La vertu comme juste moyenne: Aristote, Éthique à Nicomaque, II, chap. VI
Publié le 22/03/2015
Extrait du document
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Textes commentés
Dans les chapitres V et VI de !'Éthique à Nicomaque, Aristote définit la
vertu comme n'étant ni une passion, ou un état affectif (comme la colère, la
peur, la joie, la haine, etc.), ni une possibilité d'éprouver telle ou telle de ces
passions, mais une
disposition acquise (hexis), c'est-à-dire une manière d'être
habituelle s'accompagnant d'un choix réfléchi.
La vertu cardinale définissant
l'homme sensé et prudent consiste dans une
juste mesure entre deux
conduites déficientes, l'une par excès, l'autre par défaut.
L'analyse aristotélicienne ne laisse ainsi aucune place à une éventuelle
« psychologie » ; c'est dans le cadre d'une éthique que la question de la vertu
se pose, parce qu'elle constitue la disposition acquise à discerner, dans un
contexte donné, les conditions de l'action sensée.
Celle-ci se situe dans un
point d'équilibre entre excès et défaut, dans toutes les circonstances typiques
de la conduite de la vie.
La vertu est le choix de
la« mesure», c'est-à-dire ce
qui ne comporte ni exagération, ni défaut, dans quelque contexte que ce soit.
Cette
« mesure » ne saurait se réduire à une simple moyenne selon la
proportion mathématique, du fait que cette mesure est variable selon les
individus et le domaine d'application considéré.
C'est pourquoi la vertu
morale est une
«sage moyenne», qui ne récuse pas tant les sentiments
passionnels qu'elle ne les adapte à la circonstance et les applique au moment
opportun.
Le
juste milieu ne consiste pas en les choses qu'accomplit
l'homme vertueux, mais plutôt en une certaine manière de les accomplir.
La
« médiété » (mésotès, choix du juste milieu, du moyen terme) est d'agir
quand on le doit, dans les circonstances où on le doit, à l'égard de qui on le
doit.
Ainsi comprend-on l'impossibilité de déterminer objectivement et univer
sellement le juste milieu, qui n'est pas une moyenne qu'on pourrait calculer
en fonction d'extrêmes : l'excès et le défaut sont infinis, et eux-mêmes
indéfiniment variables ; du coup, le milieu entre excès et défaut sera lui
même inassignable
a priori, et réside dans la meilleure manière, à inventer
par le sujet pratique en situation, d'appliquer la droite règle dans la
particularité.
Cette disposition vertueuse doit être habituelle : elle ne peut s'acquérir qu'à
force de pratique, par laquelle la vertu devient disposition personnelle du
sujet.
Les vertus sont des dispositions stables qui finissent par déterminer
durablement le caractère.
Cette constitution subjective explique que la
pensée aristotélicienne ne sépare pas la disposition de l'individu sensible
dont elle est la qualité.
Le modèle de l'action droite ne peut être qu'un
homme droit qui, incarnant la vertu, inspire à ses contemporains la
disposition à agir selon le bien.
35.
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