La pluralité des cultures est-elle un obstacle à l’unité du genre humain ?
Publié le 07/02/2013
Extrait du document
«
groupe humain linguistique, parfois même du village ; à tel point qu’un grand nombre de populations dites
primitives se désignent elles -mêmes d’un nom qui signifie ‘homme’ (ou parfois — dirons-nous avec plus
de dis crétion ? — les ‘bons’, les ‘ex cellents ‘, les ‘complets’), impliquant ainsi que les autres tribus,
groupes ou villages ne participent pas d es vertus ou même de la nature humaine, mais sont tout au plus
composées de ‘mauvais’, de ‘méchan ts’, de ‘singes de terre’ ou d’ ‘œufs de pou’.
On va souvent jusqu’à
priver l’étranger de ce dernier degré de réalité en en faisant un ‘fantôme’ ou une ‘apparition’ ».
( Anthropologie structurale , p.
384).
Dans cette optique, la multiplicité n’est pas simplement une entrave fondamentale à l’unité du
genre humain, elle est aussi et surtout ce qui sépare les cultures dans un champ conflictuel.
Dira-t- on que l ’ethnocentrisme est ce qui se nourrit de l’ignorance et de l’incompréhension ou
encore du manque de communication des autres cult ures ? Certes, la méconnaissance de la vari été des
cultures et des langues est assurément un facteur de conflit.
L’hypot hèse pour séduisante soit -elle d’un
appeler à une lange commune ne tient pas.
Car pour que les cultures puissent s’entendre encore faut -il
qu’elles cessent de se combattre les unes les autres.
Une comm unication n’est possible que lorsque les
comba ts cessent .
Or la pluralité des cultures est avant tout la mu ltiplicité des langues au même titre des
autres systèmes de communication.
La diversité des cultur es est donc tout à la fois origine et effet ou
manifestation des diff érences culturelles.
Il semblerait q ue le différenciation culturelle cons titue elle -même la diversité conflictuelle des
cultures.
Cet antagoni sme apparaît aussi et surtout dans le domaine politique.
En effet, de même que toute
culture a une structure spécifique de codes, tout culture possède un sy stème propre d’un régime politique,
d’une infrastructure spécifique.
C’est dire que la multiplicité des cultures ou des civilisations implique une
multitude d’organisations soci ales, des us et des coutumes, d’un système juridique et d’une forme
d’inc arnation de l’autorité politique.
La tentative ou la tentation de la création d’une unité politique,
l’établissement d’un unique sy stème politique universel risque d’écraser ou de réduire les différences d e
culture, voire encourt le péril de l’ évacuation de certaines cultures résolument inconci liables avec le
système commun.
Il ‘apparaît bien que la pluralité des cultures constitue un obstacle incontournable à l’unité du
genre humain.
Mais cette entrave est -elle proprement inhérente à la diversité cultur elle ou est-elle un
obstacle historique ? Dans le premier cas de figure, il semblerait que cette entrave soit inélu ctable et donc
indépassable.
En revanche, dans la deuxième perspective, n’y a -t- il pas la pos sib ilité d’asseoir l’unité du
ge nre humain s ur les différences culturelles elles -mêmes ? En fait , tout varie s elon l’idée que nous nous
forgeons de l’unité du genre humain : si cette dernière est à comprendre sur le mode de l’ uniformité alors
nous risquons l’élimination de certaines cultures ; en revanche, si par unité on entend harmonie dès lors on
peut entrevoir la poss ibilité de surmonter la différences cultur elles sans porter atteinte à toute culture.
Pour ne prendre qu’une seule culture, on observe que la diversité interne non seulement n’est pas
un obstacle à la cohabit ation des cultures, mais qui pl us est, on constate qu’une même entité culturelle
comprend dans sa dynam ique une totalité unie de « cul tures » multiples : régional es, de classes sociales,
socioprofessionnelles , etc.
La multiplicité culturelle repose sur la détestation de l’uniformisation.
En effet, chaque culture
craint pour elle -mê me la dispari tion de ses propres spécificités lorsqu’elle se croit menacée par
l’uniformité.
Cette répugnance de l’uniformité n’est pas statique, elle pro cède d’un mouvement de
diversification perçue comme enrichissement, de lutte contre le nivellement, qui dépend des rapports
mêmes qui unissent un groupe social.
Nous pouvons à nouveau convoquer C.
Lévi -Strau ss : « La notion
de la diversité des cultures hum aines ne doit pas être conçue comme d’une manière statique.
Cette
diversité n’est pas celle d’un échantillon inerte ou d’un catalogue desséché.
Sans doute les hommes ont-ils.
»
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