eux a pour but la maximisation dubonheur de tous et de l'individu même.

Le lien économique n'est alors que secondaire et ne rend compteessentiellement que d'un étalon de mesure entre mes différentes activité suivant une justice distributive.c) Si les hommes fondaient leurs liens sociaux sur les intérêts économiques alors l'état de barbarie serait le plus simple en tant qu'il est la spoliation du travail d'autrui.

La propriété suppose la loi et la définition d'un état social quifasse état de la liberté plutôt que de l'économie sans rendre nécessairement incompatible ces derniers.

AinsiSpinoza dans le Traité Théologico-politique écrit : « Aussi voyons-nous les hommes qui vivent dans la barbarie traîner une existence misérable et presque brutale ; et encore, le peu de ressources dont ils disposent, si grossièresqu'elles soient, ils ne les auraient pas s'ils ne se prêtaient pas mutuellement le secours de leur industrie.

Maintenantil est clair que si les hommes avaient été ainsi organisés par la nature que leurs désirs fussent toujours réglés par laraison, la société n'aurait pas besoin de lois ; il suffirait d'enseigner aux hommes les vrais préceptes de la moralepour qu'ils fissent spontanément, sans contrainte et sans effort, tout ce qu'il serait véritablement utile de faire.

Maisla nature humaine n'est pas ainsi constituée ».

Transition : Ainsi le lien social ne peut pas se réduire au lien économique au risque sinon de mécomprendre l'intérêt et l'enjeu dela vie en société.

Bien plus, il semble alors que le lien social doive se chercher au-delà de l'économie.

III – Le social au-delà de l'économie a) En effet comme le met en exergue Claude Lévi-Strauss dans les Structures élémentaires de la parenté , chapitre V avec le cas de l'échange du vin à une table de convive.

Si l'échange était simplement un intérêt nousn'échangerions que très peu ou de façon limitée.

Ce cas anodin de l'échange du vin et du partage rend bien compteque les liens sociaux ne sont pas fondés sur un égoïsme premier donc sur un lien économique de premier ordre.L'échange est gracieux et concerne la communauté dans son ensemble : « Le rituel des échanges n'est passeulement présent sans les repas de cérémonies […].

Dans les petits établissements où le vin est compris dans leprix du repas, chaque convive trouve, devant son assiette, une modeste bouteille d'un liquide le plus souventindigne.

Cette bouteille est semblable à celle de son voisin, comme le sont les portions de viande et de légumesqu'une servante distribue à la ronde.

Et cependant, une singulière différence d'attitude se manifeste aussitôt àl'égard de l'aliment liquide et de l'aliment solide : celui-ci représente les servitudes du corps et celui-là son luxe, l'insert d'abord à nourrir, l'autre à honorer.

Chaque convive mange, si l'on peut dire, pour soi ; et la remarque d'undommage minime, dans la façon dont il a été servi, soulève l'amertume à l'endroit des plus favorisés, et une plaintejalouse au patron.

Mais il en est tout autrement pour le vin : qu'une bouteille soit insuffisamment remplie, sonpossesseur en appellera à la revendication d'une victime individuelle, mais à un remontrance communautaire : c'esten effet, le vin, à la différence du « plat du jour », bien personnel, est un bien social.

La petite bouteille peutcontenir juste un verre, ce contenu sera versé, non dans le verre du détenteur, mais dans celui du voisin.

Et celui-ci accomplira aussitôt un geste correspondant de réciprocité.

Que s'est-il passé ? Les deux bouteilles sontidentiques, en volume, leur contenu semblable en quantité.

Chacun des participants de cette scène révélatrice n'a,en fin de compte, rien reçu de plus que s'il avait consommé sa part personnelle.

D'un point de vue économique,personne n'a gagné et personne n'a perdu.

Mais c'est qu'il y a bien plus, dans l'échange, que les choseséchangées.

»b) Bien plus comme le remarque Simmel dans sa Philosophie de l'argent , les liens sociaux sont la plupart du temps dénués de toute revendication économique.

L'échange n'est pas toujours synonyme d'échange équivalent.

Les lienssociaux sont diverses et l'on ne saurait les réduire à la simple sphère économique : « La plupart des rapports entre les hommes peuvent être rangés dans la catégories des échanges : il représente l'interaction à la fois la plus pure etla plus intense, constitutive de la vie humaine en quête de matière et de contenu.

D'une part on ignore souvent àquel point ce qui, à première vue, apparaît comme action unilatérale inclut en réalité une interaction : l'orateur face. »

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