Devoir de Philosophie

La psychologie peut-elle se constituer sans aucun appel à l'introspection ?

Publié le 18/06/2009

Extrait du document

INTRODUCTION. — Pendant longtemps le savoir que nous qualifions aujourd'hui de psychologique provenait de l'observation vulgaire, et surtout de la conscience que chacun a de ses pensées et de ses sentiments. Lorsque, sous l'influence de COUSIN et de l'École éclectique, durant la première partie du XIXe siècle, la psychologie commença à s'organiser comme discipline particulière rattachée à la philosophie, sa méthode propre consista dans l'introspection conçue comme une application de la conscience à ses propres états pour les mieux connaître. Mais les résultats de cette observation interne, comparés à ceux qu'obtient en physique l'observation externe, n'ont qu'une valeur scientifique bien médiocre. Aussi, dans le but de constituer une science véritable, certains psychologues du début de notre siècle, et principalement les behavioristes américains, prirent-ils la décision héroïque de renoncer à l'introspection et de recourir, comme les physiciens, aux seules données des sens. Mais la 'psychologie peut-elle se constituer sans aucun appel à l'introspection ? I. — IL EST UNE INTROSPECTION CHIMÉRIQUE Ce n'est pas sans raison que, en se constituant comme science indépendante, la psychologie a rejeté comme méthode d'approche du psychisme l'introspection telle que la concevaient les éclectiques. Nous n'avons pas conscience, ainsi que le prétendaient COUSIN et JOUFFROY, du principe même de la vie psychique, du « moi « ou de l'« âme « ce principe est conclu et non perçu; on peut sans doute admettre qu'il est donné dans les états dont nous avons conscience et que l'analyse réflexive manque de l'immédiateté caractéristique de l'introspection. Il est vrai que, même chez les éclectiques, l'introspection n'est pas .nécessairement conçue comme une saisie directe de l'âme et on ne peut pas admettre cette réflexion de Henri WALLON : « La psychologie de l'introspection, quelles que soient ses atténuations, ne peut faire autrement que d'avoir pour objet l'être substance «.

« Un auteur contemporain qui fait un usage fort habile de l'introspection telle que nous avons tâché de la décrire, n'enrépond pas moins négativement à la question à laquelle nous devons répondre : « C'est un fait, assure-t-il, qu'unepsychologie a pu se constituer qui ne doit rien à l'introspection ».

Mais lisons la suite qui nous indique quelquesacquisitions de ces recherches et demandons-nous si elles peuvent suffire à la constitution, non pas seulement dela psychologie, mais encore d'une psychologie : « Une méthode purement objective peut dessiner la structure del'univers des « couleurs » chez le papillon, en comparant les réactions que provoquent chez lui différents stimulicolorés, — à condition justement de ne s'attacher qu'à l'identité ou à la différence des réponses en présence de telsstimuli donnés, et de ne pas projeter dans une conscience du papillon notre expérience vécue des couleurs.

Il y aune analyse et une définition objectives de la perception, de l'intelligence, de l'émotion comme structures deconduite (...).

Le psychique ainsi compris est saisissable du dehors ».S'il prétendait que l'introspection réfléchie et méthodique du psychologue, telle, par exemple, que la pratiquaitl'École de Wuzbourg, n'est pas nécessaire, on pourrait partager l'avis de notre auteur : il est de grands connaisseursde l'âme humaine qui ignoraient le mot même d'introspection; s'ils pratiquaient la chose comme M.

JOURDAIN faisaitde la prose, sans le savoir, on peut croire que ce n'est pas à l'usage systématique qu'ils ont pu en faire qu'ilsdoivent leur célébrité.

En effet, dans la mesure où elle est systématique, l'introspection est sujette à de grossièresillusions que la critique contemporaine a suffisamment relevées : ce n'est Mère en nous appliquant à nous observerque nous apprenons à nous connaître : cette application même vicie le résultat.

Il est donc préférable en un sensde s'observer du dehors.Mais celui qui, du dehors, s'observe lui-même — c'est-à-dire son comportement, sa conduite passée, lecomportement de son milieu avers lui...

— et observe les autres, ne suspend pas cette connaissance par le dedansqu'est la conscience et, par suite, pratique une certaine Introspection.

La psychologie scientifique doit-elle n'entenir aucun compte. La réponse à cette question peut être formelle. L'introspection spontanée et naturelle qu'est la conscience est indispensable à la constitution de toute psychologie.Du dehors, au moyen des seules données de la perception externe, le savant peut connaître le comportement desanimaux ou celui de ses semblables; il peut même étudier son propre comportement en observant son image dansune glace ou, mieux, au moyen d'enregistrements cinématographiques ou phonographiques.

Ces observationspeuvent lui suggérer des hypothèses qu'il vérifiera suivant la méthode utilisée dans les sciences de la nature.

Mais,si par impossible, il pouvait écarter toute donnée introspective actuelle et tout souvenir d'introspections passées,son étude du comportement animal ou du comportement humain ne différerait pas de celle du comportement d'unefeuille emportée dans un tourbillon de ment; elle relèverait de la physique et non de la psychologie. CONCLUSION.

- Pour reprendre cette réponse en l'adaptant à la forme même de la question, on pourrait dire : la psychologie peut se constituer sans appel aucun à l'introspection, mais non sans introspection d'aucune sorte.

Lepsychologue peut se contenter de décrire des comportements; niais, pour lui comme pour ceux qui l'entendent ou lelisent, ces comportements n'ont une signification psychologique que grâce à l'expérience introspective dont aucunedécision ne peut éliminer les constants apports.

La psychologie dite de comportement n'a en définitive designification que lestée de concepts empruntés à l'introspection.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles