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La diversité des cultures vous semble-t-elle une "richesse inestimable" ?

Publié le 27/09/2005

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  II   A : Ainsi s'il nous est possible de parler de diversité culturelle c'est parce que nous sommes capables de déterminer ce qui fait culture. La culture semble être spécifique à l'homme. En effet la culture peut désigner cette disposition qu'à l'homme de développer ces facultés par l'éducation et par la vie en société. Ainsi la culture semble moins être pensée comme une opposition stricte à la nature, que comme son développement. La culture désignerait ce qui permet à l'homme de développer son humanité. Pour Kant la culture désigne cette faculté qu'à l'homme de se fixer ses propres fins. La culture est un phénomène essentiel pour Kant dans la mesure où elle permet l'avènement de la moralisation en développant les facultés humaines. La culture est donc ce qui permet à l'homme de parfaire ses dispositions naturelles, d'accomplir son humanité. Mais du coup ? si on comprend la culture en ce sens ne risque-t-on pas de refuser à certaines tribus qui vivent dans la forêt amazonienne, une humanité qui leur reviendrait de droit ?

Les sociétés démocratiques occidentales sont caractérisées par l’existence de plusieurs systèmes axiologiques ( systèmes de valeurs ) en leur sein, ce qui provoque des tensions dans la mesure où les différentes conceptions du Bien c’est-à-dire de la vie bonne adoptée par une communauté, peuvent entrer en conflit avec d’autres conceptions. Ainsi la diversité des cultures semble être de prime abord un facteur de conflit social. Mais cette vision pessimiste peut-elle être discutée ? Ne peut-on pas voir dans la diversité des cultures un moyen pour l’homme d’élargir sa connaissance et de comprendre ainsi ce qui fait son humanité ? En ce sens la diversité des cultures n’est-elle pas d’une richesse inestimable ? Une culture désigne l’ensemble des conduites, des représentations, et des mœurs déterminées par la société. Ainsi la culture est un phénomène social qui est spécifique à chaque société. Mais cette diversité culturelle peut être source de conflit quand des cultures différentes coexistent au sein d’une même société. Faut-il alors considérer qu’il est impossible pour l’homme de s’ouvrir à d’autres cultures sans éviter les conflits ? Mais s’il est possible de le faire que peut-on attendre de cultures différentes ? A travers les différentes cultures ne peut-on pas reconnaître ce qui fait notre humanité ?

« Durant des siècles, les différentes civilisations se sont souvent regardées avec méfiance ou mépris.

Albert Jacquard,qui a connu les excès tragiques du nazisme ou de la colonisation, écrit en 1978 dans son Eloge de la différence : «Les civilisations que nous avons nu-lies sont merveilleusement diverses et cette diversité constitue la richesse dechacun de nous ».L'individu qui se frotte vraiment à d'autres cultures n'en n oïl pas seulement une meilleure connaissance de lui-même: il on orl transformé par le jugement plus relatif qu'il porte sur sa propn culture, et se dote de moyens quiinfléchissent son avenir. La connaissance des civilisations, passées ou actuelles, nom permet de mieux comprendre la nôtre.Par exemple, une cinquantaine de cultures au moins se sonl épanouies, plus ou moins longtemps, sur le territoirefrançais.

Ligures, Celtes, Gaulois, Grecs, Romains, Germains, Teutons, Barbares, Huns, etc.

pour ne citer que lespremiers, ont façonné notre langue, légué des usages ou des conceptions du monde.Certes trois cultures passent pour avoir nettement marqué la nôtre : la grecque, la latine, et la religion chrétienne,née d'ailleurs à Jérusalem sur les racines juives de l'Ancien Testament.

Le droit qui organise notre société est latin,contrairement à la Grande-Bretagne, où il est anglo-saxon.

Mais il ne faudrait pas oublier d'autres origines.

Laphilosophie de Platon, qui a tant marqué la culture occidentale, a notamment des origines iraniennes.

La pratique dubain est arrivée d'Orient à l'occasion des Croisades, et au Moyen Âge l'amour courtois, dont Denis de Rougemontsouligne dans L'Amour et L'Occident l'influence déterminante sur nos comportements amoureux, est unsyncrétisme*.

Il naît à la fois de l'héritage des Celtes, de l'influence antique et d'une culture provençale quiemprunte elle-même au lyrisme* arabe.Ce qui est vrai de l'Europe ou de la France l'est également pour bien d'autres sociétés dans le monde : la place desTrois-Cultures, à Mexico, célèbre la fusion des civilisations aztèque et coloniale, d'où vient la culture mexicainemoderne.On comprend dès lors la richesse de ces influences variées qui se mêlent, aux degrés les plus divers, en chacun denous.

Les moyens modernes de transport et de communication contribuent d'ailleurs à perpétuer ces échanges, etnous trouvons naturel d'aimer la musique africaine, la cuisine japonaise ou les films américains.

Le « métissage »accéléré des cultures, selon l'expression utilisée par des écrivains pour ce phénomène très actuel, nous fait prendreconscience de ce qui a pu se passer autrefois, quoique plus lentement.Ainsi chaque individu, surtout à notre époque, accède à la fois aux cultures du passé et à celles d'aujourd'hui, etcomprend mieux d'où il vient, mais aussi pourquoi et comment il agit et pense.Il ne suffit pas de prendre conscience de la richesse des cultures qui s'entremêlent en nous.

Le contact avec lesautres civilisations est également l'occasion d'une réflexion sur nos comportements. Même si l'individu est un carrefour d'influences, il reste en général marqué par la culture plus précise dans laquelle ila été élevé.

La réflexion sur les us et coutumes étrangers amène alors à relativiser nos préjugés.Bien des cultures tirent orgueil de leurs réussites en tout genre, et sont persuadées d'être supérieures aux autres.Tel est le cas de la civilisation occidentale, qui a théorisé sa supériorité par les écrits de Joseph Arthur de Gobineaupar exemple, dont l'Essai sur l'inégalité des races humaines, de 1855, est favorable à la prédominance de l'hommenordique et germanique.

Mais elle a également voulu s'imposer, y compris par la force, chaque fois que sesconquérants ont rencontré des cultures différentes : Africains, Indiens d'Amérique, Esquimaux, etc.Cette tendance historique qui pèse en nous est d'ailleurs partagée par la majorité des hommes, comme nous lemontre l'étude des réactions d'autres peuples : dans Race et histoire, Claude Lévi-Strauss raconte que bien despopulations primitives se désignent d'un nom qui signifie « les hommes » ou « les bons, les excellents », et traitentles autres tribus de « méchants, singes de terre, œufs de pou ».

Au niveau individuel nous retrouvons souvent,presque inconsciemment, cette méfiance devant les différences.Inversement, une personne issue d'une culture manifestement opprimée et jugée inférieure ressent un malaiseprofond, car elle est partagée entre l'attachement à ses racines et la fascination exercée par le groupe dominant.Nous ne sommes donc vraiment enrichis par les autres cultures et nous ne connaissons bien la nôtre que si nousévitons les échelles de valeur inappropriées.

Ainsi le progrès technique spectaculaire qui caractérise la civilisationoccidentale actuelle s'accompagne de styles de vie qui perdent en harmonie avec la nature et sans doute enéquilibre affectif.

Les maladies modernes comme le stress ou l'abus de médicaments nous empoisonnent, lessolidarités familiales se dissolvent.

Albert Jacquard n'a donc pas tort de dire que des civilisations dites primitives ontdes leçons à nous donner, collectivement et individuellement.Cette prise de conscience de nos préjugés n'est pas nouvelle.

Grand voyageur et curieux de tout, contrairement àses contemporains qui, où qu'ils aillent, « se tiennent à leurs façons et abominent les étrangères », Montaigne futégalement l'un des premiers à dénoncer dans ses Essais la fatuité des Occidentaux face à leurs conquêtes enAmérique : la civilisation inca ou aztèque n'avait rien à leur envier par la « magnificence des villes de Cuzco et deMexico », ni par leur « hardiesse et courage », la « clarté d'esprit naturelle » dont témoignent leurs réponses durantles négociations.Plus tard Montesquieu dans les Lettres persanes, Voltaire dans L'Ingénu, Diderot dans le Supplément au voyage deBougainville ont également contribué à vaincre nos préjugés.

La lecture de leurs œuvres, qui comparent lescivilisations avec humour cl ironie, donne un modèle de la réflexion que chacun doit avoir. Une telle réflexion ne servirait à rien si elle n'orientait notre avenir.Il convient d'abord de préserver la diversité des cultures, en conservant les traces des civilisations disparues, enprotégeant les plus menacées d'une destruction brutale, en défendant contre des influences hégémoniques celles. »

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