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La procréation : l'ère de la négociation

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

"Plus que la victoire sur la stérilité, la maternité choisie et désirée est la vraie révolution sur le plan médical, scientifique, éthique et social. Les changements "révolutionnaires"se sont échelonnés sur une période relativement brèves. Voyons les grandes dates en France : 1967, autorisation de la pilule, 1972-73, début de l'amniosynthèse, début de l'échographie donc de la médecine anténatale, 1975, loi sur l'I.V.G., 1976, la péridurale, 1978 la microchirurgie, 1978-82 la procréation médicalement assistée (P.M.A.). "Les victoires sur la stérilité concernent une minorité et nous obligent à rester modestes : il y a certes des indications absolues pour ces nouvelles techniques mais aussi des indications relatives, qui se résolvent parfois de manière surprenante c'est à dire naturelle. A l'échelle de la planète, plus que la stérilité vaincue, c'est la maîtrise de la fécondité ­ et par là même la transformation du statut de la femme ­ qui me paraît un bond en avant prodigieux. Ses relations à l'homme, au travail sont différentes et donc tout est changé : l'homme se comporte différemment, la société réagit. Je le ressens profondément en tant qu'homme et en tant que citoyen.

« positif.

Pour chaque couple, la moyenne se situe autour de quatre tentatives.

Sans la P.M.A., des couples n'auraientjamais pu avoir d'enfant.

En revanche, ceux qui restent dans l'échec subissent des dommages psychologiquesdouloureux.

La P.M.A., comme la contraception, représente un énorme progrès mais suscite chaque fois denouveaux problèmes éthiques, physiques, psychologiques.

Lorsque débute une P.M.A., en général le couple est déjàassez âgé.

Nous savons maintenant que l'âge de conception du premier enfant est en moyenne 29 ans.

Ce quidonne à une femme dix ans pour mettre au monde tous les enfants qu'elle désire.

Ajoutez à cela les exigences d'unecarrière, très souvent un divorce suivi d'un remariage, le premier ou le second enfant désiré arrive lorsqu'elle a 34ans.

Et dans le cas de la P.M.A., le facteur temps s'ajoute à l'angoisse de la démarche elle-même : l'horlogebiologique tourne...

On veut un enfant tout de suite et on stresse si ce n'est pas le cas. "Nous savons que 25 à 30 % des P.M.A.

sont des succès, mais pour les autres, il arrive que la P.M.A.

n'ait jouéqu'un rôle d'accélérateur du processus procréatif, que celui-ci se serait mis route quoiqu'il arrive...

mais un peu plustard.

Alors parfois je m'interroge sur la nécessité d'avoir introduit dans la vie intime d'un couple ces éléments dehaute technologie avec tous les risques psychologiques que cela comporte, simplement pour avoir un enfant plusvite.

En même temps, pourquoi les en priver ? "D'autant que tout le monde sait maintenant que le progrès scientifique, la recherche de connaissance s'accélèrent.Ce qui fait que ce qui était intouchable, pas manipulable va le devenir de plus en plus.

Cette barrière du réel, cettedernière frontière objet de tant de livres de science-fiction, est dépassée, nous mettant face à la nécessitégrandissante de la réflexion éthique. "Comme l'énergie atomique, le clonage est un pouvoir de destruction extraordinaire.

Comme devant une explosionnucléaire, on ne peut pas se protéger parce qu'ayant dépassé tous les obstacles techniques, il ne reste plus que laréflexion, la sagesse de décider ce qui sera bien ou pas pour nous, ce qui est possible mais inutile.

Nous entrons àtoute vitesse dans l'ère du Vouloir après avoir quitté celle du Faire.

Nous assistons à l'émergence de la société duVouloir.

Celle-ci est illustrée par ce qui se passe autour du désir d'enfant.

A l'exigence : “Je veux un enfant”, que varépondre la société ou plutôt son agent, le médecin ? “Toute demande n'est pas recevable, même si je possède latechnique pour la satisfaire”.

De plus en plus, il va y avoir une confrontation entre “Je veux, je demande” et lemédecin.

Celui-ci peut opposer un refus à une demande précise comme ce désir d'enfant, tout simplement parce qued'autres critères que le désir pur entrent en jeu.

On ne fera pas un enfant à tout prix et par tous les moyens. "Bien entendu, on dira que si on a la possibilité de faire, on fera.

Oui, je pense que toute chose se fait, maisreprenez l'exemple de la bombe à propos du clonage.

Il se fera peut-être puis il s'arrêtera.

La bombe atomique a étéutilisée mais une seule fois il y a cinquante ans, en revanche l'énergie atomique s'est développée. "Dans mon domaine, on a la possibilité de répondre à la question : “est-ce un garçon ou une fille ?” dès la dixièmesemaine de grossesse.

Ceci permettrait de choisir le sexe de l'enfant puisqu'on est encore dans le délai d'I.V.G.autorisé.

On ne le fait jamais.

Il n'y a pas de demande.

Tout peut se faire, tout se fera mais tout ne deviendra pasune pratique.

En médecine, on en est arrivé à ce que j'appelle le progénisme, combinaison entre ce que l'on a pudécouvrir en génétique, en biologie et dans le domaine de la procréation et qui va de pair avec une éthique.

On nepeut pas avoir eu un développement de la technologie sur le vivant et sur l'homme sans avoir automatiquement uneémergence de l'éthique, et c'est la combinaison de ces savoirs et de l'éthique qui est un progrès réel.

Le progénismese démarque de l'eugénisme historiquement daté, il n'a pas le côté coercitif de celui-ci, et ne se limite pas comme luià la technique.

Il se développe continuellement sur deux plans : technique et moral. "Devant l'avenir, je ne suis pas frileux mais au contraire enthousiaste.

Jamais le désir de connaissances n'a été aussivif, jamais il n'a fait avancer les sciences comme depuis ces vingt dernières années.

Mais il s'accompagne d'uneréflexion, d'un souci de la dignité humaine et de sa liberté.

On le voit même dans la relation qui s'établit maintenantentre malade et médecin.

Le premier est plus adulte et plus informé, même s'il ne comprend pas tout.

Le médecindoit donc expliquer, justifier et convaincre de ses décisions.

C'est parfois un exercice difficile et délicat : refuser uneP.M.A.

par exemple est très dur.

Mais il est indéniable que, après la période du médecin roi et sorcier jamais mis enquestion, nous sommes entrés dans une nouvelle ère, celle de la négociation.

Et si difficile que ce soit parfois, jepense que c'est un progrès important qui accompagne naturellement les avancées techniques et éthiques.". »

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