LA DÉCOUVERTE DE L'HISTOIRE XVIIIe SIÈCLE VICO Jean-Baptiste (1668- r 744) Longtemps méconnue, l'oeuvre de ce juriste napolitain est pourtant celle d'un précurseur des philosophies modernes de l'histoire.
Publié le 21/10/2012
Extrait du document
«
MAISTRE Joseph de (1753-I82I) est l'auteur de : Considérations sur la France ( I 796) ; Essai sur le prin cipe générateur des Constitutions
Politiques et des autres Institutions humaines (1810); Du Pape (182o);
Les Soirées de Saint-Pétersbourg ( I 82 I); Correspondance diploma tique.
Térrwin et victime de la tourmente
révolutionnaire, profondément impressionné
par les
excès auxquels elle donna lieu,
Maistre a subi l' irifluence de la Révolu tion française dans le même sens que Bonald : sa doctrine s'est formée par
opposition à la philosophie sociale et
politique du xvm• siècle, dont elle
combat avec violence l'a priorisme ratio naliste, la prétention à construire ou à refaire la société et l'adhésion à la sou veraineté populaire.
Entre la pensée de Bonald et celle de Maistre, deux diffé rences : alors qu'il y a une teinte de gallicanisme chez Bonald, le tradition naZisme de Maistre, farouchement ultra
rrwntain, suppose, outre la restauration de la religion et de la monarchie, celle de la papauté dont la souveraineté est, à ses yeux, infaillible et absolue.
D'autre
part, plus sensible que Bonald à l'influence de Montesquieu et des considérations de l'Esprit des Lois sur l'adaptation des institutions à « l'esprit général » de chaque nation, Maistre manifeste une conscience plus grande de la relativité des structures politiques et de la diversité
des milieux.
A ces différences près, sa doctrine de l'ordre s'appuie sur la
même méthode et a les mêmes prolonge ments politiques que celle de Bonald.
Méthode historique, expérimentale, qui
doit constituer, à l'exclusion
de toute
autre méthode, une science et un art
politique valables : en dénonçant la
faiblesse de la raison théorique dans la philosophie politique du XVIII • siècle,
Maistre entend rrwntrer que les réalités
historiques sont seules sources de vérité : « L'histoire est la politique expé rimentale, c'est-à-dire la seule bonne ».
Et c'est au nom de la seule
efficience de la méthode historique en politique que Maistre s'élève contre la théorie de l'état de nature et du contrat
social.
La société n'est pas une association,
produit de la volonté humaine, mais une « agrégation autour d'un centre com mun », ce centre commun étant le souve rain, produit de l'évolution naturelle.
A la théorie de l'homme naturellement bon de Rousseau, Maistre oppose la conception chrétienne de l'homme perverti par le péché originel : c'est parce que « l'homme naît mauvais dans une partie de son essence » que des rivalités naissent et que s'impose la
nécessité du gouvernement.
Comme Hobbes,
Maistre pense qu'il existe un état de guerre entre les hommes.
Mais si la souveraineté est la conséquence inéluc table de la nature humaine, l'état de guerre est l'effet d'une grande loi du rrwnde spirituel.
Aussi bien la guerre a-t-
XIXe SIÈCLE
elle un caractère divin dans ses causes et
dans ses conséquences morales : Maistre oppose à la paix perpétuelle, annoncée au xvm• siècle, le sentiment très vif d'une nécessité naturelle liée au mal
radical de l'humanité coupable.
Doctrine du « gouvernement temporel de la Pro vidence », la théorie mystique de Maistre
admet cependant des limites humaines au pouvoir : si la souveraineté est fondée
sur un consentement des hommes, ce n'est qu'autant que le peuple consent à
obéir comme instrument à la volonté sur naturelle.
Dès lors est légitime n'importe
quelle forme de gouvernement (Tous
les gouvernements sont bons) à condition que le pouvoir, défenseur des réalités nationales issues, comme la société, de l'évolution naturelle, soit fort
et stable : la société est l'intermédiaire
qui
donne aux hommes la parole, mais
c'est l'Etat qui parle en toute souverai neti au nom des hommes.
D'où le procès fait aux constitutions écrites et aux
entreprises révolutionnaires : « L'art de réformer les gouvernements ne con siste pas du tout à les renverser pour les refaire sur des théories idéalistes ».
D'où la doctrine de l'ordre, seul soutien des institutions établies.
« Ce sont les abus qui font les révolutions, mais les
a bus valent infiniment mieux que les révolutions.
» D'où enfin le système
théocratique, qui entend déléguer au Pape, souverain absolu et irifaillible, le pouvoir de délier les sujets, en cas d' arbi traire, du serment d'obéissance envers leur souverain; détenteur d'un pouvoir
d'origine divine, le Pape doit assurer
l'ordre parmi les souverains, comme ceux-ci ont mission de maintenir les tradi tions et les institutions à l'abri du disordre.
En se proposant de restaurer la
valeur absolue de l'histoire, de la tradition, de la souveraineté de droit divin, la doctrine de Maistre apparaît comme une pure réaction contre l'idéologie révolution
naire du xvm• siècle.
Méthode expéri mentale, critique de l'individualisme,
réhabilitation de la société, respect des traditions et culte de la nation, la plu part des thèmes de Maistre devaient pro fondément influencer les idées politiques de Charles Maurras.
( P.H.)
BONALD Louis-Gabriel-Ambroise,
vicomte de (1754-1840) est l'auteur de : Théorie du pouvoir politique et religieux ( 1 796) ; Légis lation primitive, considérée dans les
derniers temps par les seules lumières de la raison ; Recherches philoso phiques sur les premiers objets des
connaissances morales.
Nul n'a condamné avec plus d'intransi geance et de dogmatisme la philosophie du xvm• siècle : la sévérité que Bonald rrwntre à l'égard de Montesquieu et de Rousseau n'a d'égale que sa haine de la
Révolution française dont il eut à souffrir en tant qu'émigré.
Horreur de la nova tion et du désordre, mais horreur aussi du rationalisme cartésien et de l'indivi- dualisme
issu
de la Réforme : animée
par un violent esprit polémique, la doc trine traditionaliste de Bonald est
l'archétype des sociologies de l'ordre.
Bonald adopte, il est vrai, le langage des philosophes qu'il s'applique à réfuter,
mais il lui donne une signification si radicalement différente que toute sa pensée apparaît comme le contrepied des théories du droit naturel et du contrat
social.
Pour Bonald, les hommes sont
mauvais par nature, bons par la société :
Rousseau a confondu état natif et état
naturel.
L'état natif est l'état originel,
celui de la faiblesse et de l'imperfection,
tandis que l'état naturel est l'état civilisé,
celui de l'accomplissement et de la force :
l'homme naturel est donc l'homme de la
société.
Si les constitutions sont naturelles, ce n'est plus parce qu'elles répondent au vœu de la nature, mais parce qu'elles
sont l'œuvre de Dieu, que la nature sup pose comme la loi suppose un législateur.
Chimère le contrat, puisque les hommes, si loin qu'on remonte dans le passé, ont
toujours été soumis à une autorité; les
institutions résultent d'autant moins d'un
contrat
qu'il faut, pour en régler les
formes, qu'existe au préalable un pou voir.
Absurde l'idée suivant laquelle la
loi est l'expression de la volonté générale :
pour Rousseau, la volonté générale s' iden tifie avec la volonté de tous; c'est une somme de volontés particulières dont la
diversité la distingue de la raison générale.
Il faut, au contraire, que la Société soit reconnue comme une réalité transcen dante aux individus.
Il faut aussi (ceci
s'adresse à Montesquieu) que le pouvoir
soit indivisible, hors de toute contesta tion : l'expérience de l'histoire dérrwntre qu'il ny a jamais eu de peuple vérita blement souverain.
Ainsi Bonald subs titue-t-il, comme fait constitutif de la
société, le Pouvoir au Contrat -pouvoir
qui préexiste à toute société et qui résulte
originellement de Dieu : la condition même de l'état social est la religion.
Dans cette philosophie théologique de la
société, conscience et individu sont aliénés,
au nom de l'ordre et des traditions, au
profit de la société.
La théorie de la
parole constitue le fondement de la doc trine bonaldienne : le langage est le moyen le plus primitif et le plus extérieur à la conscience individuelle par lequel la
vérité se communique dans la société;
c'est un don de Dieu, dont l'origine
nécessaire se dérrwntre en ce qu'aucune
société n'a pu exister sans lui et qu'il n'appartient pas aux hommes d'inventer « le nécessaire » par lequel ils sont, et
qui existe avant eux et hors d'eux.
Réa lisme social, fidèle au témoignage de l'histoire, mais qui prend tout son sens de ce que la société y apparaît comme servant de véhicule aux vérités révélées, la
doctrine de Bonald s'efforce d'opérer,
au nom de la religion, la liaison impos sible du rationalisme et du traditiona
lisme : elle croit l'entrevoir, mais c'est
du dehors, et demeure condamnée, suivant
les propres termes de Bonald, « à.
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