La beauté artistique est-elle supérieure à la beauté naturelle ?
Publié le 21/01/2004
Extrait du document
- I) La beauté artistique est supérieure à la beauté naturelle.
- II) La beauté naturelle est supérieure à la beauté artistique.
«
C'est que: « la plus haute destination de l'art est celle qui lui est commune avec la religion et la philosophie ».
Il suffirait pour s'en convaincre de se souvenir de ce que furent la tragédie grecque ou l'architecturemédiévale.
Formidable moyen d'éducation, l'art religieux manifeste l'expansion du christianisme comme ilpermet d'apprendre à la population illettrée l'histoire sainte.
La tragédie grecque, véritable institution politique(la totalité des citoyens assistait aux concours tragiques), représente un moyen pour la cité de s'interrogersur elle-même, sur ses mythes, sur ses valeurs, sur la place respective des dieux et des hommes, sur la responsabilité humaine, etc.
Dans l'art véritable n'apparaît pas seulement l'expression personnelle du génie de l'artiste, mais aussi toutesles interrogations et les conceptions d'une époque qui se donnent une forme objective (celle de l'œuvre);l'œuvre est moyen pour l'esprit de se contempler lui-même.
Le génie d'un peuple, « ses idées et ses intérêts les plus hauts » sont extériorisés par le moyen de l'œuvre d'art.
Les pensées s'y donnent une forme objective, sensible, qui permet à nos conceptions de devenirlisibles, accessibles.
Hegel y voit la source du besoin d'art.
Toutes les sociétés humaines, aussi « primitives » qu'elles paraissent,ont toujours connu une activité artistique, parce que:
« l'œuvre d'art est un moyen à l'aide duquel l'homme extériorise ce qu'il est », c'est-à-dire prend conscience de ce qu'il est.
Ainsi, quelle que soit la part d'apparence et d'emprunt au sensible qui se manifeste dansl'œuvre: « ces formes ou ces sons sensibles, l'art les crée non pour eux-mêmes et tels qu'ils existent dans la réalité immédiate, mais pour la satisfaction d'intérêts spirituels supérieurs ».
Si l'on voit alors clairement pourquoi: « l'art occupe le milieu entre le sensible pur et la pensée pure », reste à lever deux objections.
Celle qui fait de l'activité artistique une simple imitation de la nature, ou celle qui nevoit dans l'art qu'un simple jeu d'apparence et d'illusion.
Hegel n'a pas de phrases trop dures pour ceux qui font de l'art une simple imitation de la nature.
« Il y a des portraits dont on a dit spirituellement qu'ils sont ressemblants jusqu'à la nausée. » Si l'œuvre n'était qu'une simple copie de la nature, elle n'aurait aucune valeur.
En effet, créer se réduirait à une simple routine, à unehabileté, puisque le contenu de l'œuvre et sa matière seraient fournis par le modèle.
L'homme n'y produiraitrien de lui-même.
En ce cas, l'homme pourrait « être fier d'avoir inventé le marteau, le clou, car ce sont des inventions originales et non imitées ».
De même, voir dans l'œuvre un simple jeu, un simple travail d'illusionniste est méconnaître l'activité artistique.
En déclarant:
« L'art creuse un abîme entre l'apparence et l'illusion de ce monde mauvais et périssable d'une part, et lecontenu vrai des événements de l'autre, pour revêtir ces événements et phénomènes d'une réalité plus haute,celle de l'esprit. »
Hegel retrouve en partie une leçon d' Aristote ; l'art débarrasse les événements réels de leur contingence, de leurs impuretés, d'un fatras de détails, pour en dévoiler l'essence et la vérité.
Ce qu'il y a d'apparence dansl'art n'est pas de l'ordre de l'illusion et du mensonge, mais au contraire, de l'essentiel.
L'art épure le réel(immédiat) pour en dévoiler l'essence.
La mise en évidence du caractère hautement spirituel de l'art ne reste pas chez Hegel un simple constatthéorique.
Outre les analyses d'œuvres présentes dans l'Esthétique, des études d'œuvres littérairesponctuent tout le second tome de la « Phénoménologie de l'esprit »: l' « Antigone » de Sophocle , le « Neveu de Rameau » de Diderot , « Michel Kohlhaas » de Kleist ou « Les Brigands » de Schiller servent à étudier les moments à la fois historiques et logiques qui ont présidé à leur création.
Et Hegel se fait fort dedémontrer l'intérêt philosophique majeur de tels écrits.
Cependant, la richesse et la présentation sensible qu'offre l'art en constituent aussi les limites.
On a vu que «l'art occupe le milieu entre le sensible pur et la pensée pure », c'est-à-dire que: « le contenu d'une œuvre d'art est tel que, tout en étant d'ordre spirituel, il ne peut être représenté que sous une forme naturelle ».
Si l'art, en effet, recèle un contenu spirituel, offrant des affinités avec la religion et la philosophie, on a vuqu'il consistait à offrir ce contenu sous une forme sensible, objective, au moyen de formes, de couleurs, etc.
L'œuvre présente une « indivision du sensible et de l'intelligible ».
On ne peut, pour parler grossièrement, séparer fond et forme, et l'œuvre n'est pas l'illustration sensible d uneidée déjà là.
Ce qu'a à nous dire Racine n'est pas dissociable de son écriture; il n'y a pas un messagepréexistant puis un « moyen » de le faire passer.
Les œuvres qui se contentent d'illustrer une thèse sont généralement décevantes et plates.
Or cette façon de présenter de façon plus immédiate, plus sensible qu'un ouvrage conceptuel (un traité de.
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