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Le langage ne sert-il qu'à exprimer la pensée ou intervient-il déjà dans sa formation

Publié le 19/03/2004

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Par quels ,moyens ? D'abord par le langage d'action constitué par le retentissement corporel des sentiments éprouvés. Ensuite verbalement, au moyen de mots, mais pensés plutôt que prononcés, et en tout cas sans l'organisation grammaticale qui en ferait des jugements : exclamations admiratives ou interrogatives, qualificatifs qui se proposent à une affirmation possible... Expressions bien déficientes, mais qui n'en constituent pas moins une première ouverture sur le mystère du « jardin secret ». L'expression atteint sa forme achevée lorsque les mots s'organisent en des propositions qui formulent des jugements et expriment des pensées : pensées sur les choses (la pluie qui tombe, le temps qui passe), sur les hommes (le caractère de mon visiteur) , sur moi-même (mes états d'âme, mes sensations organiques...) . Alors, grâce au langage, le vécu se transforme en connu, le senti en pensée. Mais nous n'avons là que la pensée au sens subjectif du mot, c'est-à-dire conçue comme désignant une modalité particulière de l'activité psychique. Or il est une autre acception au oins aussi courante : au sens objectif, on entend par pensée ce même que l'on pense, en particulier une de ces vues générales comme celles qui figurent dans les recueils de « Pensées ». Lorsqu'on dit que le langage sert à exprimer la pensée, c'est principalement de cette sorte de pensées qu'il est question.
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« II.

— LE LANGAGE, MOYEN DE FORMATION DE LA PENSÉE Nous avons déjà répondu virtuellement à cette question en observant que le contenu primitif de notreconscience se réduit à des impressions qui nécessitent l'expression verbale pour accéder au niveau de lapensée.Ainsi c'est le langage qui en fait une pensée.

Il joue un rôle si important dans la formation de celle-ci que desêtres dépourvus de cette faculté seraient, semble-t-il, incapables d'avoir jamais une pensée véritable.

Sansdoute, la pensée conditionne la constitution de langage.

Mais, réciproquement, le langage conditionne laformation de la pensée.

Suivant l'excellente formule d'Henri Delacroix : « La pensée fait le langage et se faisantpar le langage ».Observons-nous en train de rédiger une dissertation ou même certaines de nos lettres : tant que nous n'avonspas arrêté les mots propre à exprimer exactement ce que nous voulons dire, notre pensée reste imprécise oumême incertaine : c'est au cours de la recherche de l'expression adéquate que la pensée s'élabore, et elle nese fixe que dans le texte qui l'exprime.D'ailleurs, ne l'oublions pas, ce que nous appelons « nos pensées » ne sont que très partiellement le fruit denotre élaboration personnelle.

La grande masse de ce que nous pensons est constituée par ce que nous avonsappris au cours de notre éducation et de nos études.

Ici encore, inutile de le souligner, le langage — celui denos éducateurs, de nos maîtres, des livres — a été l'instrument nécessaire de l'acquisition des pensées qui fontla culture.Pour un homme cultivé enfin, la réflexion sur le langage, où sont accumulés tant de résidus de la pensée dont ilfut l'instrument, fait surgir une foule de pensées des plus éclairantes : celles que nous vaut une étudeapprofondie des faits ou des idées le sont d'ordinaire beaucoup moins. Conclusion. — De la réponse faite à la question posée il résulte qu'il n'y a pas dans l'activité mentale deux opérations distinctes : d'abord la pensée pure et en quelque sorte nue ; puis l'expression qui lui procurerait levêtement grâce auquel elle pourrait être vue du dehors.

La pensée qui se fait est contemporaine del'expression qui se cherche ; lorsqu'elle est faite, elle se confond avec le langage qui l'exprime.

« Ainsi.

note M.Merleau-Ponty, la parole, chez celui qui parle, ne traduit pas une pensée déjà faite, mais l'accomplit.

» Et unpeu plus loin (p.

209) : « L'orateur ne pense pas avant de parler, ni même pendant qu'il parle ; sa parole est sapensée.

» SUPPLEMENT: « C'est dans le mot que nous pensons.

Nous n'avons conscience de nos pensées, nous n'avons de penséesdéterminées et réelles que lorsque nous leur donnons la forme objective, que nous les différencions de notreintériorité […].

C'est le son articulé, le mot, qui seul nous offre une existence où l'externe et l'interne sontintimement unis.

Par conséquent, vouloir penser sans les mots est une tentative insensée.

On croitordinairement, il est vrai, que ce qu'il y a de plus haut, c'est l'ineffable.

Mais c'est là une opinion superficielle etsans fondement ; car en réalité, l'ineffable, c'est la pensée obscure, la pensée à l'état de fermentation, et qui nedevient claire que lorsqu'elle trouve le mot.

Ainsi le mot donne à la pensée son existence la plus haute et plusvraie.

» Hegel, in « Philosophie de l'esprit ».. »

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