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La raison entre-t-elle nécessairement en conflit avec la croyance religieuse?

Publié le 01/10/2012

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La raison entre-t-elle nécessairement en conflit avec la croyance religieuse? Introduction La croyance religieuse est fréquemment qualifiée d'irrationnelle — ce qui paraît bien indiquer qu'elle serait peu compatible avec les exigences de la raison. Mais, d'un autre côté, la croyance est souvent présentée comme venant apporter la seule réponse possible aux questions que pose la raison lorsqu'elles sont poussées à leur maximum (quelle est l'origine du monde?). Comment donc concevoir les rapports entre raison et croyance religieuse? Est-ce nécessairement, comme tendrait par exemple à nous le faire penser la critique antireligieuse du xvi lie siècle, sur le mode du conflit? I. Du mythe aux preuves — La question n'aurait guère eu de sens pour Socrate: s'il passe pour le premier grand raisonneur de la philosophie, son respect pour les dieux est rappelé par Platon. — Dans la pensée platonicienne, la cohabitation s'effectue également sans problème. Il s'agit même d'une véritable complémentarité: là où l'analyse philosophique et rationnelle échoue, par exemple lorsqu'il s'agit de rendre compte de l'organisation initiale du Monde (le cosmos: au sens étymologique la mise en ordre), il convient de faire appel aux mythes où interviennent les dieux (le démiurge du Timée). Le discours du mythe (la mytho-logie) n'est sans doute pas rationnel, il constitue plutôt la prise en charge d'un au-delà de la raison, mais il ne prouve rien, sinon par la puissance de ses images persuasives. — A propos de Dieu (et il est désormais unique), l'élaboration d'une preuve rationnelle n'apparaît q...

« raisons de la raison et de la foi.

C'est cependant dans un tel contexte que commencent à être élaborées des preuves de Dieu, qui prétendent répondre à une exigence de rationalité: la philosophie prend en particulier pour tâche, non seulement de montrer que raison et croyance sont compatibles, mais encore que la première peut mener à la seconde.

On ne rappellera que quelques exemples d'un tel travail de rationalisation: • saint-Anselme montre que, du point de vue de la cohérence de la pensée (qui est bien une exigence de la raison), seule la proposition Dieu existe est valide, Dieu n'existe pas témoignant seulement d'une pensée insensée; • saint Thomas décline l'argument aristotélicien en cinq voies, montrant que, lorsqu'on considère l'existence du réel de différents points de vue (mouvement, cause efficiente, degré des qualités, gouvernement des choses ou finalité) on est amené, par les principes mêmes de la raison, à concevoir l'existence de Dieu comme origine du monde; • Descartes conforte l'argument ontologique en montrant que l'idée d'être parfait que je trouve dans mon esprit et sur laquelle il s'élabore ne peut être produite que par un être lui-même parfait.

Dans de telles pensées, l'hypothèse d'un conflit nécessaire entre la croyance et la raison est évidemment irrecevable.

Au point même que, chez Descartes, l'exercice scientifique de la raison s'appuiera sur l'affirmation de l'existence de Dieu et de sa toute bonté (ce qui aboutira à une physique fausse ...

).

III.

Croyance et raison pratique - C'est pourtant le caractère rationnel de ces différentes justifications de la croyance religieuse que vont mettre en cause Hume, puis Kant: • Le premier montre qu'elles impliquent un usage excessif de la raison, qui ne peut construire aucune activité sérieuse à propos d'un concept unique en son genre et donc anormal comme l'est celui de Dieu.

La conséquence est rigoureuse, mais ne mène pas à un conflit: la croyance reste une affaire de choix privé, dont la raison ne doit se mêler en aucun cas; • Kant ne se prive pas de montrer l'inefficacité de l'argument ontologique (qui ne devrait affirmer que la possibilité de Dieu, et non son existence)­ mais c'est, dans son système, la raison elle-même qui, dépassant ce qu'elle peut connaître à proprement parler, va devoir affirmer Dieu par un postulat, pour confirmer la cohérence du monde moral.

Dans ce cas, on constate qu'il existe un au-delà de la rationalité ordinaire (celle des preuves et des démonstrations), mais que cet au-delà est défini par un exercice supérieur (méta-physique) de la raison.

La croyance reste ainsi rationnelle­ ment fondée, alors même que plus rien ne peut être prouvé.

Bien entendu, il ne s'agit dans de telles réflexions que des formes sérieuses de la croyance, soit que, posée au départ, elle s'affirme en quête de l'intellection pour reprendre la formule de saint Anselme, soit qu'elle apparaisse comme le couronnement et l'achèvement de la démarche rationnelle comme chez Kant.

Quant aux variantes systématiquement« aveugles,.

ou fanatiques de la croyance, la raison garde tout pouvoir de les critiquer violemment- mais c'est précisément parce qu'elles commencent par ignorer ses exigences.

- On notera par contre que, lorsque la croyance elle-même sort des normes pour devenir attitude mystique, elle refuse tout rationalisme (cf Bergson: la mystique reste incommunicable à qui ne la vit pas), jugeant par exemple comme. »

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