Hegel, Principes de la philosophie du droit, § 135.
Publié le 22/03/2015
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«
Textes commentés
Si le mérite revient à Kant d'avoir situé la racine du devoir dans
l'autodétermination de la volonté, c'est-à-dire dans la liberté comme
autonomie, il faut par contre, estime Hegel, lui reprocher le caractère
purement formel d'une morale impuissante à déterminer
le contenu concret
du devoir.
Le formalisme de la morale en fait ainsi une « rhétorique », c'est
à-dire invocation
du pur devoir, de l'action accomplie par pur respect pour la
loi morale universelle.
La notion de devoir s'identifie à l'universalité
abstraite, c'est-à-dire non déterminée par un contenu concret particulier, et
ne peut donc aider l'agent humain individuel, engagé dans une situation
concrète, à agir réellement dans le monde.
Le critère formel de non
contradiction, auquel est assujettie la maxime de mon action, ne permet
aucunement de préciser en quoi doit consister
le contenu de mon action.
Cette impuissance de la morale formelle présente un risque majeur :
l'universalité morale risque en effet de n'être que la justification sophistique
de n'importe quelle action empirique.
La morale peut être amenée à justifier
n'importe quel acte, même le plus injuste, du fait de la séparation de
l'exigence d'universalité, d'une part, et de l'acte réel, d'autre part, qui restent
sur deux plans différents.
La non-contradiction entre l'action du sujet
individuel et la loi universelle devient un postulat purement théorique,
irréalisable en fait dans l'action concrète.
La décision, inhérente à toute
action, court ainsi
le risque de l'arbitraire : loin de faire le bien, le sujet fait le
mal.
La dernière partie
du texte montre à quel point le critère formel de l'identité
comme accord formel avec soi et le principe de non-contradiction sont
impuissants à déterminer
la moralité de l'action.
Dans la mesure où il ne peut
y avoir contradiction que par rapport à un contenu, une donnée matérielle
préalablement posés et valorisés, le devoir,
au sens kantien, qui prétend
éliminer tout contenu, ne peut donc prescrire absolument aucune action
concrète.
Le vol ou
le meurtre ne sont des fautes que si l'on pose d'abord, à titre d'états
de fait à respecter absolument, la propriété et la vie humaine ; ce n'est qu'à
cette condition que l'accomplissement
du vol ou du meurtre deviennent des
contradictions, c'est-à-dire des fautes.
Telle est donc l'insuffisance d'une morale formelle, prétendant se définir par
l'absence de détermination, et la nécessité, selon Hegel, de passer au stade
d'une
« moralité objective » prenant en compte l'inscription de l'action
morale dans
le contexte social et politique.
39.
»
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