Kant: progrès & raison
Publié le 12/10/2013
Extrait du document
Kant:
« Le dernier progrès que fit la raison, achevant d'élever l'homme tout à fait au-dessus de la société animale, ce fut qu'il comprit (obscurément encore) qùil était proprement la fin de la nature1, et que rien de ce qui vit sur terre ne pouvait lui disputer ce droit. La première fois qu'il dit au mouton: "la peau que tu portes, ce n'est pas pour toi, mais pour moi que la nature te l'a donnée': qu'il lui retira et s'en revêtit, il découvrit un privilège, qùil avait, en raison de sa nature, sur tous les animaux. Et il cessa de les considérer comme ses compagnons dans la création, pour les regarder comme des moyens et des instruments mis à la disposition de sa volonté en vue d'atteindre les desseins2 qu'il se propose. Cette représentation implique (obscurément sans doute) cette contrepartie, à savoir qu'il n'avait pas le droit de traiter un autre homme de cette façon, mais qu'il devait le considérer comme un associé participant sur un pied d'égalité avec lui aux dons de la nature.«
«
1 C 0 R R G É
• Les clés du sujet
PRËSENTATION DU TEXTE ET ANALYSE DE SES ENJEUX
~ Dans ce texte, Kant (1724-1804) assigne à l'homme une place privi
légiée au sein de la nature.
L'être
humain n'est pas un animal parmi
d'autres,
vivant sur un pied d'égalité avec les autres êtres naturels.
L'hu
manité représente la «fin», la destination de la nature, ce pour quoi on
pourrait croire qu'elle a été faite.
Ce qui veut dire que les hommes ont
des droits sur les autres êtres vivants et que ceux-ci n'ont pas les mêmes
droits sur lui.
C'est la conception antique d'une nature bonne et har
monieuse qui paraît ici renversée puisque
l'homme, «fin de la nature»,
«au-dessus
de la société animale» semble être plus qu'un être naturel.
Il n'est plus, comme le voulait Aristote (384-322 av.
J.-C.) par exemple,
un animal particulier, un
«animal doué de parole».
~ Le texte considère l'homme à la fois comme un être appartenant à la
nature et comme un être s'en distinguant radicalement.
Cette position
n'est pas
le dernier mot de l'auteur sur la question.
Pour la doctrine kan
tienne,
si le statut de l'homme ne se réduit pas à celui d'un être naturel,
c'est
qu'il est un sujet libre et autonome, un être doué de raison.
Mais
la position défendue par le texte ne va pas jusque-là.
Elle s'en tient à
cet étrange finalisme par lequel
l'humanité tente de penser confusément
la singularité de sa condition au sein de la nature.
Le «dernier progrès»
de
la raison réclame ainsi encore quelques explicitations avant d'être
compris dans sa véritable signification.
~ Kant attribue à la raison le pouvoir de susciter en l'homme la prise
de conscience de
sa condition finale dans la nature.
Même si les ques
tions n'invitaient pas à approfondir ce point du texte, il convenait
pourtant de lui accorder toute son importance.
Il ne ressort pas ordi
nairement du pouvoir de la raison d'assigner des fins.
Traditionnel
lement, on
voit dans la raison la faculté des moyens, une intelligence
technicienne capable, une fois
le but fixé, de choisir le procédé le plus
approprié.
C'est une des innovations de la philosophie kantienne de
conférer à la raison un
pouvoir moral et d'y voir une faculté imposant
à la conscience les fins de l'action.
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LA NATURE• SUJET • 33.
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