LA VIOLENCE, LE DROIT
Publié le 30/08/2014
Extrait du document
L'état de nature, cette guerre de tous contre tous a pour conséquence que rien ne peut être injuste. Les notions de droit et de tort, de justice et d'injustice n'ont dans cette situation aucune place. Là où il n'y a pas de Pouvoir commun il n'y a pas de loi ; là où il n'y a pas de loi il n'y a pas d'injustice : force et ruse sont à la guerre les vertus cardinales. Justice et injustice n'appartiennent pas à la liste des facultés naturelles de l'Esprit et du Corps ; car dans ce cas elles pourraient se trouver chez un homme qui serait seul au monde (au même titre que ses sens et ses passions). En réalité la justice et l'injustice sont des qualités qui se rapportent aux hommes en société, non à l'homme solitaire. La même situation de guerre a aussi pour conséquence qu'il n'y existe ni propriété [...] ni distinction du Mien et du Tien, mais seulement qu'à chacun appartient ce qu'il peut s'approprier et juste aussi longtemps qu'il est capable de le garder.
HOBBES.
HOBBES.
Analyse du sujet · La thèse centrale est facile à repérer : dans l'état de nature, il n'existe aucun droit. · Double argumentation de Hobbes : par une analyse des concepts (relation entre pouvoir, loi, injustice), par la référence à l'homme solitaire (attention à cet exemple, presque paradoxal, puisque l'homme solitaire ne peut être en guerre...). · Bien faire la distinction que suggère la fin du texte entre propriété et appropriation momentanée. Plan Introduction I. — Inexistence du « droit naturel « II. — Pauvreté de l'homme premier III. — Instabilité de l'appropriation initiale Conclusion |
«
CORRIGÉ
[Introduction]
Contrairement aux nombreux théoriciens du Droit qui admettent
l'existence
d'un Droit naturel ou de droits appartenant initialement à la
nature même de l'homme, Hobbes affirme dans ce passage que dans l'état
originel de nature, il ne peut exister aucun Droit.
En conséquence, toutes
les notions relatives aux valeurs juridiques ou morales en sont également
absentes.
La nature est le domaine de la seule force physique, qui règle ou
dérègle toutes les relations entre les hommes primitifs.
[1 -Inexistence du cc droit naturel »]
Le rappel, au tout début du texte, de 1' équivalence entre état de nature
et
« guerre de tous contre tous » suffit à indiquer que, dans cet état de
nature, ne règne que la force physique.
Et il convient de considérer ce
règne comme excluant toute autre possibilité.
C'est pourquoi Hobbes pré
cise que des notions comme le droit et le tort, la justice ou l'injustice
n'ont initialement aucune signification.
Admettre leur existence dans cette
période où
l'homme ne se distingue pas encore de l'animal, c'est donc
céder à une illusion rétrospective, et attribuer à
l'homme des qualités qui
ne se manifesteront en lui que plus tard.
Quelle est l'origine de toute loi (donc du droit
lui-même)? Unique
ment l'instauration du
Pouvoir commun (distinct de la puissance indivi
duelle
:il s'impose à tous et excède les rivalités entre individus).
Tant que
celui-ci fait défaut, la loi est également absente, au sens juridique ou
conventionnel.
Ne règne que la «loi de la jungle» : il s'agit simplement
d'être, dans chaque situation, le plus fort.
C'est pourquoi, dans la guerre première de tous contre tous, les « ver
tus cardinales
» (Hobbes utilise ironiquement l'expression) ne peuvent
être que la force et la ruse : tous les moyens sont bons, y compris sinon en
priorité ceux que
la moralité ultérieure condamnera, pour écraser 1' autre.
[Il -Pauvreté de l'homme premier]
L'homme présocial n'est qu'un animal.
Comme tel il dispose de
«facultés naturelles de l'Esprit et du Corps ».
Pour l'Esprit : il semble
qu'en dehors de la ruse, il n'existe pas grand chose de notable.
Pour le
Corps,
c'est évidemment l'énergie physique (à laquelle la suite du texte
permet d'adjoindre les sens et les
passions: relations à l'environnement et
répercussions de ce dernier, la passion étant à comprendre étymologique
ment comme
ce qui est subi).
Autant considérer que les facultés de l'es
prit sont uniquement celles qui peuvent seconder les rapports de force..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- A-t-on le droit à la violence pour combattre l'injustice ?
- Georges Gusdorf écrit : « La philosophie, dans son ensemble, refuse de valider le droit du plus fort ; elle pourrait se définir comme le passage de la violence à la raison. » Qu'en pensez-vous ?
- Peut-on s'empecher de recourir à la violence dans un Etat de droit ?
- Le droit n'a-t-il rien avoir avec la violence ?
- Le droit vise-t-il à maîtriser la violence ?