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HUGO: Les Châtiments, Livre VI, 15 (v. 21 à 42).STELLA - Lecture méthodique

Publié le 14/03/2015

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Lecture méthodique

STELLA

Un ineffable amour emplissait l'étendue. L'herbe verte à mes pieds frissonnait éperdue, Les oiseaux se parlaient dans les nids; une fleur Qui s'éveillait me dit : C'est l'étoile ma soeur.

5        Et pendant qu'à longs plis l'ombre levait son voile, J'entendis une voix qui venait de l'étoile

Et qui disait : --Je suis l'astre qui vient d'abord. Je suis celle qu'on croit dans la tombe et qui sort. J'ai lui sur le Sina, j'ai lui sur le Taygète ;

10     Je suis le caillou d'or et de feu que Dieu jette, Comme avec une fronde, au front noir de la nuit. Je suis ce qui renaît quand un monde est détruit. Ô nations ! Je suis la Poésie ardente.

J'ai brillé sur Moïse et j'ai brillé sur Dante.

15     Le lion Océan est amoureux de moi.

J'arrive. Levez-vous vertu, courage, foi !

Penseurs, esprits ! montez sur la tour, sentinelles ! Paupières, ouvrez-vous ! allumez-vous, prunelles ! Terre, émeus le sillon ; vie, éveille le bruit;

20     Debout, vous qui dormez ; — car celui qui me suit, Car celui qui m'envoie en avant la première, C'est l'ange Liberté, c'est le géant Lumière !

Jersey. Juillet 185.3.

[12/1852]

Les Châtiments, Livre VI, 15 (v. 21 à 42).

L'étoile s'adresse progressivement à l'ensemble de l'huma­nité. Les termes placés en apostrophe se succèdent selon un ordre révélateur. L'astre parle d'abord au sens politique et moral de l'homme. Il se sert de termes généraux (« Ô nations ! «, v. 13) ou abstraits (« vertu, courage, foi ! «, v. 16). Il se tourne ensuite de manière plus individuelle vers ceux dont le coeur est en éveil (« Penseurs, esprits «, y. 17). Ces hommes —les poètes—jouent le rôle de « sentinelles « (v. 17). Les derniers termes en apos­trophe (« Paupières «, « prunelles «, v. 18; «Terre «, « vie «, v. 19) recouvrent tout ce qui habite la terre. L'expression du vers 20 (« vous qui dormez «) r e vise plus seulement les « sentinelles « vigilantes. Elles désignent les hommes simples, ceux qui sont encore dans la nuit.

Dans ce passage, Hugo donne libre cours à un génie poétique visionnaire. Il perçoit dans la nature la connivence et la lutte de forces secrètes. Il promet aux hommes un avenir rayonnant. L'énergie de la nature réconcilie divinités païennes et figures bibliques, politique et poésie, lumière et liberté. Hugo nous invite à contempler une aube qui réunit, sous le signe du Progrès, l'his­toire de l'homme et son avenir.

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« --·INTRODUCTION Situation du passage Le premier poème des Châtiments s'intitule« Nox »(c'est-à­ dire « La nuit»).

Le dernier se nomme« Lux» (c'est-à-dire« La lumière»).

Ce passage symbolique de J'ombre à la lumière est rythmé par plusieurs textes du recueil.

C'est le cas de« Stella», qui décrit l'apparition de l'étoile du matin 1 .

Les premiers vers présentent le poète qui s'éveille et voit luire J'étoile que toute la nature, encore plongée dans J'ombre, semble contempler.

Puis, dans cet extrait.

il croit surprendre les senti­ ments et les paroles des animaux et des plantes (v.

1 à 7).

L'étoile s'adresse à lui (v.

6-7).

Commence alors un long passage au style direct qu'on peut appeler le discours (ou prosopopée 2 ) de l'étoile.

L'étoile se présente d'abord au poète (v.

7 à 15).

Dans ces vers, l'expression« je suis» revient à cinq reprises (v.

7, 8, 10, 12, 13).

Puis, l'étoile invite l'humanité à l'espoir et lui promet le triomphe de la Liberté (v.

16-22).

Axes de lecture Le poème est célèbre à plus d'un titre.

Il montre la nature sous un jour vivant et mystérieux, qui est propre au romantisme.

Il délivre en outre un message d'espérance qui se fonde sur une vision inspirée de l'avenir.

1.

UNE VISION ROMANTIQUE DE LA NATURE Hugo témoigne ici d'une conception romantique de la nature.

Le monde entier est parcouru de sentiments mystérieux.

Les choses et les êtres communiquent entre eux.

Ils établissent 1.

On donne à cette étoile plusieurs noms différents : étoile du matin, étoile du berger, Vénus.

2.

Une prosopopée est un discours qu'un auteur place dans la bouche d'un être qui, dans la réalité, ne parle pas.

Les paroles que Hugo prête à l'étoile forment une prosopopée.

169. »

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