« Il faut pleurer les hommes à leur naissance et non à leur mort » Montesquieu ?
Publié le 05/04/2009
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Cette phrase est issue des Lettres persanes où Montesquieu fait valoir un certain relativisme culturel : il existe une pluralité de coutumes et de pratiques sociales.
Cependant, pleurer un mort n’est-il pas irréductible à une pratique socialement déterminée (et donc pas nécessairement naturelle) ? En effet, la mort n’est-elle pas triste en soi ?
Le renversement des valeurs proposé (il faudrait pleurer le nouveau-né et non le défunt) est volontairement choquant : la venue au monde d’un être n’est pas affligeante et la perte de ceux qu’on aime n’est pas source de joie. Pourtant, Montesquieu veut montrer, non pas qu’il y a une tragédie à vivre (comme Sophocle qui écrit qu’il vaut mieux parfois n’être jamais né), mais veut faire surgir à quel point nos pratiques sont arbitraires (« Je voudrais bannir les pompes funèbres « dit l’auteur de la lettre précédemment). L’enjeu n’est pas ici de soutenir une thèse métaphysique. Pourtant, il conviendra de montrer que cet enjeu ne peut totalement être évacué et qu’il y a en ce sens une certaine validité à nos pratiques sociales.
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Ce sont les valeurs fondées non sur les institutions humaines, toujours relatives, niais sur les qualités réelles del'âme ou du corps (vertu, intelligence, force...).
On leur doit l'estime, ou respect intérieur.
Il est injuste de ne pasaccorder aux grandeurs naturelles l'estime qui leur est due ; il est sot de refuser les formes extérieures du respectaux grandeurs d'établissement.
Il faut bien distinguer les ordres.
Un supérieur exige à bon droit que vous le saluiez,mais vous ne lui devez pas l'estime pour autant.
Respecter un ministre ne signifie pas que vous l'estimez.
Certainsconfondent les deux ordres, et ne sont pas loin d'estimer ou de mépriser quelqu'un pour son rang social.
b) elles maintiennent les hommes en paix Mais pourquoi les respecter demanderait le demi-habile puisqu'elles ne sont que des images de la vérité ?précisément dit pascal parce que c'est d'elles que dépend la paix sociale.
En effet, un noble est honoré de par sestitres et non pour ses qualités réelles ; néanmoins ses quatre laquais doivent provoquer en nous un respect ;, parceque les coutumes ont été fixées par les hommes, il serait sot et injuste de les troubler l'ordre établi en les bafouant— telle est la limité du relativisme sous-tendu par la formule de Montesquieu : la mise à mal des conventions commesource de rébellion contre un ordre établi qui, à défaut d'être réellement juste, n'en garanti pas moins la paixsociale .
Car en effet, les cérémonies tiennent les hommes entre eux. c) Le caractère structurant des cultes En effet, Pascal met en évidence le fait que l'obéissance permet de retrouver, dans sa forme qui est soumission(détournement de soi) la condition d'avant la chute (où la volonté de Dieu et celle d'Adam ne faisait qu'une).
Il y aune efficace formelle des cérémonies : celles-ci, de par leur codes, rituels exigeant, permettent l'inscription de la croyance dans les corps (exemple : plier les genoux, ce n'est pas simplement s'incliner devant la majesté divine,c'est, par cet abaissement marqué physiquement, faire apparaître la majesté de Dieu) ; il s'agit d'installer dansl'homme fini une forme de permanence ayant pour enjeu de remédier aux limites de cette « raison ployable à toussens » = communier , relier ce qui était dénoué. CONCLUSION : Les enterrements s'efforcent ainsi, par leur mise en scène, de rétablir, pendant le temps de la cérémonie, le lienocculté par les nécessités de la vie et qu'un décès vient brutalement nous rappeler.
En effet la mort marque notrefinitude ; par elle, nous savons que nous sommes des être relatifs, imparfaits et elle ne peut laisser indifférent.
Il y a(au sens qu'Eliade donne à ce terme) quelque chose de Sacré dans les enterrements.
Cependant, la formule de Montesquieu ne peut-elle alors pas être entendue davantage comme une mise en garde que comme un réel précepte normatif (impératif) ? En effet, on sait ce que peuvent avoir d'aliénant certainespratiques religieuses.
[Freud : le culte religieux = interminable mise en scène d'un rapport illusoire : le caractèrerépétitif du culte = symptôme d'une névrose où le sujet est enfermé dans la circularité compulsive du rite] et leshabitudes comme conduites rendues instinctives [Cf.
ce qu'en dit Bergson : toute action est mécanique dès lors quela conscience s'en retire] Si Pascal a raison de souligner que les cérémonies ont la vertu de lier les hommes entre eux, de sceller leur accord(leur consentement) il n'en reste pas moins qu'il faut se garder de toute illusion : les cérémonies quoique conventionnelles ont une efficace formelle, mais qui n'interdit pas de questionner leur contenu (telle ou telle pratique comme fêter Noël n'est-elle pas au service d'un idéologie, le consumérisme ?)..
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