La maîtrise de soi dépend-elle de la connaissance de soi?
Publié le 08/04/2005
Extrait du document
«
Pour Hume, philosophe empiriste, on ne peut connaître le moi.
ON ne connaît que les idées qui s'y rapportent.
Hume, Traité de la nature humaine, livre I, 4 ème partie, section 6 :
« Toute idée réelle doit provenir d'une impression particulière.
Mais le moi, ou la personne, ce n'est pas uneimpression particulière, mais ce à quoi nos diverses idées et impressions sont censées se rapporter.
Si uneimpression donne naissance à l'idée du moi, cette impression doit nécessairement demeurer la même, invariablement,pendant toute la durée de notre vie, puisque c'est ainsi que le moi est supposé exister.
Mails il n' y a pasd'impression constante et invariable.
La douleur et le plaisir, le chagrin et la joie, les passions et les sensations sesuccèdent et n'existent jamais toutes en même temps.
Ce ne peut donc pas être d'une de ces impressions, ni detoute autre, que provient l'idée du moi et, en conséquence, il n'y a pas une telle idée.
»
2) On peut avoir conscience de soi mais ce n'et pas encore en avoir connaissance
Kant, Critique de la raison pure, I, 1 ère division, II, 1 ère section, §25 :
« J'ai conscience de moi-même, - dans la synthèse transcendantale du divers des représentations engénéral, par conséquent dans l'unité synthétique originaire de l'aperception, - non pas tel que je m'apparais, ni telque je suis en moi-même, mais seulement conscience que je suis.
Cette représentation est une pensée , et non une intuition .
[...] Je n'ai donc aucune connaissance de moi tel que je suis , mais je me connais seulement tel que je m'apparais à moi-même.
La conscience de soi-même n'est donc pas encore, il s'en faut, une connaissance de soi- même.
»
Kant nous dit ici que j'ai conscience que je suis et pas de ce que je suis ; cette conscience n'est pas uneconnaissance.
Comment alors réussir à se maîtriser, si on ne parvient pas à se connaître, à connaître ce qu'il y a àmaîtriser ?
III – « Connais-toi toi-même »
1) Accepter de ne pas savoir
Platon, Apologie de Socrate, 20d-22b :
« Or, un jour qu'il était allé à Delphes, il osa poser à l'oracle la question que voici – je vous en prie encoreune fois, juges, n'allez pas vous récrier -, il demanda, dis-je, s'il y avait au monde un homme plus sage que moi.
Orla pythie lui répondit qu'il n'y en avait aucun.
Et cette réponse, son frère, qui est ici, l'attestera devant vous,puisque Khairéphon est mort.
[...] Lorsque j'eus appris cette réponse de l'oracle, je me mis à réfléchir en moi-même : « que veut dire le dieu et quel sens recèlent ses paroles ? Car moi, j'ai conscience de n'être sage ni peu niprou.
Que veut-il donc dire, quand il affirme que je suis le plus sage ? Car il ne ment certainement pas ; cela ne luiest pas permis.
» Pendant longtemps je me demandai quelle était son idée ; enfin je me décidai, quoique à grandpeine, à m'en éclaircir de la façon suivante : je me rendis chez un de ceux qui passent pour être des sages, pensantque je ne pouvais mieux que là, contrôler l'oracle et lui déclarer : « cet homme-ci est plus sage que moi, et toi, tum'as proclamé le plus sage.
» J'examinai donc cet homme à fond.
[...] Il me parut en effet, en causant avec lui, quecet homme semblait sage à beaucoup d'autres et surtout à lui-même, mais qu'il ne l'était point.
J'essayai alors de luimontrer qu'il n'avait pas la sagesse qu'il croyait avoir.
Par là, je me fis des ennemis de lui et de plusieurs desassistants.
Tout en m'en allant, je me disais en moi-même : « je suis plus sage que cet homme là.
Il se peutqu'aucun de nous deux ne sache rien de beau ni de bon ; mais lui croit savoir quelque chose, alors qu'il ne sait rien,tandis que moi, si je ne sais pas, je ne crois pas non plus savoir.
Il me semble donc que je suis un peu plus sage quelui par le fait même que ce que je ne sais pas, je ne pense pas non plus le savoir ».
»
Savoir qu'on ne sait pas est un premier pas vers la sagesse.
C'est aussi la première chose à connaître sursoi.
2) Se connaître comme ne sachant pas
Platon, Charmide, 164d – 167a :
« Critias : J'aurais même presque envie de dire que se connaître soi-même, c'est cela la sagesse, et je suisd'accord avec l'auteur de l'inscription de Delphes [...] Voilà en quels termes, différents de ceux des hommes, le dieus'adresse à ceux qui entrent dans son temple, si je comprends bien l'intention de l'auteur de l'inscription.
A chaquevisiteur, il ne dit rien d'autre, en vérité, que : « Sois sage ! » Certes, il s'exprime en termes un peu énigmatiques, ensa qualité de devin.
Donc, selon l'inscription et selon moi, « connais-toi toi-même » et « sois sage », c'est la mêmechose ! [...].
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- La maîtrise de soi dépend elle de la connaissance de soi?
- Stoïcisme: Le bonheur est la maîtrise de ce qui dépend de nous
- La connaissance ne dépend-elle que de l'entendement ?
- La beauté de l'art dépend-elle de la maîtrise technique d'un matériau ?
- Connaissance et maîtrise du désir ?