Le débat sur l'existence de Dieu
Publié le 26/01/2020
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Bien qu'elle ne constitue, strictement parlant, qu'un élément parmi d'autres d'une interrogation philosophique sur la religion, la question de l'existence de Dieu a offert matière à un débat récurrent tout au long de l'histoire de la philosophie. Nombre de métaphysiciens se sont efforcés de démontrer rationnellement que Dieu existe, soit à partir de son concept, soit à partir de l’ordre du monde, soit enfin à partir de la contingence de l’univers.
Emmanuel Kant a proposé un classement de ces preuves de l'existence de Dieu, qui a été adopté depuis : ces preuves ne sont plus qualifiées de « physiques », « métaphysiques » et « morales », mais de « physico-théologtques », « cosmologiques » et « ontologiques ». La preuve ontologique a connu la plus grande fortune, dans sa version anselmienne (texte 7), comme dans ses versions cartésienne (texte 9! et leibnizienne (texte 10). Saint Thomas d'Aquin, pour sa part, a préféré défendre un argument cosmologique, qui greffe un contenu dogmatique chrétien sur le modèle d'argumentation aristotélicien (texte 8). Kant, cependant, a définitivement mis fin à toute tentative de traitement métaphysique de la question de l’existence de Dieu : une telle prétention est illusoire, compte tenu de nos capacités limitées de connaissance. La grande porte de la métaphysique ayant été refermée et condamnée de manière irrévocable, seule semblerait rester ouverte la fenêtre de la religion. C'est pourtant par une réflexion éthique que Kant pose sur de nouvelles bases le problème de l'existence de Dieu (texte 11).
Paradoxalement, malgré son statut privilégié parmi les débats classiques déjà philosophie, l'examen de la question de l'existence de Dieu se situe à la marge d'une approche philosophique de la religion : son propos concerne en effet moins le pourquoi de l'attitude humaine qu'est la religion, que le quoi de la causalité du monde. En un mot, son enjeu est d'ordre métaphysique. Et en tant que tel, ce débat subira, au cours de l'histoire de la

«
philosophie, les aléas qui affecteront tous les questionnements
métaphysiques.
Il ne sortira pas indemne, notamment, de la révo
lution kantienne.
Justement parce que le problème de l'existence
de Dieu ne peut être tranché par la métaphysique de manière
irréfutable, et ne le pourra jamais, il laisse le champ libre aux choix
proprement humains, soit strictement subjectifs, soit à préten
tion universelle comme l'exigent les principes de la morale kan
tienne.
Le problème philosophique de l'existence de Dieu ne dis
paraît donc nullement, mais se déplace : quel(s) choix faut-il faire,
face à une question qui demeurera fatalement sans réponse posi
tive, qui ne pourra jamais être tranchée sans contestation pos
sible ? Et comment justifier ce(s) choix ? Au nom de quoi faut-il
en décider et s'y engager ?
- La preuve ontologique de l'existence de Dieu
SAINT ANSELME (1033-1109)
Saint Anselme, moine en Normandie (à l'abbaye du Bec), puis arche vêque de Cantorbéry, cherche à démontrer l'existence de Dieu.
Il éla bore à cet effet un argument que l'on appellera métaphysique, jusqu'à ce que Kant le nomme ontologique.
Donc, Seigneur, toi qui donnes intellect à la foi, donne-moi, autant
que tu sais faire, de comprendre que tu es, comme nous croyons, et que
tu es ce que nous croyons.
Et certes, nous croyons que tu es quelque chose de tel que rien ne se peut penser de plus grand.
N'y a-t-il pas
une nature telle parce que J' insensé a dit dans son cœur : « Dieu n'est
pas 1 » ? Mais il est bien certain que ce même insensé, quand il entend
cela même que je dis : « quelque chose de tel que rien ne se peut pen
ser de plus grand», comprend ce qu'il entend, et ce qu'il comprend
est dans son intellect, même s'il ne comprend pas que ce quelque chose
est.
Car c'est une chose que d'avoir quelque chose dans l'intellect, et
autre chose que de comprendre que ce quelque chose est.
En effet, quand
le peintre prémédite ce qu'il va faire, il a certes dans l'intellect ce qu'il
n'a pas encore fait, mais il comprend que cette chose n'est pas encore.
Et une fois qu'il l'a peinte, d'une part il a dans l'intellect ce qu'il a
1.
Psaumes 13, 1 ; 52, 1.
28.
»
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