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LE LANGAGE - Bergson, L’évolution créatrice

Publié le 21/01/2020

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langage
Vous dégagerez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée.
Si [...] les fourmis, par exemple, ont un langage, les signes qui composent ce langage doivent être en nombre bien déterminé, et chacun d’eux rester invariablement attaché, une fois l’espèce constituée, à un certain objet ou à une certaine opération. Le signe est adhérent à la chose signifiée. Au contraire, dans une société humaine, la fabrication et l’action sont de forme variable, et, de plus, chaque individu doit apprendre son rôle, n’y étant pas prédestiné par sa structure. Il faut donc un langage qui permette, à tout instant, de passer de ce qu’on sait à ce qu’on ignore. Il faut un langage dont les signes — qui ne peuvent pas être en nombre infini — soient extensibles à une infinité de choses. Cette tendance du signe à se transporter d’un objet à un autre est caractéristique du langage humain. On l’observe chez le petit enfant, du jour où il commence à parler. Tout de suite, et naturellement, il étend le sens des mots qu’il apprend, profitant du rapprochement le plus accidentel ou de la plus lointaine analogie pour détacher et transporter ailleurs le signe qu’on avait attaché devant lui à un objet. « N’importe quoi peut désigner n’importe quoi », tel est le principe latent du langage enfantin. On a eu tort de confondre cette tendance avec la faculté de généraliser. Les animaux eux-mêmes généralisent, et d’ailleurs un signe, fût-il instinctif, représente toujours, plus ou moins, un genre. Ce qui caractérise les signes du langage humain, ce n’est pas tant leur généralité que leur mobilité. Le signe instinctif est un signe adhérent, /e signe intelligent est un signe mobile.
Bergson, L’évolution créatrice, PUF, p. 158-159.
[II. La particularisation dans le langage humain]
Dans une société humaine, il n’y a pas d’automatisme dans les comportements. On constate au contraire, en premier lieu, une extrême diversité dans les réponses apportées aux situations, et en second lieu, que chaque individu, qui n’est pas biologiquement déterminé pour une fonction précise, doit apprendre aussi bien son rôle social, ce qu’il a à faire, que les données de toute expérience nouvelle pouvant se présenter à lui.
Dans ces conditions, les signes sont nécessairement mobiles. En effet, ils ne peuvent être en nombre infini pour désigner une infinité d’objets et de situations (le langage serait alors impossible à mémoriser). Il faut donc qu’un nombre limité de

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« CORRIGÉ 15 - On s'attachera à bien repérer les conditions d'utilisation des signes, qui déterminent leurs qualités.

• Pièges à éviter - Ne pas réciter un cours sur le langage en général, ou sur les diffé­ rences admises entre communication animale et langage humain.

- Ne pas essayer de rattacher à tout prix cet extrait à ce que vous pou­ vez connaître des thèses de Bergson sur l'instinct et l'intelligence.

CORRIGÉ [Introduction] La comparaison entre langage humain et langage animal apparaît chez de nombreux auteurs.

Bergson développe ici une approche originale en l'effectuant par considération, non du langage en général ou de ses rela­ tions avec la pensée (comme le faisait par exemple Descartes) mais, plus « modestement», en considérant la nature des signes qui peuvent, de part et d'autre, constituer des langages.

[I.

Le langage animal est celui d'une espèce] L'hypothèse de départ est simple: admettons qu'une espèce animale - par exemple les fourmis (puisqu'elles fascinent toujours par la complexité de leur organisation, en particulier « sociale ») - a un langage, sans entrer dans le débat sur les rapports entre langage et pensée, et cernons les caractères que doivent y présenter les signes utilisés en fonction de ce que nous savons de l'espèce.

Il apparaît, «une fois l'espèce constituée», c'est-à-dire une fois qu'elle est biologiquement définie comme un ensemble d'organismes compa­ rables, que : - le nombre des signes doit être déterminé une fois pour toutes ; - chaque signe doit rester attaché à un seul objet ou une seule opéra- tion : la monosémie est obligatoire.

Bergson ne justifie pas directement le premier point, mais on comprend aisément que la limitation quantitative des signes est due à leur origine instinctive : une espèce animale ne peut inventer des comportements nou­ veaux, pas davantage des signes.

Ces derniers sont imposés par l'hérédité à chacun de ses membres, qui sont incapables de les modifier.

C'est aussi en raison de cette incapacité à inventer - c'est-à-dire à faire varier les réactions - que la monosémie est néc~ssaire : un signe ne peut glisser 81. »

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