Le désir est-il une misère pour l'homme ?
Publié le 27/02/2008
Extrait du document
«
Le désir, selon Locke, est d'abord inquiétude ressentie à l'égard d'une chose « qui si elle était présente nouscauserait du plaisir ».
Le désir se distingue de l'aversion et en cela, il n'est pas simple réceptivité du manque, purepassivité : l'inquiétude nous met en mouvement, nous fait tendre vers cet objet qui nous manque.
On quitte alors le plan statique du simple constat de l'absence pour passer au plan dynamique de l'attraction (et en ce qui concerne lapeine) de la répulsion.
b) Le désir est un mixte
Dès lors, on voit la nature double du désir : ni pur pauvreté (misère) ni exclusive abondance (grandeur) : le désir està la charnière du vide et de la plénitude comme le fait remarquer Platon dans le Banquet .
Eros, représentation du désir, est fils de Poros et Pénia, de l'ingéniosité et de la pauvreté.
Insatisfait par essence (le désir est privation maisaussi inquiétude - aporia), il dispose cependant des ressources faisant défaut à sa mère et lui venant de son père(expédient) dont la mère est Mêtis, l'intelligence.
Ainsi comme l'écrit Léon Robin : « Cette naissance explique les caractères de sa nature : toujours déçu et mourant, il est cependant toujours plein de courage et de vie, jusqu'àse flatter d'être même éternel ; pauvre en satisfactions complètes et durables, il est riche d'aspiration ; niabsolument ignorant, ni absolument savant […] il est en revanche curieux et vraiment philosophe ».
(Platon, ch. III, II, quadrige puf, p.55).
Ainsi, si le désir nous porte à entreprendre et surtout à éprouver le besoin de connaître,comment pourrait-il être une misère ?
« Étant fils de Poros et de Pénia , l'Amour en a reçu certains caractères enpartage.
D'abord il est toujours pauvre, et loin d'être délicat et beau comme onse l'imagine généralement, il est dur, sec, sans souliers, sans domicile, sansavoir jamais d'autre lit que la terre, sans couverture, il dort en plein air, près desportes et dans les rues ; il tient de sa mère, et l'indigence est son éternellecompagne.
D'un autre côté, suivant le naturel de son père, il est toujours à lapiste de ce qui est beau et bon ; il est brave, résolu, ardent, excellent chasseur,artisan de ruses toujours nouvelles, amateur de science, plein de ressources,passant sa vie à philosopher, habile sorcier, magicien et sophiste.
Il n'est parnature ni immortel, ni mortel ; mais dans la même journée, tantôt il est florissantet plein de vie, tant qu'il est dans l'abondance; tantôt il meurt, puis renaît, grâceau naturel qu'il tient de son père.
Ce qu'il acquiert lui échappe sans cesse, desorte qu'il n'est jamais ni dans l'indigence, ni dans l'opulence.
» PLATON.
[Introduction]
Loin de toute froide analyse du concept d'amour, Platon brosse dans ce texte un portrait vivant d'Éros, de l'Amourpersonnifié.
En le dépeignant comme le fils de la Pauvreté et de l'Expédient, il nous place au coeur même de l'amour,comme sentiment unissant des contraires.
L'amour n'a pas en effet de caractère un : sa nature semble insaisissable,incompréhensible.
Pour nous permettre de saisir cette difficulté propre à l'idée d'amour, Platon nous retrace safiliation, qu'il détaille ensuite avant d'en tirer les conséquences sur la nature de l'Amour.
[I.
Présentation du mythe d'Éros.]
Dans une première phrase, Platon donne à son texte la dimension d'un mythe.
L'amour est personnifié sous les traitsd'Éros, cette divinité grecque.
L'allégorie de l'amour commence ainsi par l'étude de sa généalogie.
On retrouve là l'undes thèmes principaux de toute la mythologie grecque : les figures légendaires nous sont connues par leur filiation.Nous sommes ce que notre hérédité a fait de nous.
Nous portons en nous les qualités ou les défauts de nos parents,et Éros, fils de deux parents aux vertus opposées, Poros, son père, l'Expédient, et Pénia, sa mère, la Pauvreté, enest un exemple significatif.
[II.
Amour et pauvreté.]
[1.
L'Amour manque de tout.]Aussitôt après avoir indiqué cette filiation, Platon passe à une analyse des qualités issues de la mère d'Éros.
L'Amourest dans le dénuement : Platon nous brosse son portrait comme celui d'un vagabond, d'un va-nu-pieds.
Aimer, c'esten effet être dans la pauvreté.
Lorsque j'aime, je ne possède en effet en un sens plus rien; car ce que j'aime, c'estautrui, c'est-à-dire ce qui ne m'appartient pas et ne saurait m'appartenir.
L'amour suppose la séparation radicaleentre l'amant et l'aimé.
Du coup, celui qui aime, quand bien même il serait comblé au plus haut point par l'objet deson amour, en reste toujours séparé.
Aimer, c'est, parce que justement on n'a plus d'intérêt que pour l'objet aimé,expérimenter la solitude, éprouver le dénuement, ressentir que l'on ne possède rien et que l'être aimé est encoreplus éloigné de nous que tout autre être.
L'amant ne se soucie plus de soi-même, se fait indigent par amour.
[2.
L'Amour se satisfait de peu.]Cet état de dénuement n'est pas présenté par Platon comme une punition, un châtiment infligé à l'amant.
Aucontraire, l'amant néglige de son plein gré ce qu'il possédait avant d'avoir découvert ce qu'il aimait.
C'est de sonpropre chef que l'amour est démuni, et d'ailleurs il ne souffre pas de coucher à la dure, de mener une existencebesogneuse.
En apprenant que ce qu'il chérit au plus haut point est étranger à lui, il découvre en même temps querien de ce qu'il croyait lui importer ne compte en vérité pour lui.
Aimer m'apprend à reconnaître quels sont lesvéritables biens, que je ne possède jamais, et comment les autres biens ne sont que des biens contingents, derencontre..
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