La connaissance commune est-elle pour la connaissance scientifique un obstacle ou un point d'appui ?
Publié le 31/01/2004
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peut lui paraître dangereusement destructeur (que ce soit en science ou en philosophie...).Elle se contente d'allusions à l'expérience commune (non scientifique), dont les enseignements sont d'abordsinguliers ou personnels, mais se trouvent admis comme exemplaires ou rapidement généralisables, sans qu'il soitnécessaire de les éprouver à nouveau.
[III - La connaissance commune comme obstacle épistémologique]
Comparer les principaux caractères des deux connaissances, c'est constater sans attendre qu'elles s'opposent l'uneà l'autre.
Ainsi peut-on considérer que, pour la connaissance scientifique, la version commune de la connaissance nepeut jamais proposer un point d'appui, mais qu'elle constitue bien un obstacle.
« ...
Devant le réel le plus complexe, si nous étionslivrés à nous-mêmes c'est du côté du pittoresque, dupouvoir évocateur que nous chercherions laconnaissance; le monde serait notre représentation.Par contre si nous étions livrés tout entiers à lasociété, c'est du côté du général, de l'utile, duconvenu que nous chercherions la connaissance; lemonde serait notre convention.
En fait la véritéscientifique est une prédiction, mieux une prédication.Nous appelons les esprits à la convergence enannonçant la nouvelle scientifique, en transmettantdu même coup une pensée et une expérience, liant lapensée à l'expérience dans une vérification: le mondescientifique est donc notre vérification.
Au-dessus dusujet, au delà de l'objet immédiat la science modernese fonde sur le projet.
Dans la pensée scientifique laméditation de l'objet par le sujet prend toujours laforme du projet.
[...] Déjà l'observation a besoin d'un corps deprécautions qui conduisent à réfléchir avant de regarder, qui réforment du moins la première vision de sorte que ce n'est jamais la premièreobservation qui est la bonne.
L'observation scientifique est toujours une observationpolémique; elle confirme ou infirme une thèse antérieure.
Naturellement dès qu'on passe de l'observation à l'expérimentation, le caractèrepolémique de la connaissance devient plus net encore.
Alors il faut que le phénomène soittrié, filtré, épuré, coulé dans le moule des instruments...
Or les instruments ne sont que desthéories matérialisées.
Il en sort des phénomènes qui portent de toute part la marquethéorique..
»
Gaston BACHELARD
Bachelard a contribué à donner à l'épistémologie française ses lettres de noblesse, en particulier en déclarant dès les premières pages de « La formation de l'esprit scientifique » (1938) : « C'est en terme d'obstacle qu'il faut poser le problème de la connaissance scientifique. »
Bachelard s ‘est battu contre deux idées fausses portant sur les sciences, répandues dans le public.
D'une part, celle qui veut que le savant arrive pour ainsi dire l'esprit « vierge » devant les phénomènes à étudier, d'autre part celle qui voit le développement des sciences comme une simple accumulation de connaissance, un progrès linéaire.
En affirmant cette citation, il souhaite montrer les difficultés inhérentes à l'acte même de connaître.
Les obstacles à une connaissance scientifique ne viennent pas d'abord de la complexité des phénomènes à étudier, maisdes préjugés, des habitude de savoir, des héritages non interrogés.
« Quand il se présente à la culture scientifique, l'esprit n'est jamais jeune.
Il est même très vieux, car il a l'âge de ses préjugés.
»
La première bataille à livrer pour accéder à la connaissance scientifique est donc une bataille contre soi-même,contre le sens commun auquel le savant adhère spontanément.
C'est une bataille contre l'opinion : « L'opinion pense mal, elle ne pense pas, elle traduit des besoins en connaissance.
» Ainsi les travaux de Bachelard peuvent-ils être compris comme une « psychanalyse de la connaissance ».
Mais il va plus loin : « En fait on connaît toujours contre une connaissance antérieure, en détruisant des connaissances mal faites, en surmontant ce qui, dans l'esprit même fait obstacle à la spiritualisation. »
Non seulement nous avons à nous défendre des préjugés communs, mais aussi des connaissances scientifiques antérieures.
Bachelard a su se rendre très attentif aux périodes de crise et de révolution scientifique, celles où l'on passe d'une théorie à une autre, d'un système à un autre, d'une méthode à une autre.
Si « La.
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