La pensée est-elle un processus algorithmique ? (Leibniz)
Publié le 27/01/2020
Extrait du document
« Je voulais montrer qu'à côté des catégories qui font référence à des classes de concepts simples, il doit y avoir une nouvelle sorte de catégorie qui embrasse les propositions elles-mêmes ou les termes complexes dans leur ordre naturel. A cette époque-là je n'avais aucune idée des méthodes de preuve, et je ne savais pas que ce que j'étais en train de proposer était déjà fait par les géomètres quand ils arrangent leurs propositions dans un ordre consécutif de telle façon que dans une preuve une proposition procède d'autres propositions d'une façon ordonnée... Je suis arrivé par une sorte de nécessité interne à une réflexion d'une importance étonnante : il faut inventer, pensai-je, un alphabet des pensées humaines, de telle sorte qu'à travers les connexions de ses lettres et l'analyse des mots formés avec elles, tout puisse être découvert et jugé. Cette inspiration me donna une joie rare qui était bien évidemment prématurée car je n'avais pas encore saisi la véritable signification de la question... Le hasard a fait qu'à 20 ans j'ai dû écrire une dissertation académique ; j'écrivis alors la dissertation sur l'“ars combinatoria\", livre publié en 1666 ; ainsi mon étonnante découverte est devenue publique. »
Leibniz, Vers une caractéristique universelle, 1677, rééd. in: Leibniz Sélections, éd. par Philip Wiener, Charles Scribner's Sons, New York, 1951, pp. 19-20.
«
Textes commentés 43
Dans la Caractéristique universelle de Leibniz on peut distinguer (1)
un aspect métaphysique, le système de caractères primitifs qui
représentent les concepts simples, l'alphabet des pensées, et (2) un
aspect logique, un moyen de démonstration et d'invention, le calcul du
raisonnement.
La caractéristique universelle permettrait de remplacer
l'effort en vue de l'obtention d'une connaissance par un calcul
analytique.
Adoptant une sorte de pythagorisme, Leibniz croyait que
les choses ainsi que les concepts qui les décrivent sont comme les
nombres.
Or un nombre donné peut être obtenu par une combinatoire
d'autres nombres.
Si nous considérons les concepts comme des atomes
de signification, il devient possible de combiner des concepts
relativement simples pour former des concepts ou de propositions
relativement complexes.
Ainsi - et ceci est capital pour la procédure
logique de la déduction - les propositions concernant les choses
complexes peuvent être dérivées des propositions concernant leurs
constituants plus simples grâce à une combinatoire comparable à la
multiplication de nombres.
La combinatoire comporterait plusieurs
niveaux, en allant des combinaisons les plus simples entre les concepts
fondamentaux, aux combinaisons de propositions les plus complexes.
Il faudrait donc découvrir les concepts fondamentaux impliqués dans
toute existence possible.
Le développement du calcul logique (ou
logique mathématique) dû à Frege, à Peano et à Russell est un
accomplissement partiel du rêve grandiose de Leibniz dans le domaine
des sciences formelles.
Frege utilisa son calcul pour essayer de dériver
l'arithmétique de la logique pure.
En lisant Leibniz, on prend conscience que la logique et la déduction
ont un sens plein quand on les met au service d'un grand objectif utile à
l'homme.
Celui de Leibniz était rien de moins que réduire à un calcul
les vérités de raison dans tous les domaines (mathématiques, sciences
de la nature, philosophie et théologie) de façon à résoudre tout
problème à coup de preuves formelles.
Ceux qui consacrent leur vie à
la logique n'abandonnent pas complètement l'espoir de Leibniz (bien
qu'il reste, chez eux, secret.).
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Expliquer cette pensée de Leibniz : « Que les principes entrent dans toutes nos pensées, et qu'ils sont nécessaires pour penser, comme les muscles et les tendons le sont pour marcher, quoiqu'on n'y pense point. » ?
- Commentez cette pensée de Leibniz : « La justice est la charité du sage » ?
- Pensée heuristique et pensée algorithmique. La cybernétique.
- Examiner cette pensée de Leibniz : « La justice n'est au fond que la charité reconnue par la sagesse ».
- PROCESSUS DE PENSÉE CHEZ L'OBSESSIONNEL (psychanalyse)