La conscience me fait-elle croire que je suis libre ou me le prouve-t-elle ?
Publié le 01/01/2015
Extrait du document
«
LA CONSCIENCE
moi être si grande, que je ne conçois point l'idée d'aucune autre plus
ample et plus étendue( ...
)
Car elfe consiste seulement en ce que nous
pouvons
faire une chose, ou ne fa faire pas (c'est-à-dire affirmer ou nier,
poursuivre ou fuir), ou plutôt seulement en ce que, pour affirmer ou nier,
poursuivre ou fuir les choses que l'entendement nous propose, nous
agissons en telle sorte que nous
ne sentons point qu'aucune force
extérieure nous y contraigne.
Car, afin que je sois fibre, if n'est pas
nécessaire que je sois indifférent à choisir
l'un ou /'autre des deux
contraires ; mais plutôt, d'autant plus que je penche
vers l'un, soit que je
connaisse évidemment que
le bien et le vrai s)I rencontrent, soit que Dieu
dispose ainsi l'intérieur de
ma pensée, d'autant plus librement j'en fais
choix et je
l'embrasse." (Méditations, IV)
2.
Un sentiment illusoire ?
a) Une croyance erronée
Mais de ce que la conscience me donne le sentiment d'être libre, puis-je
en déduire qu'elle me fait démontre que je suis réellement libre.
Non
répond Spinoza : se sentir libre n'est pas être libre.
La croyance en notre
liberté repose sur notre ignorance de nos déterminations, des causes
réelles qui nous font réellement agir.
(Cf.
les sujets 29 et 30).
b) La conscience réfléchie dénonce la liberté
C'est toujours la conscience immédiate qui me donne le sentiment que je
suis libre.
Mais la conscience réfléchie, celle qui recherche une
connaissance vraie des choses et de leur mécanismes, ruine
progressivement cette première impression.
Elle m'apprend en effet que le fonctionnement de l'esprit humain est d'une
extrême complexité, et que nous ignorons
largement les causes externes
et internes qui déterminent effectivement notre comportement.
Et c'est
parce que nous n'en avons pas conscience que nous
nous croyons libres.
Je décide, par exemple, d'aller me promener : cette décision m'apparaît
comme un acte libre.
Pourtant, à y réfléchir, ma décision résulte du
concours d'une
foule de causes que l'analyse multiplie presque à l'infini :
le temps qu'il fait, mes obligations socio-professionnelles, mon état
physiologique (fatigue, santé), etc.
; mais aussi de nombreuses autres
causes dont je n'ai sur
l'instant nullement conscience, voire dont je ne
peux pas prendre conscience (par exemple qui relèveraient de
l'inconscient au sens freudien).
Je crois choisir, mais en réalité mon choix
est
la résultante nécessaire et inévitable
de toutes ces causes.
154.
»
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