La passion est-elle une erreur ? une faute ? un pêché ?
Publié le 20/03/2015
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«
Dissertations 61
ou l'ambition pourraient être en eux-mêmes plus déraisonnables qu'une
grippe, qui n'est pas une erreur mais un fait.
C'est pourquoi
il paraît
nécessaire de se demander
si la passion est vraiment une erreur.
I - Passion et ignorance
a) L'homme en proie à une passion est amené à se comporter
partialement à l'égard de lui-même.
Il ne prend en compte qu'une partie de
ses désirs et sacrifie la plupart d'entre eux sur l'autel de sa passion.
Rien,
par exemple, n'effraye le
joueur tant que sa frénésie l'étreint.
Il sent
pourtant confusément qu'il néglige une partie de lui-même qui, pour être
moins tumultueuse que sa passion, n'en est pas moins profonde.
L'homme
passionné se montre par conséquent aussi injuste à l'égard de lui-même
qu'avec son entourage.
La passion, par laquelle un homme méconnaît la
totalité de ses désirs, apparaît en ce sens comme un rétrécissement du
champ de la conscience, comme une moindre conscience.
b) Car le passionné
ne connaît pas non plus l'origine de son désir: il croit
chercher librement l'objet qui obnubile ses pensées et rien ne lui semble
plus absurde que l'idée que son désir
ne lui appartienne pas vraiment.
Tout
montre pourtant que l'homme en proie à sa passion est l'esclave de celle-ci,
qu'elle le possède et qu'il ne la possède pas.
L'illusion amoureuse illustre
parfaitement cette dépossession du sujet.
« La procréation de tel enfant
déterminé, écrit Schopenhauer, voilà le but véritable, quoique
ignoré des
acteurs,
de tout roman d'amour: les moyens et la façon d'y atteindre sont
choses accessoiresl.
» Aussi l'amoureux passionné est-il victime d'une
illusion ; son désir n'est pas vraiment le sien, mais celui de l'espèce qui
cherche à se reproduire à travers lui.
c) Ignorance de soi, la passion est aussi ignorance de son véritable objet.
On sait qu'aux yeux de Pascal, l'homme n'aime que les qualités de l'objet de
sa flamme.
De sorte que même
si chacun prétend pouvoir dire comme
Montaigne :
« parce que c'était moi, parce que c'était lui », la singularité de
la personne
« aimée » échappe toujours au sentiment amoureux.
Nous
n'aimons personne en particulier.
Méconnaissance de soi, ignorance de la
source du désir et de son objet, tout apparente la passion à une erreur.
II -La passion peut-elle être considérée comme un jugement ?
a) Cette description peut sembler convaincante.
Elle ne contient pourtant
aucune définition réelle des termes assimilés.
Qu'est-ce donc qu'une
1.
Le Monde comme volonté et comme représentation.
p.
1290 - nous soulignons..
»
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