La liberté n'est-elle pas un fardeau qui est source d'angoisse ? Le bonheur ne se réduit-il pas à la joie éphémère ?
Publié le 25/05/2012
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N’est-il pas surprenant, pour ne pas dire scandaleux, de demander si nous souhaitions être tout à la fois être libre et heureux ? Qui souhaiterait être esclave et malheureux ? Il est un truisme, une évidence qui roule sur le mode du va-de-soi que tout individu veut à la fois la liberté et le bonheur. La liberté n’est-elle pas en elle-même bonheur ? Le bonheur n’est-il pas avant tout liberté ? La liberté par le bonheur ou le bonheur par liberté ? Le bonheur en soi n’implique-t-il pas d’emblé la liberté ? Mieux, la liberté n’est-elle pas la vie heureuse ? Le bonheur, la vie heureuse ne réside-t-elle pas dans la liberté de coïncider avec soi, autrui, le monde ? Liberté et bonheur ne font qu’un. Et pourtant, en régime de quotidienneté, la notre liberté et bonheur connaît des contrariétés. La liberté n’entre-t-elle pas en conflit avec le bonheur ? Etre libre, n’est-ce pas réaliser tous nos désirs ? Mais alors autrui, l’autre, celui que je ne suis pas n’entre-t-il pas en conflit avec mon propre désir d’être heureux ? De facto, la liberté mienne n’est-t-elle pas incompatible avec mon propre bonheur ? Le bonheur comme vrai bonheur n’est pas ma seule propriété. Que serait un bonheur, mon bonheur comme simplement le mien ?
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qui sont miennes, mais par ma volonté et ma connaissance de ce que je suis, je peux m’en délivrer.
Aussi
liberté et bonheur sont un et une même chose.
La liberté est condition de mon bonheur comme le bonheur
e st condition de l’exercice constant de ma liberté.
Ce n’est pas là un idéal de sagesse abstrait et purement
formel .
C’est bien ce que reconnaît Kant.
Dans la Critique de la Raison pratique, (première partie, Livre
1, chapitre III), il soutiendra que bonheur n'est pas la jouissance, il est autre que la vie au point que par
rapport au bonheur « la vie avec tout son charme n'a plus aucune valeur ».
Mais cette liberté si liée au bonheur lui ap paraît comme la figure du Sage quelque peu désincarnée,
oublieuse des circonstances sociales d ans lesquelles nous sommes emprisonnés.
La liberté stoïcienne se
déploie sur l’ar rière fond sinon de la solitude du moins en faisant l’impasse de la présence de l ’autre, des
autres, de tous les autres.
Or, ma liberté n’est -elle pas en liaison avec l a liberté des autres ? Que serait, en
effet, la liberté heureuse dans un ile déserte ? Autrui n’est -il pas le fond à la fois qui entrav e ma libre e t c e
qui la possibilis te ? Mon bonhe ur ne tie nt-il pas a u bonheur de tous ? Marx condamnera vivement la
« robinsonnade » , c’est -à -dire l’idée d e s e refugier dans la totale solitude pour affirmer sa liberté absolu e.
Que serait un homme s eul , sinon un ê tre qui s e dépouiller ait de sa propre humanité pour s e réduire au rang
de chose parmi les choses ? « Un homme seul e st toujours mal accompagné ».
Cette incise dit bien que la
solitude e st la marque du malheur e t d e la disparition de la liberté .
Bonheur e t liberté ne prennen t se ns que
par et dans et pour la communauté .
C’est dir e que la lib erté comm e réalisation d e tous nos désirs dans la
solitud e e st la marqu e inévitable de notr e propr e malh eur.
Évide mment, nous somm es libres d e notr e
propre malhe ur, de la dé ses pérance d e devoi r survivre sans l es autr es.
Il faut e n appeler à Rou sseau qui a
parfaitement compris qu e dans l’état d e nature, conduit comm e une hypothès e de le cture, l’homm e de la
natur e, s eule m ent dép endant d es lois natur elle s, « dép endan t des chos es », est pourvu d’une lib erté
natur elle comm e pui ssanc e d e tout c e qu’il p eut atte indre.
Mais il précis e que l’homm e natur el dan s l’état
de
nature ne connaît ni bonhe ur ni malheur.
Il n’ est qu’un « animal stupide et borné » n’éprouvant ni l e
mal , ni l e bien .
L’homm e en sa naturali té ne p eut connaîtr e l e bonhe ur que plongé dans l’état social.
Aussi
l e s homm es n e pe uve nt conjugue r liberté et bonhe ur qu’au t erm e « d’un pacte d’association » s elon l eque l
la lib erté d e chacun pass e par la lib erté d e tous, garantissant la libe rté dans l e bonh eur d e tous.
Aussi
l’homm e socialisé con naîtra-t- il le bonhe ur par la libe rté.
Le droit rou sseauist e e st génér eux, mais on ne
pe ut inévitabl em ent pos er la qu estion du r elativisme du bonhe ur et d e la li berté.
Rouss eau est alors
confronté à un que stion de poids : que fai re de s enne mis d e la liber té ? C ’e st-à -dir e de ceux qui ne
partag ent pas l’idé e de c et te lib erté et celle du bonhe ur ? Comment contraindre l e s homm es à ê tr e lib res et
heureux ? Rouss eau s embl e pris dans un e impass e : comment concilie r la lib erté d e tous avec le bonhe ur
de tous ?
Faut-il conclur e à la manièr e de Kant que lib erté et bonheur sont inconcili ables ? N e sont -ils
possibl es que dans l’ét ernité ? Bonhe ur et libe rté ne sont -ils pas pour autant d es conditions de possibilités
de la condition humaine ? Pour le signifie r clairem ent bonhe ur et lib erté n e s e mérite nt-ils pas ?
Pour Kant, libe rté et bonhe ur se mari ent à c ette condition sine qua non que l’homm e fass e pr euv e
de bonne volonté et d e ration alité.
La lib erté n’ est pas une qualité, une propriété.
L’homm e n’ est pas libr e
comm e une tabl e e st c arrée ou rectangulair e.
E lle e st une tâch e, un de voir.
L’homm e ne naît pas libre , il
n’ est pas libr e, contrairement à ce qui est dit dans L a déclaration des droits et du l’homm e et du cito yen.
L’homm e s e doi t de de venir libr e.
E t son bonh eur ou son malheur lui apparti ennent en propr e.
Comme le
dira Sp inoza : « Ni pl eur er, ni gémir , mais comprendre » .
Seu l l’homme est résolument libr e de c e qu’il
e st, de ce qu’il d evi en dra.
Car l a liberté est un ave nir et non u ne chos e ou une qualité tout e fait e.
Assurém ent, la lib erté n’est pas la garantie du bonhe ur.
Il est m êm e un poi ds, un fardeau .
Mais pour
l’homme que nous sommes, il n’ en va pas moins d’ êtr e libr e d e notr e propr e bonhe ur..
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