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L’artiste travaille-t-il ?

Publié le 19/01/2023

Extrait du document

« L’artiste travaille-t-il ? Depuis l'antiquité, l'artiste est présenté comme un messager des dieux, un être inspiré par les anges ou les démons.

Il est alors souvent considéré comme un marginal et idéaliste qui s’oppose au travailleur, qui partage ses forces et qui se confronte à la peine qu’implique son métier pour pouvoir répondre aux besoins de la société.

L’oisiveté qui caractérise la pratique artistique, distinguerait l’artiste de l'ouvrier et du travailleur.

Pourtant l’artiste ne peut créer sans le savoir faire et les techniques de l’artisan.

De plus, ses créations sont perçues comme sacrés et sont présentés dans des musées, qui démontrent la considération et l’importance portée à ses œuvres.

Une tension se manifeste alors entre la perception inutile et perturbateur de l’artiste et l’importance qui lui est accordé par la société.

Nous nous demandons alors dans quelle mesure l'activité de l'artiste peut-elle être considérée comme un travail ? La question interroge alors la source de l’art, savoir s’il naît d'un pouvoir mystérieux, ou d'un travail lucide et rationnel.

Nous verrons dans un premier temps que l’artiste se distingue de l’ouvrier et de l’artisan par le produit et le processus de son activité.

Nous verrons dans un deuxième temps que l’inspiration de l’artiste porte à une certaine ambiguïté mais quelle ne supprime pas toute forme de travail.

Enfin, nous expliquerons que si l’artiste travail, le travailleur créé et que la distinction se fait par le plaisir du travail, propre à l’activité artistique libératrice. En effet, la distinction entre l’artiste et le travailleur se fait par le résultat de leurs activités et par le processus de réalisation de ce résultat.

En marquant le monde et en s’affranchissant de règles strictes, l’artiste se différencie de l’ouvrier et de l’artisan. La distinction entre le produit du travail et le produit de l’art se fait dans un premier temps à l’aide du sens commun.

En effet, les produits de l’activité humaine tels que la Joconde, une cuillère ou un marteau ne semblent pas avoir la même valeur et importance.

Le produit du travail se définit son utilité et sa capacité à répondre à un besoin, il ne constitue ainsi pas une fin en soi puisqu’il est toujours réalisé pour répondre à une nécessité.

Le produit de l’art, au contraire, est présenté comme une fin en soi, à telle point que la question de son utilité est remise en cause.

Cette idée s’illustre par le principe parnassien de « l’art pour l’art ».

Hannah Arendt propose dans un extrait de La Crise de la Culture, une distinction entre les produits du travail et les produits de l’art.

Parmi les choses fabriqués par l’homme, elle différencie les objets d’usage et les objets d’art par rapport au temps.

Elle définit le résultat du travail comme un objet destinée à la consommation, à l’opposé de l’objet d’art qui dispose d’une « immortalité potentielle ».

L’œuvre d’art est permanente dans le temps car elle traverse les générations en tant qu’objet culturel.

La volonté de l’homme à attribuer à l’art une place particulière permet aux objets d’art de marqué le monde et la vie humaine.

L’œuvre d’art, en constituant la finalité de la production, fait de l’activité artistique l’activité productive par excellence et inscrit ainsi la liberté de l’homme dans la nature.

C’est ainsi que pour Arendt l'artiste ne travaille pas, puisqu’il ne remplit pas une fonction et qu’il ne sert pas à la reproduction de la force vitale.

Cependant, il contribue à faire du monde, un monde humain qui n'a pas pour seule finalité l'existence biologique.

L'art élève l'homme à des aspirations plus hautes que son existence animale.

Que se passe-t-il alors si l'artiste devenait un travailleur comme les autres et si on cessait de considérer le résultat de son activité comme exceptionnelle ? Dans un deuxième texte, Hannah Arendt explique qu’envisager toutes les activités humaines du point de vue du travail consisterait à ne percevoir que deux catégories, le travail et l'amusement.

L’art se rangerait du côté du loisir et se résumerait alors à une activité inutile, sans importance, qui consisterait à du temps vain.

Une distinction si binaire des activité humaines insinue un monde qui n’est plus marqué par l’art, un monde immonde et inhumain qui ne fait plus de sens.

Il est alors nécessaire de distinguer art et travail.

Cependant, la différenciation par rapport au temps parait incomplète et ne rends pas compte des œuvres éphémères ou des objets d’art qui s’apparentent à des objets du quotidien, tel que les œuvres de Duchamp : la roue de bicyclette et le porte bouteille.

Ces œuvres, qui semblent être à la portée de tous et qui ne demande pas d’effort réel, questionnent la séparation de l’art et du travail.

La distinction de ces activités doit se faire au niveau de leur processus de création. L’idée commune définit l'activité de l'artiste comme libre et épanouissante tandis qu’elle établit l'activité du travailleur comme une contrainte accompagnée de la peine et de l’effort. En effet, le travail est contraint car il est déterminé par le résultat à atteindre, par l’objet à produire.

L’ouvrier doit suivre un ensemble de règles et d’étapes pour parvenir à réaliser un objet qui corresponde à l’usage qui lui est destinée.

La finalité de la réalisation détermine les actions et les idées du travailleur qui doit alors user d'un savoir-faire, d'une technique spécifique mais aussi d'une méthode de règles à suivre.

Tandis que l’artiste n’est pas défini par la finalité de son projet, c’est ainsi que son activité est considérée comme libre. Cependant, l’artiste ne peut se passer de règles et de techniques car toute création doit prendre place à au sein d'une structure formel.

Pourtant les règles suivis par l’artiste, qui peuvent se résumer par la règle du beau, ne semblent pas expliquer le résultat final.

Nous nous demandons alors ce qui explique la création artistique, si ce n’est un ensemble de règles à suivre et à appliquer. Ici, l’art ne peut donc pas être considéré comme un travail, à la fois par le résultat de son activité et par le processus de sa création.

L’art ne semble donc pas pouvoir s’expliquer de manière objective, l’existence des œuvres d’art nécessite ainsi une explication supplémentaire. Nous verrons alors que l’aspect incompréhensible de l’art peut s’expliquer par le génie.

Cette idée de génie affranchie l’artiste de tout travail et le résume à un outil de l’expression de la nature.

Pourtant, nous verrons à l’aide d’un texte de Nietzche, que l’art ne peut se résumer une essence divine et qu’il nécessite un réel travail. L’activité du travailleur peut être reproduite, le métier peut être appris et transmis.

Les machines modernes illustrent cette idée en démontrant que le métier peut être rationnalisé et que le travailleur peut ainsi être remplacé.

L'activité de l'artiste ne se contente pas, et ne peut se réduire à l'application de règles et de procédures déjà établies.

Kant explique que s'il existe quelque chose de supplémentaire pour parvenir à l’œuvre d’art, c’est qu’il y a du génie. L'ouvrier ne peut avoir l’idée du génie, même s’il peut reproduire l’œuvre.

Le texte de Kant soulève alors l’ambiguïté de l’art qui se définit à la fois, par l’artefact puisqu’il nécessite un ensemble de règles et de techniques, qui est le produit de l’homme ; et par le génie, produit de la nature.

Kant explique que l’œuvre d’art constitue le produit d’une nature et non d’un art humain.

L'œuvre d'art n'est pas que l'effet d'une disposition naturelle mais elle semble être l’expression de la nature à travers l’artiste.

« C'est le talent inné par lequel la nature donne ses règles », la création artistique n'est pas une production sans règle mais une production sans règles qui préexiste à l'activité artistique elle-même, autrement dit le processus de création créer sans cesse de nouvelles règles.

C’est ainsi que l'artiste ne peut expliquer à l'avance son processus de création et le résultat de son travail et de son processus.

L'originalité ne réside alors pas uniquement dans l'œuvre finale mais également dans le développement de la création, dans le travail qui conduit à la réalisation de cette œuvre.

La création artistique, si elle est création de génie, ne peut être reproduite à l’identique.

Le génie peut faire figure de modèle mais il ne se transmet pas, à l’inverse du travail.

Kant, en relation avec Platon, affirme donc que l’artiste est habité par les dieux, que l’inspiration divine lui permet de créer.

Il demeure alors quelque chose d'incompréhensible dans la création artistique via la notion de génie.

Ici, l’artiste ne travaille pas car il va à l’encontre de la définition donnée du travail, qui est de suivre une procédure stricte.

De plus, il n’est que l’outil de la nature, il n’est alors pas à la cause de son œuvre. Le texte de Nietzsche remet en cause la notion de de génie, dans la mesure où elle maintient le caractère incompréhensible et mystérieux de la création artistique et dépossède l’artiste de son œuvre.

Nietzsche critique l'utilisation du terme « génie » en expliquant qu’il n’existe aucune raison objective à distinguer la création artistique de toutes les autres.... »

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