LA PERSONNE SELON MAINE DE BIRAN
Publié le 24/03/2015
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TEXTE
Nous trouvons bien aussi profondément empreinte en nous la notion de cause ou de force ; mais avant la notion est le sentiment immédiat de la force, et ce sentiment n'est autre que celui de notre existence même dont celui de l'activité est inséparable. Car nous ne pouvons nous connaître comme personnes indi¬viduelles, sans nous sentir causes relatives à certains effets ou mouvements produits dans le corps organique. La cause ou force actuellement appliquée à mouvoir les corps est une force agissante que nous appelons volonté : le moi s'identifie complètement avec cette force agissante. Mais l'existence de la force n'est un fait pour le moi qu'autant qu'elle s'exerce, et elle ne s'exerce qu'autant qu'elle peut s'appliquer à un terme résistant ou inerte. La force n'est donc déterminée ou actualisée que dans le rapport à son terme d'application, de même que celui-ci n'est déterminé comme résistant ou inerte que dans le rapport à la force actuelle qui le meut, ou tend à lui imprimer le mouvement. Le fait de cette tendance est ce que nous appelons effort ou action voulue
ou volition, et je dis que cet effort est le véritable fait primitif du sens intime. Seul, il réunit tous les caractères et remplit toutes les conditions analysées précédemment.
Il a le caractère d'un fait, puisque la puissance ou la force qui effectue ou tend à effectuer les mouvements du corps se distingue nécessairement du terme inerte, qui résiste, même en obéissant, et ne peut pas plus se confondre avec lui, en tant qu'elle agit, que s'en séparer absolument pour se concevoir ou se saisir elle-même, hors de tout exercice. Le fait est bien primitif, puisque nous ne pouvons en admettre aucun autre avant lui dans l'ordre de la connaissance, et que nos sens externes eux-mêmes, pour devenir les instruments de nos premières connaissances, des premières idées de sensation, doivent être mis en jeu par la même force individuelle qui crée l'effort. Cet effort primitif est de plus un fait de sens intime ; car il se constate lui-même intérieurement, sans sortir du terme de son application immé
diate et sans admettre aucun élément étranger à l'inertie même de nos organes. Il est le plus simple de tous les rapports, puisque
toutes nos perceptions ou représentations extérieures s'y réfèrent comme à leur condition primitive essentielle, pendant qu'il n'en suppose aucune autre avant lui et qu'il entre dans toutes comme élément formel ; puisque enfin, le jugement d'extériorité, que plusieurs philosophes ont considéré comme le véritable rapport simple et fondamental, repose sur lui comme sur sa base propre et n'en est lui-même qu'une extension. Enfin il est le seul rapport fixe, invariable, toujours identique à lui-même, puisque n'ad¬mettant aucun élément variable, étranger ; il est le résultat constant de l'action d'une seule et même force déployée sur un seul et même terme.
(Maine de Biran, Essai sur les fondements de la psychologie.)

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ou volition, et je dis que cet effort est le véritable fait primitif
du sens intime.
Seul, il réunit tous les caractères et remplit
toutes les conditions analysées précédemment.
Il a le caractère d'un fait, puisque la puissance ou la force qui
effectue
ou tend à effectuer les mouvements du corps se distingue
nécessairement
du terme inerte, qui résiste, même en obéissant,
et ne peut pas plus se confondre avec lui, en tant qu'elle agit,
que s'en séparer absolument pour se concevoir ou se saisir elle
même, hors de tout exercice.
Le fait est bien primitif, puisque
nous ne pouvons en admettre aucun autre avant lui dans l'ordre
de la connaissance, et que nos sens externes eux-mêmes, pour
devenir les instruments de nos premières connaissances, des
premières idées de sensation, doivent
être mis en jeu par la
même force individuelle qui crée l'effort.
Cet effort primitif est
de plus un fait de sens intime ; car il se constate lui-même
intérieurement, sans sortir du terme de son application immé
diate et sans admettre aucun élément étranger à l'inertie même
de nos organes.
Il est le plus simple de tous les rapports, puisque
toutes nos perceptions ou représentations extérieures s'y réfèrent
comme à leur condition primitive essentielle, pendant qu'il n'en
suppose aucune autre avant lui et qu'il entre dans toutes comme
élément formel; puisque enfin, le jugement d'extériorité, que
plusieurs philosophes ont considéré comme le véritable rapport
simple et fondamental, repose sur lui comme sur sa base propre
et n'en est lui-même qu'une extension.
Enfin il est le seul rapport
fixe, invariable, toujours identique à lui-même, puisque n'ad
mettant aucun élément variable, étranger ; il est le résultat
constant de l'action d'une seule et même force déployée sur
un seul et même terme .
COMMENTAIRE
(Maine de Biran, Essai sur les fondements
de la psychologie.)
a) Présentation du texte
Ce texte nous livre l'essentiel de la méthode biranienne (qui
repose sur l'observation du sens intime, de ce qui est donné à la conscience du philosophe qui réfléchit).
Il nous fait connaître
en même temps sa doctrine spiritualiste, le «fait primitif» c'est
167.
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