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La critique historique : Taine et Renan

Publié le 12/03/2022

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Ernest Renan (1823-1892) lui aussi distingue, mais sans les opposer, un Dieu qui est la « totale existence » et un Dieu qui est « en même temps l’absolu ». Synonymie de la totale existence, « Dieu sera plutôt qu’il n’est, il est in fieri, en voie de se faire », mais il est aussi le « lieu de l’idéal, le principe vivant du bien, du beau, du vrai ». A propos de la métaphysique : « Ne nions pas qu’il y ait des sciences de l’éternel; mais mettons-les bien en dehors de toute réalité. » Car toute réalité est en devenir. Ces formules achèvent l’importante lettre à Marcellin Berthelot d’août 1863 sur les sciences de la nature et sur les sciences historiques, et dans laquelle Renan se demandait : « Qui sait en un mot si la science infinie n’amènera pas le pouvoir infini selon le beau mot baconien : savoir, c’est pouvoir. » Ne serait-ce pas tout autant un souvenir de la formule de Comte : « Savoir pour prévoir, prévoir pour agir » ? L’esprit divin se révèle progressivement dans l’histoire de l’humanité. L’hégélianisme de Renan se combine curieusement avec ce qu’il faut bien appeler un scientisme. « Nous ressusciterons dans le monde que nous aurons contribué à faire [...] si c’est bien ce qu’a voulu dire Hegel, soyons hégéliens ! » Mais cette résurrection sera l’œuvre d’une science qui est positiviste et non pas dialectique. Les Dialogues philosophiques de 1876 ne démentent pas L’Avenir de la science de 1849 : « La science est le grand agent de la conscience divine. En tant que théorique, elle est l’univers se connaissant; en tant qu’appliquée, elle offre la force divine des moyens dont la puissance ne saurait être calculée. » Renan avait quitté le séminaire de Saint-Sulpice et renoncé à devenir prêtre en octobre 1845. C’est en 1848 qu’il rompt avec les milieux ecclésiastiques et qu’il est reçu premier à l’agrégation de philosophie. Il est envoyé en mission officielle en Italie par Falloux. Il venait d’écrire L’Avenir de la science. C’est une sorte de manifeste scientiste, acte de foi enthousiaste en la science capable de satisfaire à la fois les besoins matériels et spirituels de l’humanité. Mais il faut noter que la science est ici représentée surtout par les sciences philologiques et l'histoire, et que Renan affirme constamment le primat du spirituel sur le matériel.

« La critique historique : Taine et Renan Dans les dernières décennies du siècle, Taine et Renan occupent manifestement le devant de la scène intellectuelle. Leurs œuvres ont été les références obligées du débat contempo­ rain sur les rapports de la science, de la religion et de la poli­tique, mais elles apparaissent beaucoup plus historiques que philosophiques.

Renan est surtout connu pour ses travaux sur l'histoire des langues, sur La Vze de jésus (1863), qui fit scandale, sur l 'Origi,nes du christianisme (1863-1883).

Taine est avant tout l'auteur de l' Histoire de la littérature anglaise (1863) et surtout des Origi,nes de la France contemporaine (1875-1884) .• Il présente lui-même son livre De l'intelligence (1870) comme une œuvre de science qui ne comporterait que cinq ou six pages de philoso­ phie.

Sans doute le terme « critique » est-il très fréquemment uti­lisé, mais il ne s'agit ni du criticisme de Kant, ni du néocriticisme de Renouvier, encore moins de la critique philosophique de Cournot.

La critique est philologique, exégétique, et surtout his­torique.

Lorsque le jeune Renan écrit L'Avenir de la science (1849� publié en 1890), il pense aux recherches philologiques et histo­ riques.

Taine publie en 1858 un recueil d'articles sous le titre Essais de critique et d'histoire, les deux mots se déterminant l'un l'autre.

Auguste Comte n'avait-il pas prévu que ce siècle serait celui de l'histoire ? Il n'est pas étonnant que l'un et l'autre aient passé pour positi­vistes, bien malgré eux, simplement parce qu'ils n'adhéraient pas à la forme catholique du spiritualisme.

Il est plus surprenant. »

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