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JEAN-JACQUES ROUSSEAU (1712-1778): VIE ET OEUVRE

Publié le 20/05/2011

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I. — Biographie.
L'enfance et la jeunesse (1712-1741). — La famille Rousseau, d'origine française, s'était réfugiée à Genève vers 155o, et y avait obtenu le droit de cité. Le père de Jean-Jacques, Isaac Rousseau, était un homme de caractère aventureux, sans moralité ni bon sens; il avait d'abord cherché fortune à Constantinople, puis était revenu s'établir dans sa ville natale, comme horloger. Sa mère, d'une famille de pasteurs, les Bernard, ne put élever Jean-Jacques, dont la naissance lui coûta la vie. L'horloger confia d'abord son fils à une de ses tantes, puis se chargea de le former lui-même, en lui donnant à lire des romans et les Vies de Plutarque. Quand Jean-Jacques eut dix ans, Isaac Rousseau fut forcé de quitter Genève, et laissa son fils à son oncle, M. Bernard, qui le mit en pension à Bossey, chez le pasteur Lambercier, où l'enfant resta deux ans : ce furent les plus heureuses de sa vie. Jean-Jacques, revenu à Genève, fut placé comme apprenti chez un graveur. Mais il était paresseux, il allait vagabonder aux environs de la ville, et oubliait souvent l'heure où l'on fermait les portes de la cité de Calvin. Un soir, il n'osa plus s'exposer au châtiment qui l'attendait pour son retard, et il s'enfuit à Confignon, village catholique, à deux lieues de Genève. Le curé, chez qui il se présenta comme désireux de changer de religion, l'envoya à Mme de Warens, qui habitait Annecy et qui travaillait avec zèle à la conversion des jeunes protestants. Celle-ci l'adressa à l'hospice des catéchumènes de Turin. Après quatre mois, le nouveau catholique sortit de cet hospice, et dut chercher à gagner sa vie. Il fut laquais.

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« maréchal, et se dirigea vers la Suisse. Rousseau de 1763 à 1770.

— Il réside d'abord à Yverdun, dans le canton de Vaud, puis à Motiers, dans le Val-Travers, sur un territoire appartenant au roi de Prusse.

Mais il est obligé de quitter Motiers, où la population lui estdevenue hostile (1764).

Il se réfugie pour quelques mois dans l'île Saint-Pierre, sur le lac de Bienne; il y éprouve uncalme réparateur.

Il en est encore chassé.

Tenté d'abord de se rendre en Prusse, il préfère accepter les offres duphilosophe anglais David Hume, et, après avoir traversé Paris où il se promène en costume d'Arménien, il s'embarquepour l'Angleterre (1766).

Là il ne tarde pas à se brouiller avec Hume, en qui il ne voit plus qu'un persécuteur.

Et, leIer mai 1767, il quitte l'Angleterre.

On le retrouve au château de Trye, en Normandie, chez le prince de Conti, puis àLyon, puis à Monquin, en Dauphiné.

Enfin, en 1770, il revient à Paris. Les dernières années et la mort (1770-1778).

- Rousseau s'installe alors dans une maison de la rue Plâtrière, rue quiporte aujourd'hui son nom.

Il y reprend son métier de copiste de musique.

Il aime à faire de longues excursions àpied, aux environs de Paris.

Il s'occupe de continuer ses Confessions, et il écrit les Rêveries d'un promeneur solitaire.Un de ses admirateurs, M.

de Girardin, l'emmena le 20 mai 1778, dans son château d'Ermenonville.

C'est là qu'ilmourut d'une attaque d'apoplexie, le z juillet.

Il avait exprimé le voeu, quelques jours auparavant, d'être enterrédans l'île des Peupliers, au milieu du parc de ce château.

En 1794, ses restes furent exhumés et portés auPanthéon, à côté de ceux de Voltaire. II.

— L'oeuvre de Rousseau. Le Discours sur les sciences et les arts (1750).

— Le Discours (il faut prendre encore ce mot dans son sens latindiscursus, exposé, dissertation) se compose de deux parties : la première est un exposé historique, une suited'exemples tirés de Sparte, d'Athènes, de Rome (ici se place la prosopopée de Fabricius) et des États modernes; laseconde est l'explication théorique et philosophique de cette loi constatée par l'histoire : les lettres et les sciencescorrompent les moeurs.

Toute science, tout art, est né, dit Rousseau, d'un vice correspondant : l'astronomie, de lasuperstition; l'éloquence, du mensonge, etc.

Les artistes et les savants sont des oisifs.

La lecture amollit lecourage, pervertit l'imagination.Le Discours sur l'origine de l'inégalité parmi les hommes (1755).Rousseau commence par tracer un tableau « idyllique » de l'homme primitif, « à l'état de nature », être simple,robuste, n'ayant que des instincts, indépendant et heureux, jouissant de sa force et la tempérant par la pitié.

Maisle sentiment de perfectibilité gâte tout.

Les hommes s'associent, forment des familles, construisent des huttes, sedisent maîtres du terrain qu'ils cultivent; de là les jalousies, les rivalités, l'anarchie.

Alors, les plus riches, les plusforts, les plus intelligents se liguent contre les pauvres et les faibles.

Les inégalités une fois créées, elles sontconsacrées par le temps, par l'usage, par le désir de conserver son bien et son rang. La Lettre sur les spectacles (1758).

— D'Alembert avait écrit, pour l'Encyclopédie l'article Genève, inspiré parVoltaire alors, installé aux Délices.

Il y félicitait d'abord les pasteurs de Genève de réduire leur religion à la simplemorale et de ne s'attacher à aucun dogme.

En second lieu, d'Alembert demandait qu'on établît un théâtre à Genève,où, depuis Calvin, les représentations dramatiques étaient interdites.— Sur le premier point, Rousseau est bref.

Il secontente de faire sentir à d'Alembert son manque de tact.

« Monsieur, dit-il, jugeons des actions des hommes, etlaissons Dieu juge de leur foi.

» — Il se hâte de passer au second point, le théâtre.

Rousseau accuse la tragédie deflatter et d'exciter nos passions, la comédie de développer en nous le sens du ridicule, qui est un vice du coeur.

Ils'en prend surtout à Molière et particulièrement au Misanthrope.

Il construit là-dessus un syllogisme : Alceste estvertueux; or, on rit d'Alceste; donc, on rit de la vertu.

Cc syllogisme est facile à réfuter, puisqu'il est certain que sil'on rit d'Al ceste, ce n'est pas d'Alceste vertueux.

Rousseau est sévère pour les acteurs.

Il partage et exagère lespréjugés de son temps ; il estime que les moeurs des Genevois seraient mises en péril par la présence de comédiens.Faut-il donc, se demande-t-il en terminant, refuser toute distraction à un peuple ? Non.

Mais ces divertissementsseront des fêtes civiles ou militaires, des bals champêtres où les jeunes gens à marier dansent sous les yeuxattendris de leurs parents, des cérémonies où l'on couronne la jeune fille la plus vertueuse. La Nouvelle Héloïse (1761).

— L'héroïne du roman, Julie d'Étanges, aime son précepteur, Saint-Preux.

Mais Julie estobligée d'épouser M.

de Volmar.

Elle souffre de cet amour ancien, tout en remplissant très strictement ses devoirsde femme et de mère.

Son mari, à qui elle avoue sa passion pour Saint-Preux, rappelle celui-ci qui s'était mis àvoyager pour oublier Julie, et l'installe dans sa maison, pour bien marquer sa confiance dans la vertu de sa femme etde son ami.

Julie meurt bientôt, d'une maladie qu'elle a contractée en sauvant un de ses enfants.

— Ce roman estécrit sous forme de lettres.

Il nous intéresse surtout aujourd'hui par les descriptions : les montagnes du Valais (Irepartie), la promenade aux rochers de Meillerie et sur le lac de Genève (3e partie); les jardins (4e partie); lesvendanges à Clarens (5e partie).

Ces pages magnifiques contiennent tout ce que le romantisme devait bientôtrythmer et chanter.

Mais les contemporains y goûtèrent bien autre chose : la peinture animée et souventemphatique de l'amour malheureux, une sensibilité exaltée et larmoyante, des dissertations sur toutes sortes desujets politiques, religieux, philanthropiques, pédagogiques, etc.. »

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