« Herméneutique philosophique et herméneutique biblique » chez Paul RICOEUR
Publié le 02/07/2012
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Comme nous l’avons déjà souligné plus haut avec les « formes « du discours bibliques, il faut noter que ceux-ci s’inscrivent dans la logique du dévoilement d’une profession de foi. Malgré sa structure qui est textuelle, l’Écriture demeure une entité qui va dans le même sillage que la foi qui évoque les liens entre l’homme et Dieu. En effet, les textes bibliques relèvent du domaine de la révélation et c’est ce qui justifie la place prépondérante accordé à Dieu. Ce dernier n’est pas un concept ou une notion à comprendre selon les catégories philosophiques. Dès lors : « la foi biblique ne saurait être séparée du mouvement de l’interprétation qui l’élève au langage. Le « souci ultime « resterait muet, s’il ne recevait la puissance de la parole d’une interprétation sans cesse recommencée des signes et des symboles… «[27]. C’est dire en d’autres termes que tout message biblique est lié à une question de foi qui donne sens au message. L’on peut alors selon Ricœur après avoir pris en compte l’aspect textuel du discours biblique, « l’envisager comme un texte sacré et, de ce point de vue, elle constitue une mise à l’épreuve de la foi, un monument d’écriture en deçà duquel perce une parole vive à laquelle il est permis d’adhérer «[28].
«
au cœur même de l’oralité une vocation du signe à l’inscription, peut-être la lecture qui fait face à l’écriture révèle-t-elle, au cœurmême de l’inscription, une vocation à être non seulement vue, mais entendue »[13].
C’est dire que l’interprétation des textesbibliques doit prendre en compte le rapport Parole-Écriture.
Sur un autre aspect, RICŒUR s’inscrivant dans une même logiqueque GADAMER, à savoir le fait d’être mu par l e texte, propose une autre application de l’herméneutique philosophique àl’herméneutique biblique : l’idée de « chose du texte » ou du « monde du texte ».3- La « chose du texte » ou « monde du texte »Qu’est-ce que la « chose du texte » ? « La chose du texte, écrit RICŒUR, c’est le monde qu’il déploie d evant lui »[14].
Pour ainsidire, c’est tout ce que nous dévoile le texte.
Avant de dévoiler un sens secondaire, le texte dévoile un sens premier à travers dessignes et symbole.
Le « monde du texte » s’affirme à travers les signes qui le constituent.
C’est une telle vision de Paul RICŒURdans son œuvre intitulés Le conflit des interprétations qui est restitué par Gilbert HOTTOIS lorsqu’il le cite en ces termes : «j’appelle symbole toute structure de signification où le sens direct, primaire, littéral, désigne par surcroît un autre sens indirect,secondaire, figuré, qui ne peut être appréhendé qu’à travers le premier.
Cette circonscription des expressions à double sensconstitue proprement le champ de l’herméneutique »[15].C’est ce qui explique la nécessité avec Paul RICŒUR d’entrer en contact avec la réalité que dévoile le texte.
Mieux, comme le ditJean-Philippe PIERRON, « pour Ricœur, il n’est pas de compréhension de soi qui ne soit médiatisée par des signes, des symboleset des textes ; la compréhension de soi coïncide à titre ultime avec l’interprétation appliquée à ces termes médiateurs »[16].Mieux, cela permet aussi de surmonter les antinomies, ceci pour utiliser les idées d’Olivier ABEL[17].Ce qui fait aussi la spécificité des discours bibliques est la particularité de leur « chose ».II- LES PARTICULARITES DU DISCOURS BIBLIQUEComme nous avons pu le constater, pour RICŒUR, l’interprétation des discours bibliques passe tout d’abord par la prise encompte de leur structure ; même si cependant les discours bibliques gardent leur singularité qui se situe dans leur « monde »,notamment l’idée de Dieu et de la profession de foi qui soutend le message biblique.1- L’être nouveau du discours bibliquePaul RICŒUR dans « sa contribution à une relecture herméneutique et critique de la tradition biblique et théologique »[18]n’oublie pas la particularité des textes bibliques ; même ci ceux-ci ne doivent pas être abordés directement sans des préjugés.Dès lors, les mécompréhensions peuvent être plus ou moins surmontées ; malgré le fait que RICŒUR ne prétend pas élaborer uneexégèse biblique qui se veut parfaite.
Car « cette « application », loin de soumettre l’herméneutique biblique à une loi étrangère,la rend à elle-même et la délivre de plusieurs illusions »[19].
Il apparaît alors à ce niveau que « la première tâche del’herméneutique n’est pas de susciter une décision chez le lecteur, mais d’abord de laisser se déployer le monde d’être qui est la «chose » du texte biblique »[20].Aussi faut-il éviter selon RICŒUR de chercher à le saisir par la simple médiation psychologique.
Parce que « la Bible est révéléedans la mesure où l’être nouveau[…] est lui-même révélant à l’égard du monde, de la réalité tout entière[…]Autrement dit, larévélation, si l’expression doit avoir un sens, est un trait du monde biblique »[21].
Autrement dit, les réalités véhiculées à traversles Saintes Écritures se déploient à travers les textes.
Et il revient à ce niveau de faire appel à l’herméneutique biblique deressortir « cette articulation du God-Talk »[22].
Gilbert HOTTOIS, restituant la pensée de RICŒUR, parlera à ce niveau d’unefonction révélatrice ou de manifestation faisant appel à une « herméneutique du dévoilement progressif qui tente de traduire unsens profond, non inavouable mais ineffable, et qui ajoute-t-il, s’alimente au sens du sacré, un sens pour l’expression duquel lesconcepts et les termes propres sont défaillants »[23].2- La dimension kérygmatique du discours bibliqueLa dimension kérygmatique du discours biblique désigne l’aspect mystérieux de celui-ci.
Le mystère loin de traduire ce qui estincompréhensible évoque plutôt la révélation divine à travers les événements et situations que communiquent les SaintesÉcritures.
A travers le monde du texte, il est question du dévoilement de la réalité divine : « rien n’est dit sur Dieu, sur l’homme,sur leur relation, qui ne passe par l’acte de rassembler des légendes, des sagas isolées, et de les réarranger dans des séquencessignificatives, de manière à constituer un unique Récit, centré sur un événement-noyau qui a à la fois une porté historique et unedimension kérygmatique »[24].
C’est d’ailleurs ce qu’explique la définition même de kérygmatique que nous pouvons retenir del’encyclopédie Wikipédia dans laquelle il est noté : « la kérygmatique, c'est l'irruption du Mystère Total dans un monde où lemystère est le plus souvent réduit à l'un de ses aspects et comme domestiqué »[25].
Dès lors, l’on peut constater quel’interprétation des discours bibliques selon Paul RICŒUR ne se limite pas seulement sur l’aspect textuel ; il faut aussi faireintervenir le côté mystérieux, la révélation, et notamment la foi et ce monde mystérieux se dévoile à travers le monde tu textebiblique qui me fait voir moi-même à travers le texte : il y a donc pour ainsi dire « irruption de la dimension prophétique etkérygmatique »[26] qui fera plus tard appel à l’adhérence des individus.3- Exégèse et foiComme nous l’avons déjà souligné plus haut avec les « formes » du discours bibliques, il faut noter que ceux-ci s’inscrivent dansla logique du dévoilement d’une profession de foi.
Malgré sa structure qui est textuelle, l’Écriture demeure une entité qui va dansle même sillage que la foi qui évoque les liens entre l’homme et Dieu.
En effet, les textes bibliques relèvent du domaine de larévélation et c’est ce qui justifie la place prépondérante accordé à Dieu.
Ce dernier n’est pas un concept ou une notion àcomprendre selon les catégories philosophiques.
Dès lors : « la foi biblique ne saurait être séparée du mouvement del’interprétation qui l’élève au langage.
Le « souci ultime » resterait muet, s’il ne recevait la puissance de la parole d’uneinterprétation sans cesse recommencée des signes et des symboles… »[27].
C’est dire en d’autres termes que tout messagebiblique est lié à une question de foi qui donne sens au message.
L’on peut alors selon Ricœur après avoir pris en compte l’aspecttextuel du discours biblique, « l’envisager comme un texte sacré et, de ce point de vue, elle constitue une mise à l’épreuve de lafoi, un monument d’écriture en deçà duquel perce une parole vive à laquelle il est permis d’adhérer »[28].CONCLUSIONEn dernière analyse, il importe de rappeler qu’il était question pour nous de faire ressortir le point de vue de Paul RICŒUR sur lesrelations qui peuvent exister entre l’herméneutique philosophique et l’herméneutique biblique.
Nous avons pu constater que pourle philosophe français, l’interprétation des discours bibliques doit prioritairement prendre en considération les formes à traverslesquelles le message biblique est transmis.
Pour ce faire, il faut envisager l’exégèse biblique sur un double aspect : « celui d’uneréflexion herméneutique qui ne doit rien emprunter à la « récitation » des dogmes, et celui d’une foi qui se met à l’épreuve destextes tout en mettant les textes à l’épreuve d’un regard critique et distancié »[29].
Ainsi, lorsque la « chose » et le « monde » dutexte paraîtront plus clairs, il y aura alors compréhension de soi face aux textes bibliques.
Mieux, la lecture biblique seraproduction d’un sens relevant de la révélation aussi bien par rapport au texte que par rapport au lecteur qui enrichit sa propreconception de lui-même.BIBLIOGRAPHIE*Œuvres et extraits de texte de Paul RICŒUR- Du texte à l’action.
Essais d’herméneutique II, Paris, Seuil, 1986..
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