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La physique doit-elle se méfier de la métaphysique ?

Publié le 19/09/2015

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physique

B. Légitimité. — Nous devons cependant le reconnaître, ce n’est pas sans motif qu'on a recommandé au physicien de se méfier de la métaphysique. La recommandation était sans doute particulièrement opportune à l’époque de Newton, la méthode expérimentale n’étant pas encore constituée, mais elle conserve encore sa raison d’être.

 

En effet, quoi qu’il paraisse à première vue, nous sommes plus portés à échafauder des raisonnements sur les données immédiates de la connaissance qu’à multiplier les observations et surtout qu’à nous assurer de leur exactitude. L’homme naît métaphysicien; pour être physicien, au contraire, il doit le devenir et veiller à ne pas retourner au stade métaphysique.

 

Ensuite, la science expérimentale ne répond pas à toutes les questions que se pose l’esprit à propos des faits étudiés. La tentation est grande alors, pour ne pas les laisser sans réponse, de se fonder implicitement sur des considérations ou des principes qui dépassent les données de l’expérience. C’est à cette tentation que cèdent, par exemple, les biologistes qui se prononcent sur l’explication dernière des phénomènes vitaux et adhèrent à une forme soit de mécanisme, soit de vitalisme, qu’ils considèrent comme une vérité expérimentale. Dans ce cas, ils procèdent, sans le savoir, en métaphysiciens : il est bon de le leur rappeler, en les invitant à se défier de la métaphysique, qu’ils risquent de confondre avec la physique.

 

Enfin, sans défiance de la métaphysique, le savant est exposé à se laisser conduire par des idées préconçues. Au lieu d’observer soigneusement les faits, il y cherchera la preuve de thèses qu’il admet d’avance, indépendamment des faits sur lesquels il prétend les fonder, et, la cherchant, il y a bien des chances qu’il en trouve quelqu’une qui lui donnera satisfaction. A lui surtout, il est bon de crier : « Physique, méfie-toi de la métaphysique. »

 

Conclusion. — Chaque science a ses méthodes et son esprit propre; aussi serait-il dangereux d’adopter pour l’une d’entre elles les procédés de recherche et l’attitude mentale qui conviennent pour une autre dont l’objet est très différent. Mais, d’autre part, le savoir humain et notre compréhension des choses résultent des efforts de l’ensemble des sciences; c’est pourquoi il ne serait pas sage de professer une défiance systématique à l’égard de l’une d’entre elles.

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« SUJETS GÉ:'IÉRAU:I.

283 a) Par "physique "· nous pouvons entendre les recherches désignées auj.ourd'hui par ce mot; mais il est préférable de le prendre au s-ens ancien ou étymologique et de comprendre sous le nom de « phyt::ique " l'étude de la nature, c'est-à-dire de tout le réel dont n.ous avons l'expérience, de 1 'homme et des vivants aussi bien que de la matière brute.

La physique s'édifie par les procédés de la science expérimentale.

Elle part de l'observation et se fonde définitivement sur elle.

Sans doute, Je raisonnement y joue un rôle capital, mais ses conclusions sont constam­ ment soumises au contrôle de l'expérience.

b) La notion de métaphysique est moins nette : la métaphysique a pour objet, dit-on d'après la signification littérale du mot, ce qui est au-delà de la physique; mais quel est cet au-delà" ;\"ons pouvons y distinguer deux parties : d'abord l'être en tant que tel, c'est-à-dire abstraction faite des déterminations particulières qu'il prend dans le.s êtres individuels; ensuite, les explications et les causes dernières des phénomènes et des êtres dont nous avons l'expérience.

La première partie constitue 1 'ontologie ou méta­ physique générale; la seconde, dénommée autrefois métaphysique spéciale, est aujourd'hui appelée " métaphysique " tout court.

Co,mme la physique, la métaphysique part bien de 1 'observation, faute de laquelle nous n'aurions aucune idée, mais elle observe le réel et élabore les données de 1 'observation d'une tout autre manière.

Tandis que le physicien est attentif au phénomène concret, le métaphysicien cherche l'essence constitutive des choses, et pour cela procède à des abstrac­ tions radicales destinées à éliminer l'accidentel pour ne retenir que l'essentiel.

Tandis que le premier reste systématiquement sur le ter­ rain des faits, n'aspirant qu'à une connais.sance plus approfondie de ce qui est, le second s'élève au niveau du droit, du nécessaire, de ce qui ne peut pas ne pa.s être.

Aus·si, oomme c'est dans la pensée que nous expérimentons la nécessité, la métaphysique est-elle orientée vers.

l 'esp.rit, tandis que la phys:que, même dans l'acception la plus large de ce mot, est tournée vers le monde matériel et sensible.

La donné.e ~sensible est le critère dernier du :phy,sicien : seules s.ont retenues les hypothèses qu'elle c.onfi!"'llle.

En métaphysique, au contraire, le levier essentiel de la preuve est un principe rationnel, principalement le principe de non-eontradiction qu'on formule ainsi : la même chose ne peut pa·s à la fois être et n'être pas, ou bien : le contradictoire, l'absurde, est impos,sible.

Sans doute, il est des métaphysiques.

intuitives qui pré­ tendent atteindre immédiatement les essences univers,elles des choses, les normes néces·sai·re·S du réel; mai.s ces intuitions, si elles ne sont pas illusoires, restent essentiellement personnelies et inc{)mmu[licables; par suite, elles ne sont pas susc~ptibles du contrôle que les physicien•s exercent constamment le~.> uns sur les autre.

Il y a donc une différence capitale entre la physique et la métaphysique, si bien qu'on se demande c.omment la première peut redouter les empiéte­ ments de la seconde.

Pour le comprendre, il faut faire appel à l'histoire.

B.

Explication historique.

- Jusqu 'aux temps modernes, toutes les sciences étaient englobées dans la philosophie; dans une lettre à lluYGIIENS, par exemple, DESCARTES parle des «matières de philos,ophie telles que sont les sons et la lumière " (1).

Par suite, on y faisait intervenir des méthodes (1) Lettre du pr noYembre 1635.

Correspondance, Edition Adam et l\lilhaud, t.

I, p.

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