La connaissance de la vérité entraîne-t-elle nécessairement la disparition de l'illusion ?
Publié le 27/02/2008
Extrait du document
L'illusion ne
témoigne t-elle pas en faveur d'une part humaine définitivement récalcitrante à
la raison, n'est-elle pas le corrélat, négatif certes mais essentiel, du fait
que nous ne sommes pas des êtres de pure raison ?
III- L'illusion résiste à la vérité.
Il faut donc distinguer le pôle rationnel d'un pôle affectif et
sensible, non que leur séparation soit absolue, il y a des passages, des
incidences de l'un sur l'autre, mais il n'y a pas d'efficacité radicale et
garantie de la raison sur l'affectivité. On ne raisonne pas une illusion
amoureuse. La fin de l'illusion (si elle est possible, par exemple si c'est une
illusion sentimentale) est bien souvent provoquée par la lassitude, par un
mûrissement du sujet et non pas par l'acquisition d'une conviction rationnelle.
Le héro de A la recherche du temps perdu finit par se remettre d'une
illusion amoureuse et se surprend à constater qu'en fait la personne sur
laquelle il se fixait « n'était pas son genre » mais cette vérité, qui lui a été
assénée par ses amis n'est pas ce qui a rendu son sentiment caduc ; c'est la
déception qui l'a vaincu. Le complexe d'Œdipe, comme l'a montré Freud, est soit
naturellement dépassé soit résorbé par un travail de suggestion ou un
mûrissement tardif, mais son arrêt ne sera jamais provoqué par la connaissance
de la vérité, bien plutôt celle-ci ne sera pas reconnue par le sujet ou alors
elle le rendra fou tel Œdipe dans le mythe.
L'exemple canonique tiré des Essais de Montaigne illustre la
force de l'illusion : on suspend un philosophe dans une cage au dessus du vide,
quoique assuré, rationnellement, de ne pas tomber, il ne pourra s'empêcher de
craindre le vide et de ressentir un malaise dû à la vision du vide vertigineux
qu'il surplombe. On peut dire que cette dichotomie entre sensibilité et raison
ne peut être réduit à une faiblesse du pouvoir de la raison. Ne faut-il pas
plutôt y voir la richesse de l'existence telle qu'elle ne se résume pas à des
potentialités intellectuelles ?
Dire que la connaissance de la vérité contribue à dissiper nos illusions paraît être une tautologie : si je connais le vrai comment le faux peut-il encore m’abuser ? Pourtant un examen plus attentif du concept d’illusion nous révèle que l’efficacité de la connaissance n’est peut-être pas aussi forte qu’on le présuppose. L’illusion en effet n’est pas réductible à l’erreur, la tromperie qu’elle provoque n’est pas de part en part rationnelle. La connaissance de la vérité ne serait peut-être pas vaine pour autant mais certainement d’une portée plus modeste qu’on ne le penserait a priori.
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