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La philosophie est-elle un art ?

Publié le 17/02/2004

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philosophie

PHILOSOPHIE (gr. philo, désirer; sophia, savoir) Étymologiquement, « amour de la sagesse ». Cependant, la sagesse n'étant qu'un art de vivre, la définition commune de la philosophie comme sagesse" est critiquable. En effet, sophia désigne en fait moins un savoir empirique adapté à la conduite de la vie qu'un savoir abstrait. En ce sens, la philosophie est essentiellement élévation de la pensée, théoria, contemplation. Cependant, comme l'indique l'allégorie de la caverne de Platon, le philosophe ne quitte le monde sensible que pour y redescendre, puisqu'il lui revient de gouverner la cité idéale. S'il s'agit de s'exercer à l'abstraction, il faut ne pas s'y perdre. Or, si la philosophie ancienne reste encore marquée par l'opposition de la contemplation (théoria) et de l'action (praxis"), la philosophie moderne est plutôt soucieuse d'abolir cette distinction, comme le signale le projet cartésien de « nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature ». Elle cesse alors d'être un savoir désintéressé pour se mettre au service de la construction d'un monde régi par la science". Du coup, elle risque ou bien de devenir une spécialité comme les autres, ou bien, refusant cette spécialisation, de passer pour une activité dilettante réservée à quelques dandys de la pensée. Telle est l'aporie du philosophe contemporain : rester un généraliste sans sombrer dans l'insignifiance. Dès lors, pour éviter ce piège, la philosophie doit affirmer son sérieux par la prudence d'un jugement née de l'accumulation du savoir. Elle devient ainsi histoire de la philosophie, non pas connaissance érudite des doctrines, mais plutôt éveil de la pensée à elle-même à partir de ce qu'ont pensé les autres. Le développement de la philosophie peut alors se comprendre comme celui de la vérité à travers les différents moments nécessaires à son déploiement. Cette définition dialectique, proposée par Hegel, permet de saisir la nécessité rationnelle qui gouverne l'histoire de la philosophie : le philosophe est fils de son temps, et comme ceux d'hier, il lui revient de répondre aux besoins de son époque. La philosophie ne se réduit donc pas à ses oeuvres qui sont comme les tombeaux de la philosophie passée : elle est essentiellement vivante dans l'activité présente de penser, qu'exprime magnifiquement tout enseignement où le maître, à la manière de Socrate, requiert la participation du disciple.

ART (lat. ars, habileté, talent, savoir-faire)

Soit syn. de technique, ou savoir-faire constitué d'un ensemble de procédés visant un résultat pratique (ex. des arts et métiers), soit syn. de beaux-arts, terme qui désigne la pratique artistique en tant qu'elle produit une oeuvre incarnant la beauté selon des règles propres au génie de son auteur. Dans le premier cas, « art »," se distingue de science et de nature. Dans le second, « art » se distingue depuis le xviiie siècle d'artisanat.

philosophie

« 1.

ilA iPHilOSOPHIE COMME ANCIUA JESTHETICA: 1.

Que la philosophie soit un art, voilà qui n'est pas douteux : il existe un art de philosopher, comme il y a un art de vivre, comme il y a un art de la fugue ou un art rhétorique ou un art poétique ...

ou un art de la dis­ sertation.

2.

Mais, alors, n'est-ce point confondre art et techni­ que ? N'est-ce pas jouer sur les mots? Même dans ces conditions, cependant on peut dire que l'art est la consi­ dération centrale de la philosophie, s'il est vrai que l'expérience sensible, fragmentaire et diffuse, ne nous renseigne guère sur la réalité, tandis que Jo connaissance scientifique, dans sa généralisation desséchante, et sa rationa·lité abstraite, ne nous permet pas de saisir le réel en tant que tel; en sorte que seule l'expérience esthétique constituerait le repère central de la philoso­ phie, 'la connaissance en ·soi et pour soi d'une réalité universelle et concrète, générale et unique, rationnelle et singulière tout à la fois.

Mais de même, l'art possède une philosophie implicite : l'objet d'art est un sujet de réflexion, de méditation, non point seulement pour le philosophe, mais pour le créateur qui s'interroge sur son œuvre.

Il suffirait de lire, par exemple, les Entretiens sur l'Art de Rodin, recueillis par Gsell, et publiés aux éditions Bernard Grasset, pour se rendre compte de la façon dont un artiste sans aucune espère de culture philoso­ phique peut être plus philosophe encore que des méta­ physiciens professionnels ! Rodin, en effet, touche immé­ diatement au cœur de la spéculation philosophique en analysant par exemple l'Homme qu·i marche, Le·s Bo,ur­ geois de Calais ou l'Eternel Printemps, car .jJ retrouve sous le sensible apparent l'intelligible, la quintessence de ·la réalité matérielle.. »

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