L'art favorise-t-il la liberté?
Publié le 10/11/2013
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création.
Par exemple, c’est en peignant La Ronde de Nuit (portrait d'une compagnie de
sécurité) que Rembrandt invente la technique de sortie du cadre: ainsi le capitaine de la
compagnie n'est plus au centre du tableau mais à une de ses extrémités, il sort littéralement
du tableau, comme si la compagnie allait se mettre en marche.
Autrement dit, puisque les
règles de l’art ne préexistent pas à la création, on peut dire que l’art permet l’exercice
d’une liberté, certes peu consciente, mais en apparence infinie: et l’art est bien le seul
domaine permettant une telle liberté.
Tous les autres domaines imposent des contraintes:
ainsi pas de science sans méthode, pas de technique sans connaissance préalable...
D’autre part, la liberté de création se retrouve aussi dans la liberté des sujets et des
formes, ce que Hegel(opus cité) appelle la libre fantaisie.
Cette fantaisie artistique n’est ni
une forme de caprice infantile ni l’excentricité: elle est l'œuvre de l’imagination.
Or, même
si certaines époques imposent parfois les sujets, comme le choix des représentations
religieuses, les formes données par l’imagination de l’artiste sont libres.
Par exemple, au
XVème siècle, tout en peignant en apparence des sujets religieux, Jérôme Bosch inventent
des formes étranges: dans sa représentation de l’ Enfer , les flammes sont extérieures au lieu
lui-même, une sorte d’oiseau ou de mouche monstrueux, coiffé d’un entonnoir, assis sur une
fosse d’aisance, avale les corps et les âmes...Une telle représentation(du diable) à la fin du
moyen-âge montre, par son originalité, combien l’imagination s’exerce librement et de
manière illimitée.
Toutefois, si la liberté des formes est infinie(allant même parfois jusqu’à
l’absence de formes ou de représentations comme dans les Monochromes de Klein), celle des
sujets fait problème.
En effet, le choix des artistes peut aller à l’encontre de la loi ou de la
morale sociale(des mœurs).
Certains choisissent même la provocation, voire le scandale.
Par
exemple, à certaines époques, les artistes s’opposent à ce qu’ils appellent le conformisme
bourgeois, comme les surréalistes ou encore aux mœurs fort peu libérales de leur époque
comme les libertins.
Autrement dit, jusqu’où peut aller la liberté des sujets? Répondre à
cette question reviendrait à exiger la censure.
Or, comme les artistes sont toujours parvenus
à détourner l’interdiction de l’expression, on voit qu’il est impossible de fixer des limites à
l’art.
Dès lors, qu’en est-il de la liberté de l’amateur?
Dans la masse inextricable des œuvres d’art, l’amateur trouve son compte, sans
qu’on ne lui impose rien.
Ainsi c’est le public qui fait le succès du Tartuffe de Molière, pas le
roi Louis XIV.
En d’autres termes, l’art offre à l’amateur le choix non seulement entre les
œuvres mais aussi entre les activités artistiques elles-mêmes.
Ainsi, de l’opéra, en passant
par le théâtre, la peinture, la danse...et jusqu’au cinéma, il y en a pour tous les goûts.
Pour
l’amateur, l’art est donc le domaine de la diversité produisant la possibilité de choisir sans
contrainte.
De la même manière, la libre fantaisie permet à l’amateur d’exercer sans entrave sa
propre imagination ou sa sensibilité.
Une œuvre d’art donne à voir ou entendre ce que la
réalité ne montre pas ou ne rend pas audible.
Par exemple, dans la vie quotidienne, le
monde extérieur ou notre monde intérieur apparaissent confus, bariolés, multiples; l'œuvre
d’art isole une représentation, un sentiment...et les rend singuliers; de même, comme
l’imagination semble infinie, elle peut représenter des objets fictifs ou sur lesquels nous ne
prenons pas le temps habituellement de nous appesantir.
Pour toutes ces raisons, l'œuvre
d’art nous semble être un moyen de prendre conscience de nous-mêmes, d’apprendre à
nous connaître.
C’est pourquoi il existe aujourd'hui des thérapies qui font appel à l’art, tant
dans sa contemplation que dans son apprentissage technique.
L'œuvre d’art nous ouvre des
perspectives ou nous libère de nos névroses, ce qu'aucun autre domaine de la culture ne
permet.
Enfin, l’amateur jouit, dans la contemplation, d’une totale liberté d’interprétation,
même si elle est guidée par l'œuvre elle-même.
Cette liberté est perceptible selon les
époques.
Par exemple, le public, selon les mœurs, ne jugent pas une œuvre de la même
manière: ainsi le spectateur du XIXème siècle est scandalisé par le drame de Hugo, Hernani ,
dont les tirades ou dialogues sont soi-disant osés, alors qu’aujourd’hui ces propos auraient
tendance à nous amuser.
De même, les surréalistes ont redécouvert des romans des XVIIIème
ou XIXème siècles, oubliés depuis lors, comme les romans dits gothiques.
En d’autres
termes, l’interprétation consiste à donner du sens à l'œuvre et la liberté de l’amateur est
guidée par son goût et son désir de comprendre.
Cette liberté est unique et exemplaire: en
effet, seul l’art autorise une telle indépendance de la signification de son objet.
S’il en est.
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