John LOCKE: père de l'empirisme anglo-saxon
Publié le 22/02/2012
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«
LOCKE
1632-1704
ETRANGE destinée, qui est réservée à la philosophie de John Locke.
Tant qu'il vécut, la Répu
blique des Lettres, à travers toute l'Europe, l'entoura de considération et de sympathie; la
publication longtemps attendue de ses grandes œuvres fut un événement.
Après sa mort, le xvme
siècle tout entier commenta ses idées et admira « le grand Monsieur Locke >>.
Et cependant
il ne fournit plus, dans nos histoires de la philosophie et dans notre culture consciente, qu'une
pâte molle et tiède, apparemment dépourvue désormais de levain.
S'il sert encore de point de
référence, on ne l'étudie guère et, par une bizarre ironie du sort, on le connaît surtout à travers
Leibniz
et à travers les commentaires critiques que celui-ci avait donnés de l'Essay concerning
human understanding
sous le titre Nouveaux Essais sur l'entendement humain.
Une fois pour toutes, on
lui a imposé l'étiquette d'empiriste et l'on a renoncé à sauver un empirisme que rien ne vient
revigorer, ni l'immatérialisme absolu d'un Berkeley, ni le scepticisme éveilleur d'un Hume :
ses
commentateurs modernes eux-mêmes n'osent parler de lui qu'à la condition d'insister sur
la confusion, l'équivoque, la platitude de ses idées.
Il n'est pas jusqu'à son œuvre politique,
les
Traités sur le gouvernement civil qui, après avoir fécondé et nourri toute la spéculation politique
du xvrne siècle, après avoir inspiré les fondateurs des Etats-Unis d'Amérique, ne se soit vu privée
d'un parrainage si bien mérité : les révolutionnaires américains, ne voulant pas appuyer leur action
sur la philosophie
d'un Anglais, préféraient se recommander ouvertement des philosophes français,
d'un Montesquieu par exemple.
Locke ne serait-il pas le type même des philosophes à redécouvrir
et peut-être même à réhabiliter?
Né en 1632, il traverse sans encombre, grâce à son jeune âge, les troubles de la première
Révolution anglaise
et il passe le temps du Protectorat comme étudiant, puis comme fellow
à Oxford, à
Christ Church College.
Il mène alors de front toutes sortes d'études, du grec et du
latin à la philosophie et à la médecine, drainant déjà, sur le chemin d'une culture universelle,
les estimes
et les amitiés les plus diverses, du savant Robert Boyle, avec lequel il fonde la Royal
Society,
au premier lord Shaftesbury.
Rien n'a manqué à sa formation, ni l'éducation universitaire
la plus raffinée, ni les longs séjours à l'étranger- il vivra en France de 1675 à 1679, puis en
Hollande, de 1683 à 168g, et il prendra chaque fois de vivants contacts avec les milieux savants
-ni la pratique des grandes affaires publiques.
On le voit aussi bien réussir de délicates inter
ventions chirurgicales
que participer aux grands conseils du Royaume ou servir de confident
au comte Shaftesbury ou au futur roi Guillaume III d'Orange.
Il devait son charme personnel à cette curiosité universelle, à cette sympathie toujours
offerte
aux autres, à cette volonté de conciliation et d'accord qui marque son activité politique
et qui caractérise tout particulièrement ses convictions religieuses.
Bien qu'ayant reçu une édu
cation d'un calvinisme strict, on le verra, en effet, tout au long de sa vie, manifester, en même
temps
qu'une foi réelle, un goùt pour les doctrines larges qui, du latitudinarisme à l'arminianisme,
tendent à limiter le christianisme à la foi dans le Christ comme le Messie et à la pratique de la
morale chrétienne.
Il s'appuiera sur ce dogme simple pour prêcher la tolérance en affirmant.
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