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L'art en question

Publié le 05/01/2020

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question

une lecture de l'œuvre d'art comme étant marquée par des troubles affectifs. Il renoue ainsi avec la vision platonicienne de l'art : l'art flatte nos passions pour Platon ; pour Freud, il exprime le pôle pulsionnel et inconscient de la personnalité, sur lequel la raison ne peut pas exercer sa critique. L'abus de ce type d'approche risque de faire perdre de vue les œuvres elles-mêmes, puisqu'il en réduit la signification à l'expression de particularités individuelles. Cependant, menée avec circonspection, l'analyse psychologique des œuvres peut au contraire mettre l'accent sur leur intérêt universel, en éclairant le message inconscient qu'elles adressent à leurs contemplateurs.

 

L'interprétation sociologique de l'art remet en cause plus radicalement, puisqu'elle mine jusqu'à cette rencontre, cette complicité de l'artiste et de ceux à qui il s'adresse. Pierre Bourdieu vise particulièrement le sentiment d'élection qui peut en résulter dans sa critique de « l'amour de l'art». Alors même qu'ils se croient libres dans leurs jugements, les individus obéiraient à un dressage dicté par des intérêts : l'art est interprété comme un champ d’activité apparemment éloigné des préoccupations économiques et du pouvoir, mais où s'exercent en réalité des conflits et des rapports de force.

 

Qu'en est-il de la valeur de l'art si ses ambitions sont subordonnées à ces rapports de force ? N'est-ce pas là, quoique d'une manière différente de Platon, rejeter l'art dans le domaine des apparences trompeuses ?

 

D'une manière moins radicale, Claude Lévi-Strauss estime devoir remettre en cause la valeur de la peinture contemporaine; cette dernière est interprétée, là encore, comme un symptôme, l'expression d'un malaise caractérisant la modernité. Alors que, de tout temps, l'humanité s'est enrichie des traditions, notre époque serait fascinée par l'attrait du nouveau, de la rupture. L'art ne serait que l'un des aspects les plus visibles de la fuite en avant qui en résulte.

 

Faut-il étendre la portée de ces critiques à l'art en général ? Il peut exister d'autres moyens de traduire les tensions sociales que l'amour artificiel de l'art dénoncé par Bourdieu ; le rejet du passé peut expliquer en partie, une crise de l'art contemporain, une phase d'interrogation plus que de réelle création. Mais il découle de ces constats que si l'art est utilisé comme moyen de valorisation, c'est sur la base d'une croyance en sa valeur réelle ; si l'on déplore un tarissement

L'art en question

Nous avons vu que l'art est une activité liée à des valeurs positives, qu'il procure à l'homme un plaisir ou une augmentation de sa liberté et de sa conscience ; il est même pensé comme une approche du divin, à travers la notion d'enthousiasme (texte 1), ou lorsqu'il est lié au sacré (texte 8). Souvenons-nous toutefois que Platon a critiqué l'activité artistique au nom de ses effets, en lui reprochant de stimuler les passions (texte 13).

 

De manière différente, l'art s'est trouvé mis en question par la modernité ; les sciences humaines, mettant de côté l'interrogation directement morale et politique sur l'action pour tenter de la soumettre à un regard objectif, ont tenté d'absorber la singularité de l'activité artistique dans des théories explicatives plus larges. Sans prononcer à proprement parler de condamnation, de telles approches ont pu laisser entendre que l'art, avant d'être l'expression d'un amour du beau ou d'une disposition créatrice, devait son existence à des déterminismes sociaux ou psychologiques. Ou encore que l'art, avant d'être en lui-même porteur de signification, pouvait être considéré comme un symptôme, comme le révélateur de processus cachés, à interpréter du point de vue de l'objectivité scientifique.

 

Nous aurons à examiner les conséquences éventuellement réductrices de ce type d'approche, qui consiste à chercher dans l'art un sens qui lui vienne de ce qu'il révèle ou trahit. L'art ne serait-il qu'apparence, ses productions une fois décryptées perdant leur raison d'être ? Si dés processus jugés plus fondamentaux en rendent compte, il faut se demander si l'on explique ainsi intégralement le sentiment esthétique ou la création...

 

C'est ainsi que la psychanalyse jette une lumière nouvelle sur la création artistique : Freud propose tout d'abord une définition de la configuration psychologique de l'artiste, puis

question

« une lecture de l'œuvre d'art comme étant marquée par des troubles affectifs.

Il renoue ainsi avec la vision platonicienne de l'art: l'art flatte nos passions pour Platon (voir texte 13); pour Freud, il exprime le pôle pulsionnel et inconscient de la personnalité, sur lequel la raison ne peut pas exercer sa critique.

L'abus de ce type d'approche risque de faire perdre de vue les œuvres elles-mêmes, puisqu'il en réduit la signi­ fication à l'expression de particularités individuelles.

Cependant, menée avec circonspection, l'analyse psycho­ logique des œuvres peut au contraire mettre l'accent sur leur intérêt universel, en éclairant le message inconscient qu'elles adressent à leurs contemplateurs.

L'interprétation sociologique de l'art remet en cause plus radicalement, puisqu'elle mine jusqu'à cette rencontre, cette complicité de l'artiste et de ceux à qui il s'adresse.

Pierre Bourdieu vise particulièrement le sentiment d'élection qui peut en résulter dans sa critique de «l'amour de l'art».

Alors même qu'ils se croient libres dans leurs jugements, les individus obéiraient à un dressage dicté par des intérêts : l'art est interprété comme un champ d'activité apparemment éloigné des préoccupations économiques et du pouvoir, mais où s'exercent en réalité des conflits et des rapports de force.

Qu'en est-il de la valeur de l'art si ses ambitions sont subor­ données à ces rapports de force? N'est-ce pas là, quoique d'une manière différente de Platon, rejeter l'art dans le domaine des apparences trompeuses? D'une manière moins radicale, Claude Lévi-Strauss estime devoir remettre en cause la valeur de la peinture contem­ poraine; cette dernière est interprétée, là encore, comme un symptôme, l'expression d'un malaise caractérisant la modernité.

Alors que, de tout temps, l'humanité s'est enri­ chie des traditions, notre époque serait fascinée par l'attrait du nouveau, de la rupture.

L'art ne serait que l'un des aspects les plus visibles de la fuite en avant qui en résulte.

Faut-il étendre la portée de ces critiques à l'art en géné­ ral? Il peut exister d'autres moyens de traduire les tensions sociales que l'amour artificiel de l'art dénoncé par Bourdieu; le rejet du passé peut expliquer en partie, une crise de l'art contemporain, une phase d'interrogation plus que de réelle création.

Mais il découle de ces constats que si l'art est uti­ lisé comme moyen de valorisation, c'est sur la base d'une croyance en sa valeur réelle; si l'on déplore un tarissement. »

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