La division du travail sépare-t-elle les hommes ?
Publié le 03/03/2005
Extrait du document
- 1) Justifications de la division du travail
- 2) Division du travail et inégalités sociales
- 3) La société réunifiée grâce au marxisme ?
«
du travail est purement technologique.«Tout enfant apprend très facilement à adapter ses mouvements au mouvement continu et uniforme de l'automate[...].
La rapidité avec laquelle les enfants apprennent le travail à la machine supprime radicalement la nécessité dele convertir en vocation exclusive d'une classe particulière de travailleurs.
Quant aux services rendus dans lafabrique par les simples manoeuvres, la machine peut les suppléer en grande partie et, en raison de leur simplicité,ces services permettent le changement périodique et rapide des personnes chargées de leur exécution.« La spécialité qui consistait à manier pendant toute sa vie un outil parcellaire devient la spécialité de servir, sa viedurant, une machine parcellaire.
On abuse du mécanisme pour transformer l'ouvrier, dès sa plus tendre enfance, enparcelle d'une machine qui fait elle-même partie d'une autre.
[...] Dans la manufacture et le métier, l'ouvrier se sertde son outil ; dans la fabrique, il sert de machine.
Là, le mouvement de l'instrument de travail part de lui ; ici, il nefaitque le suivre.
Dans la manufacture, les ouvriers forment autant de membres d'un mécanisme vivant.
Dans lafabrique, ils sont incorporés à un mécanisme mort qui existe indépendamment d'eux.« [...] En même temps que le travail mécanique surexcite au dernier point le système nerveux, il empêche le jeuvarié des muscles et comprime toute activité libre du corps et de l'esprit.
La facilité même du travail devient unetorture en ce sens que la machine ne délivre pas l'ouvrier du travail, mais dépouille le travail de son intérêt.
Danstoute production capitaliste en tant qu'elle ne crée pas seulement des choses utiles, mais encore de la plus-value,les conditions du travail maîtrisent l'ouvrier, bien loin de lui être soumises, mais c'est le machinisme qui le premierdonne à ce renversement une réalité technique.
Le moyen de travail converti en automate se dresse devantl'ouvrier, pendant le procès de travail même, sous forme de capital, de travail mort qui domine et pompe sa forcevivante.
La grande industrie mécanique achève enfin, comme nous l'avons déjà indiqué, la séparation entre le travailmanuel et les puissances intellectuelles de la production qu'elle transforme en pouvoirs du capital sur le travail.L'habileté de l'ouvrier apparaît chétive devant la science prodigieuse, les énormes forces naturelles, la grandeur dutravail social incorporées au système mécanique, qui constituent la puissance du Maître.« La subordination technique de l'ouvrier à la marche uniforme du moyen de travail et la composition particulière dutravailleur collectif d'individus des deux sexes et de tout âge créent une discipline de caserne, parfaitement élaboréedans le régime de fabrique.
Là, le soi-disant travail de surveillance et la division des ouvriers en simples soldats etsous-officiers industriels sont poussés à leur dernier degré de développement." [Le Capital, I.
I, t.
2, p.
102-106.]
• Ne peut-on cependant concevoir une société dans laquelle la division du travail ne produirait pas d'inégalités ?C'est en un sens ce qu'entrevoit Rousseau, mais de façon rétrospective, lorsqu'il décrit la seconde période del'histoire humaine, également la plus brève, celle du bonheur vécu dans les premières sociétés de l'homme «naturel».
Période heureuse en effet, où la propriété se justifie par le travail accompli, mais à l'intérieur de laquelle résidedéjà une source d'inégalité — qui est bien naturelle et non sociale puisqu'elle consiste simplement en la différence depuissance physique dont dispose chaque individu.
L'homme fort produit plus que le faible : il aura donc davantage àéchanger, et même si le second travaille aussi longtemps que le premier, c'est bien celui-ci qui deviendra plus riche.L'égalité, pour être maintenue, aurait dû être restaurée par de l'artifice, par une loi.
C'est ce que les hommes n'ontpas fait, et de là vient la catastrophe, soit la société moderne..
celle des riches et des pauvres, de l'aliénation auparaître, de la tyrannie.
• Marx est sans doute plus pessimiste puisqu'il ne conçoit pas (ou pasclairement on connaît son indécision à l'égard d'un communisme « primitif »)un tel moment d'équilibre social.
Cela ne l'empêche pas d'envisager«scientifiquement» les moyens par lesquels la division entre les hommes(entre les classes) pourrait disparaître.
Sans qu'il soit nécessaire de résumerici tout son programme politique, on peut souligner que la société réconciliéeou réunifiée sera la société communiste.
Or celle-ci est conçue commecomposée d'hommes entièrement nouveaux (en ce sens peu descriptibles àl'avance, du moins en termes positifs) ou, si l'on préfère d'hommes enfintotalement humains dans la mesure où ils ne connaîtrons plus aucunealiénation.
Cela signifie-t-il que la division du travail aura disparu ? Oui, ausens où, puisqu'elle était liée à l'existence des classes sociales, elle s'effaceraen même temps que ces dernières et où chaque individu deviendra capabled'être alternativement producteur et consommateur dans quelque domaineque ce soit.
• Le communisme de Marx est toujours en attente de réalisation, et semblede plus en plus utopique.
Même ses partisans continuent à se heurter àquelques difficultés majeures, comme de concevoir l'articulation nouvelle qu'ilimplique entre travail intellectuel et travail manuel.
Car cette forme de divisiondu travail paraît difficilement effaçable, malgré les efforts du régime soviétique pour faire émerge! dans les années trente, par exemple, une littérature ou des expressions artistiquesdirectement produites par les ouvriers ou paysans...
Dans la mesure où le travail intellectuel est rétribué selond'autres critères de valeur que le travail manuel, leur opposition semble devoir être une forme durable de séparationentre les membres d'une même société..
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