Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs, section II
Publié le 11/04/2012
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« On ne pourrait non plus rendre un plus mauvais service à la moralité que de vouloir la faire dériver d'exemples. Car tout exemple qui m'en est proposé doit lui-même être jugé auparavant selon des principes de la moralité pour qu'on sache s'il est bien digne de servir d'exemple originel, c'est-à-dire de modèle; mais il ne peut nullement fournir en tout premier lieu le concept de moralité. Même le saint de l'Évangile doit être d'abord comparé avec notre idéal de perfection morale avant qu'on le reconnaisse pour tel ; aussi dit-il de lui-même: Pourquoi m'appelez-vous bon, moi (que vous voyez) ? Nul n'est bon (le type du bien) que Dieu seul (que vous ne voyez pas). Mais d'où possédons-nous le concept de Dieu comme souverain bien ? Uniquement de l'idée que la raison trace a priori de la perfection morale et qu'elle lie indissolublement au concept d'une libre volonté. En matière morale l'imitation n'a aucune place ; des exemples ne servent qu'à encourager, c'est-à-dire qu'ils mettent hors de doute la possibilité d'exécuter ce que la loi ordonne; ils font tomber sous l'intuition ce que la règle pratique exprime d'une manière plus générale; mais ils ne peuvent jamais donner Je droit de mettre de côté leur véritable original, qui réside dans la raison, et de se régler sur eux. «
«
tomber sous l'intuition ce que la règle pratique exprime d'une manière plus
générale; mais
ils ne peuvent jamais donner Je droit de mettre de côté leur
véritable original, qui réside dans
la raison, et de se régler sur eux.»
Quel statut donner aux exemples, notamment en matière morale? La
morale de l'édification, qui en appelle à l'imitation des grands et des saints,
peut être solidaire d'une négation de l'autonomie.
L'autonomie signifie
que
le sujet agissant est assez raisonnable pour détenir en lui le critère de
ce qui est bien, et ne pas avoir à dépendre d'autrui pour identifier un
comportement qui répond
à ce critère.
C'est d'abord en lui-même que le
sujet agissant doit trouver le principe -et le critère- de l'action morale.
On n'agit pas moralement par simple coïncidence ou inadvertance, mais
par pureté d'intention.
Et
la conscience, à cet égard, ne peut être dupe
d'elle-même:
ce qui me fait reconnaître la moralité d'un comportement et
l'admirer chez un homme particulièrement vertueux, c'est
ce savoir intime
dont ma raison s'avise.
L'acte moral est un signe à la portée de l'humanité.
On pourra rapprocher ce texte de La Profession de foi du vicaire
savoyard,
où Rousseau évoque l'irréductibilité de la conscience comme
principe intérieur, et libre, de
la moralité (Émile, quatrième livre)..
»
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