La raison est-elle sans illusion ?
Publié le 11/05/2012
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On dit avec juste raison que. dans le domaine de la science, les convictions n'ont pas droit de cité : c'est seulement lorsqu'elles se décident à adopter modestement les formes provisoires de l’hypothèse, du point de vue expérimental. de la fiction régulatrice, qu 'on peut leur concéder l'accès au domaine de la connaissance et même leur y reconnaître une certaine valeur (...) — Mais cela ne revient-il pas, au fond, à dire que c 'est uniquement lorsque la conviction cesse d’être conviction qu'elle peut acquérir droit de cité dans la science ? La discipline de l’esprit scientifique ne commencerait-elle pas seulement au refus de toute conviction ?... C’est probable ; reste à savoir si l'existence d’une conviction n 'est pas déjà indispensable pour que cette discipline elle-même puisse commencer (...) On voit par là que la science elle-même repose sur une croyance : il n 'est pas de science sans postulat.
NIETZSCHE (CDE, 1991, Groupe II)
— Autres sujets
— Jusqu’à quel point connaître implique-t-il douter ? (A, 1992)
— L'exercice du doute est-il le monopole du philosophe ?
— L'exercice de la réflexion suppose-t-il le rejet de toute croyance ? (B,1992)
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— La raison humaine est-elle, par nature, conduite à supposer dans le monde plus d’ordre qu'elle n’en trouve ? (A, 1993)
— Peut-il y avoir de mauvais usages de la raison ? (B, 1993)
...

«
les phénomènes immédiats.
il n'accède qu'à un semblant de savoir: seul œlui qui
peut se déprendre du sensible a la révélation du monde éternel des Idée:;, et en
particulier du Bien.
À partir de ce schéma.
il sera admis que l'apparence et l'illu
sion
qu'elle produit sont nécessairement mauvaises : seul l'usage de la raison.
c'est-à-dire le réglage de la pensée sur les exigences les plus hautes et les plus
strictes.
permet la révélation du Vrai et du Bien.
La connaissance exige ainsi le
rejet de l'illusion pour se consacrer à l'exploration
d'un univers intellectuel qui
échappe au temps et à sa dégradation.
• Ce rationalisme platonicien est toutefois combattu sans attendre par celui
d'Aristote.
qui ne voit dans les Idées que
''du vent''· des "mots creux,,: à un
versant idéaliste de la pensée se substitue une version ,, réaliste » - ce qui
n'interdit aucunement de continuer à admettre que
c'est bien par le travail de la
raison que le savoir se constitue authentiquement.
Mieux : Aristote formalise avec
précision les règles auxquelles doit désormais obéir la démarche de l'esprit pour
être qualifiée de rationnelle
: il y a dès lors des principes à respecter (identité.
non
contradiction.
tiers exclu, causalité) ct des formes de raisonnement à privilégier
(théorie du syllogisme et de ses multiples figures):
si le raisonnement n'obéit pas
à ces normes.
c'est sa puissance même qui devient illusoire.
• Mais en privilégiant l'aspect strictement déductif de la raison, Aristote admet
également que cette dernière est à elle seule capable de repérer les lois auxquelles
obéit la
nature- ce qui rend inutile tout recours à l'expérience.
Il faudra attendre
Copernic et Galilée
- tels que les interprétera notamment Kant - pour que
l'esprit scientifique comprenne
qu'à la déduction il convient de substituer une
démarche au contraire inductive.
c'est-à-dire fondée sur l'expérimentation.
puisque la nature ne se dévoile pas de son propre mouvement à
l'espri1l, mais qu'elle ne répond qu'aux questions que cc dernier lui pose activement.
Rétrospectivement, la confiance qu'Aristote accordait au pouvoir de la raison
apparaît illusoire
(cf.
Russell:« L'esprit humain a progressé dans la mesure où il s'est affranchi d'Aristote»).
• Il n'en reste pas moins que.
même après que Galilée aura démontré la véTité de
l'héliocentrisme.
mes sens continuent quotidiennement de me tromper :tout en
sachant que
c'est bien la Terre qui se déplace.
j'ai toujours l'impression que c'est
le soleil qui « se lève >> et " se couche ».
Cette contradiction entre la vérité objec
tive ou scientifique et une version subjective de la
« vérité» illusoire.
fortement
soulignée
par Husserl.
permet de préciser en quoi l'illusion se distingue de
l'erreur: alors que la seconde.
une fois repérée.
peut être corrigée, la première.
même dénoncée.
continue à susciter l'adhésion.
• C'est que l'illusion correspond à la façon dont mes sens m'incitent à désirer
que soient les choses.
La raison par contre prétend ne rien avoir en commun avec
le
désir." Universelle», elle se croit volontiers à l'écart des intérêts.
des pulsions.
des
jeux du pouvoir, et va classiquement jusqu'à concevoir comme permanente.
sinon éternelle ; ainsi la raison cartésienne.
qui entreprend une fois de plus de lut
ter contre l'illusion (cf.
l'analyse du morceau de cire.
ou l'expérience du bâton qui
semble brisé dès
qu'on le plonge dans l'eau).
croit-elle trouver son appui Je plus
solide dans l'affirmation métaphysique de Dieu.
C'est en effet ce dernier qui
garantit sa bonne marche (ce qui, en un sens.
suffit à suggérer
qu'elle n'est pas à
elle seule une garantie contre l'illusion puisqu'il lui faut être elle-même garantie
dans ses performances
par une transcendance qui lui veut du bien).
Dieu lui
même, dont l'existence est par diverses preuves, dont l'argument
ontologique.
paraît ainsi, et simultanément, à portée de la raison humaine et confé
rer à cette dernière son ambition gnoséologique.
Kant ne tardera pas à souligner
combien la raison erre cependant dès
qu'elle prétend démontrer quoi que ce soit
en métaphysique ...
où la pensée ne peut établir sa propre cohérence que par des.
»
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