HEGEL et la lutte à mort
Publié le 24/04/2005
Extrait du document
«
guidé que par le souci de survivre.
Cette lutte n'a pas pour enjeu la survie « biologique », mais la valeur.Une fois comprise la nécessité de cette lutte à mort par laquelle j'essaie de faire la preuve de mon humanitécomme liberté face à la vie, reste à en comprendre l'absurdité.
L'enjeu est la reconnaissance par l'autre, quiseule peut faire la preuve que je suis bien ce que je prétends être.
Or il est certain tout d'abord que cettelutte ne sert à rien si les deux meurent, ou refusent la lutte, ou qu'un seul survit.
La seule configuration oùla reconnaissance est possible est que l'un abdique par peur de la mort, souci de la survie, et l'autre non.
Lamort sert donc de discriminant entre deux consciences, l'issue du conflit dépend du rapport que chacun desdeux entretient avec la mort.Celui qui a véritablement accepté de courir le risque de la mort pour prouver la valeur de sa liberté et sonindépendance face à la vie biologique est dit « le maître ».
« C'est seulement par le risque de sa vie que l'onconserve la liberté » L'autre, qui a préféré la servitude à la mort, est dit « l'esclave ».Le maître a prouvé qu'il méprisait la vie au point de la risquer pour montrer qu'il n'était pas ce qu'il paraissaitêtre immédiatement, un simple vivant.
C'est face à la vie que s'éprouvent les valeurs.Mais, et là réside l'absurdité de cette lutte, pour être reconnu, pour prouver sa valeur, il faut rester en vie :« Dans cette expérience, la conscience de soi apprend que la Vie lui est aussi essentielle que la pureconscience de soi.
»Le maître réalise ici une expérience qui est exemplaire de la dialectique : à la fois il nie la vie (il la met enjeu), il la dépasse (en prouvant qu'il ne se réduit pas à la simple animalité guidée par le souci de seconserver) et il la conserve (sinon la lutte serait ratée).
C'est une opération que Hegel nomme une «Aufhebung » et qu'on traduit parfois par sursomption (nier, dépasse, conserver).On comprend dès lors la différence entre la mort naturelle (le simple fait de périr) et la mort telle qu'elleapparaît ici et qui vise autre chose, non pas le simple anéantissement de la vie, mais son dépassement.
Enfinsi c'est face à la vie que se pose toute valeur, la valeur se détache sur un horizon de vie et en restedépendante.
C'est pourquoi la lutte à mort est à la fois nécessaire et contradictoire.Il faut enfin comprendre cette dialectique comme la matrice logique de toutes les luttes réelles ousymboliques qui ont lieu dans l'histoire.
La violence historique n'est pas une violence naturelle.
On la verraréapparaître chaque fois que l'on tendra à assimiler l'homme à un simple vivant, à un simple animal.
On verraresurgir la violence chaque fois qu'on déniera à l'individu toute valeur.Se joue, dans la lutte à mort, la condition d'émergence de la sphère véritablement humaine, celle desvaleurs.
L'homme s'élève au-dessus de la vie parce que seul il est capable de mettre ainsi sa vie en jeu pourse libérer du seul esclavage possible, celui de la vie.
La phrase est aussi une réponse à tous ceux qui font del'angoisse sécuritaire et de la préservation de la vie le motif principal des actions humaines.
Par exemple àHobbes qui faisait de la peur de la mort le socle de la politique et de la construction de l'Etat, Hegel répond :« L'individu qui n'a pas mis sa vie en jeu peut bien être reconnu comme personne, mais il n'a pas atteint lavérité de cette reconnaissance comme reconnaissance d'une conscience de soi indépendante.
»Par un retournement dialectique, l'esclave contraint au travail deviendra le moteur de la libération humaine,de la discipline de l'instinct : le maître sombrant dans la barbarie du caprice.Mais il faut retenir de la lutte à mort pour la reconnaissance que l'on est véritablement humain, autrequ'animal, que l'on ne prouve sa spiritualité, sa liberté, que pour autant qu'on soit reconnu comme tel par unautre homme.
L'aspect conflictuel de la rencontre avec autrui montre que notre humanité est toujours àreconquérir contre tout ce qui tend à nous assimiler à un simple vivant.
HEGEL (Friedrich-Georg-Wilhelm).
Né à Stuttgart en 1770, mort à Berlin en 1831. Il fit des études de théologie et de philosophie à Tübingen, où il eut pour condisciples Hölderlin et Schelling.
Il futprécepteur à Berne de 1793 à 1796, puis à Francfort de 1797 à 1800.
En 1801, il devient privat-dozent à l'Universitéd'Iéna puis, les événements militaires interrompirent son enseigne- ment, et il rédigea une gazette de province.
En1808, il fut nommé proviseur et professeur de philosophie au lycée classique de Nuremberg.
De 1816 à 1818, ilenseigna la philosophie à l'Université de Heidelberg ; enfin.
à Berlin, de 1818 à sa mort.
due à une épidémie decholéra.
Peu de philosophes ont eu une influence aussi considérable que celle qu'exerça Hegel.
Peu aussi furent plussystématiques dans l'expression de leur pensée.
L'idéalisme hégélien part d'une conception de la totalité.
Le Toutest l'unité des opposés, la non-contradiction.
Mais la réalité est contradictoire, parce qu'elle est vivante, et viceversa.
L'étude du développement des notions universelles qui déterminent la pensée, constitue la logique.
Réel etrationnel (la réalité est raisonnable et le raisonnable est réel), être et pensée, se concilient dans l'idée, principeunique et universel.
L'idée, c'est l'unité de l'existence et du concept.
« Nous réserverons l'expression Idée auconcept objectif ou réel, et nous la distinguerons du concept lui-même, et plus encore de la simple représentation.» Le développement de l'Idée détermine l'être.
La science étudie ce développement la logique en précise les lois, quisont la contradiction et la conciliation des contraires.
Le mouvement de l'idée, qui se traduit par la marche de lapensée, procède par trois étapes successives : la thèse, l'antithèse qui est sa proposition con- traire, et lasynthèse, qui concilie les deux, les dépasse.« La synthèse, qui concilie les opposés, ne les nie pas.» Ce mouvement.
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