« La philosophie n'est plus aujourd'hui une tentative pour augmenter la quantité du savoir humain, elle est une réflexion sur la qualité de ce savoir. » Expliquez et au besoin discutez cette formule de L. Brunschvicg.
Publié le 15/09/2014
Extrait du document
«
B.
Aujourd'hui, la philosophie n'a plus pour fonction que
de
réfléchir sur la qualité de notre savoir, c'est-à-dire d'étudier
la nature et le processus de la pensée humaine afin de déter
miner sa valeur.
Cette révolution dans la conception de la philosophie
remonte à Kant qui
la compare lui-même à celle qu'effectua en
astronomie la substitution de l'hypothèse héliocentrique à !'hy
pothèse géocentrique.
Avant de se fier aux connaissances que
nous avons des objets,
dit l'auteur de la "Critique"· il faut
déterminer la capacité de l'esprit à nous faire connaître ces
objets.
Or, l'enquête instituée à cet effet aboutit, prétend-il, à
l'impossibilité pour l'esprit humain de parvenir à une connais
sance objective de
cet au-delà de l'expérience considéré com
me
l'objet propre de la philosophie.
Celle-ci en reste donc là
et se borne à une réflexion critique de l'esprit sur lui-même
pour déterminer la nature et la valeur de ses opérations ; elle
n'augmente nullement la quantité de notre savoir.
Cette restriction de la métaphysique à la réflexion critique
de l'esprit sur lui-même a profondément modifié l'atmosphère
générale des autres parties de
la philosophie et même des
autres sciences, moins soucieuses d'acquérir un savoir nouveau
que de s'assurer de la
qualité du savoir acquis.
Ainsi, le logicien ne prétend pas nous apprendre les règles
absolues de la pensée rationnelle : partant des processus de
pensée observés
en lui-même, il cherche à déterminer les exi
gences mentales qui
viennent de la constitution contingente du
langage et celles qui tiennent à l'essence même de la raison.
Dans
l'exposé des méthodes scientifiques, il ne légifère pas
"a priori " : il se contente d'observer comment procèdent les
savants, et c'est par réflexion sur leurs procédés qu'il juge de
leur valeur et parvient à construire une méthodologie.
De même le moraliste ne prétend pas déduire de principes
fixés une
fois pour toutes la conduite à tenir dans les diverses
circonstances
de la vie.
Il part de la morale qui existe : celle
qui est impliquée dans les réactions spontanées de la con
science,
celle qui se formule à l'occasion d'un événement par
ticulier, comme celle qu'exposent les traités spéciaux.
Réflé
chissant sur des comportements de
l'homme et les comparant
entre eux, il
aboutit à une classification qualitative qui constitue
une morale.
Cette attitude réflexive et critique, loin d'augmenter la
quantité du savoir humain, le diminue au contraire en réduisant
un certain nombre de
certitudes au rang de simples opinions,
de préjugés
ou même d'illusions..
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